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Tebboune installe les nouveaux membres du CNESE: 90 milliards de dollars circulent sur le marché parallèle

par R. N.

Le président de la République a affirmé, hier, que le poids financier de l'économie informelle avoisine les 10.000 milliards de dinars, soit près de 90 milliards de dollars et le montage automobile a fait perdre à l'Etat 3,2 milliards de dollars.

Abdelmadjid Tebboune a prononcé hier un discours en ouverture à la plénière consacrée par le CNESE à l'installation de ses 200 membres dont 20 le sont au titre «des personnalités qualifiées désignées intuitu persona». Au-delà de ses nombreux rappels relatifs à la situation socioéconomique qui prévaut dans le pays, le président a évalué l'argent brassé par l'économie informelle, a-t-il dit, à «environ 10.000 milliards de dollars, même si personne n'a le chiffre exact, soit près de 90 milliards de dollars, il y a donc beaucoup d'argent, c'est pour ça que j'ai dit que l'Algérie ne se tournera pas vers l'endettement extérieur auprès du FMI, si on est obligé de le faire, elle va vers l'endettement intérieur». Il égratigne quelque peu les hommes d'affaires privés en leur reprochant de répéter «il faut que l'Etat...», ceux qui veulent travailler oublient l'Etat parce qu'en tant qu'agents économiques, vous devez décider ! L'Etat, lui, oriente, c'est tout» ! Il affirme que «90% de l'économie nationale est financée par les ressources publiques». Il note toutefois qu' «aujourd'hui, le privé est présent dans 85% de l'économie nationale mais il est financé à hauteur de 85% par les banques publiques, ce qui est curieux» ! Il exhorte les privés à avoir «leurs propres capacités financières pour les besoins de leurs activités, il ne faut pas que pour construire un hôtel, ils demandent des prêts aux banques, l'Etat peut peut-être gérer l'autorité mais pas l'économie». Il évoque la mission de dialogue du CNESE entre le public et le privé parce qu'il faut un effort pour relancer l'économie, il faut que le privé participe au financement et à la promotion de l'économie, on essaie de sortir d'une économie de rente et d'importation pour en construire une nouvelle productrice de richesse et créatrice d'emplois, on doit se libérer des hydrocarbures, aujourd'hui, notre économie est sous-développée, les secteurs ne se connaissent pas entre eux, ils préfèrent importer».

«C'est un vrai sabotage»

Tebboune rappelle encore une fois que «les exportations hors hydrocarbures ont atteint 3,2 milliards de dollars, on compte terminer l'année avec 4 à 4,2 milliards, l'importation doit compléter l'économie». Il fait savoir que «celui qui crée de la richesse et de l'emploi, la banque le finance à 90%». Il souligne fermement qu'«aujourd'hui, nous sommes dans des réformes structurelles et non conjoncturelles». Et ajoute-t-il : «la facture de l'importation est aujourd'hui de 31 milliards de dollars, il y a dix ans, elle était de 60 milliards de dollars, les rentrées de ce que nous produisons en hydrocarbures et hors hydrocarbures suffisent à couvrir les importations annuelles, sans toucher à nos réserves de change, c'est ça les équilibres que nous recherchons». Il regrette que «le montage automobile a été pour nous de gonfler les pneus des voitures montées à des prix exorbitants (...), on a perdu 3,2 milliards de dollars (...), il faut importer du sucre pour les besoins des citoyens, alors, pourquoi importer deux fois la quantité de sucre pour en réexporter une ?! L'Afrique est ouverte (...), aujourd'hui, il faut qu'on se prépare pour exporter ce que nous produisons, nous» ! Il rebondit sur les blocages administratifs pour indiquer qu' «on attend des gestionnaires de décider, mais ils refusent sous prétexte qu'ils ont peur, les investisseurs se sont plaint d'impasse dans l'administration, la bureaucratie est à combattre, c'est un vrai sabotage».

Avant de discourir sur l'état de l'économie nationale, le président a dit du CNESE que «c'est un instrument de prospective et d'évaluation, d'aide aux autorités dans l'économique, le social et l'environnemental». Le Conseil est aussi chargé, selon lui, du «dialogue et de la concertation, c'est une institution qui capte les compétences, les intellectuels, les scientifiques de divers horizons sur la base de critères précis».

Le Conseil doit participer à tracer «un schéma d'orientation économique qui s'inspire de la culture et des traditions du peuple, il faut un génie algérien qui connaît la réalité, le diagnostic, pour trouver des solutions algériennes à des problèmes algériens».

«Un droit d'initiative populaire»

Le président exhorte le CNESE à formuler «des recommandations non importées pour relancer l'économie dans son ensemble, promouvoir les politiques publiques, assurer le développement durable ». Il s'adresse aux membres pour leur dire : «Vous avez un rôle de dialogue, de débat avec tous les acteurs socioéconomiques, d'analyse, pour aider le gouvernement par les idées, loin des conflits institutionnels». Il a qualifié les élections locales du 27 novembre prochain de «halte importante dans la mise en place des institutions».

En introduction à l'ouverture de la plénière, le président du CNESE, Redha Tir, a souligné que «l'installation des nouveaux membres intervient dans des conditions exceptionnelles multidimensionnelles (...), particulièrement l'après-crise sanitaire (...), le CNESE est une structure consultative (...) qui a sa place dans l'espace du dialogue social et la concertation avec les différentes parties qui interviennent dans le développement particulièrement avec le patronat, les syndicats des travailleurs et les différentes catégories de la société civile, instaurant ainsi un droit d'initiative populaire (...), ce qui lui permet de participer avec force dans le rapprochement des avis sur les questions économiques et sociales et de là, à mettre en place une plateforme consensuelle relative au modèle de développement global du pays».

Le CNESE a élu, hier, à ESHRA à Aïn Benian, son vice-président, une fonction nouvelle (décret de janvier 2021), les membres de ses 7 commissions et leurs présidents respectifs. Il réunit aujourd'hui son nouveau bureau et valide son règlement intérieur. Le président du CNESE animera une conférence de presse en début d'après-midi.