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Cap de l'espoir et trouble-fêtes

par Abdelkrim Zerzouri

De sombres nuages reviennent envahir le ciel libyen. Vendredi dernier, les délégués du Forum de dialogue politique libyen (FDPL), réunis à Genève dans le cadre de ce dialogue inter-libyen sous l'égide de l'ONU, se sont quittés dos à dos à l'issue de quatre jours de pourparlers sur les conditions de la tenue des élections présidentielle et parlementaires prévues le 24 décembre prochain.

Les discussions ont buté sur les modalités de la tenue de ces élections, notamment le cadre constitutionnel ou la base juridique qui devrait régir ces rendez-vous. L'exigence de la nationalité exclusive des candidats à la présidence, qui élimine les prétendants qui ont la double nationalité, et qui exclut de la course présidentielle les militaires en fonction, n'a pas été du goût de ceux qui ont été de facto éjectés du processus. Khalifa Haftar en premier lieu ainsi que Seif El Islam Kadhafi, selon des affirmations publiques de membres du FDPL, veulent annuler ces conditions qui n'arrangent pas leur ambition politique. Ces derniers, toujours selon des membres du FDPL, chercheraient à se tailler une nouvelle Constitution sur mesure avant d'aller vers une élection présidentielle.

Les participants à cette réunion se sont quittés sur le désaccord en question, qui n'aurait pas de solution en vue si toutes les parties ne feraient pas passer l'intérêt de la Libye et du peuple libyen avant le leur, plutôt avant celui des pays qui les parrainent, notamment les Emirats Arabes Unis, l'Egypte, pour ceux qui ne se cachent pas de leur soutien au maréchal Haftar, ainsi que la Russie, les Etats-Unis et la France, qui veulent bien garder leur influence intact sur ce pays après décembre 2021.

Même le rôle de la mission onusienne n'a pas été épargné par les critiques de certains membres du FDPL, accusée de faire le jeu de ceux qui veulent mettre les bâtons dans les roues du dialogue. Il serait en tout cas absolument naïf de croire que des parties réunies au sein du FDPL agissent sans l'influence de pays qui les ont toujours soutenus, notamment dans des moments où le langage des armes régnait sur le pays. Déjà, à peine la réunion de la semaine écoulée terminée, Khalifa Haftar n'a pas tardé à exprimer sa colère, menaçant de reprendre les hostilités là où elles se sont arrêtées avant le dernier cessez-feu, soit revenir aux portes de Tripoli et chercher à prendre le contrôle du pays par la force.

A ce stade des complications, il ne serait pas vain d'exiger des parties influentes de cesser leurs manœuvres qui visent à influencer le destin de la Libye. Tout comme on le fait sur le plan de l'exigence unanime du départ des militaires étrangers et des milices. Il y a la présence étrangère physiquement palpable, dénoncée par une partie des Libyens qui, eux-mêmes, restent sous l'influence de pays étrangers ! La solution politique proposée par Alger reste la plus éloquente, c'est aux Libyens et à eux seuls de prendre en charge leur destin.

Dans ce fouillis, seul le chef du gouvernement de transition en Libye, Abdelhamid Dbeibah, garde le cap de l'espoir, affirmant que les élections du 24 décembre se tiendront dans le délai. Aura-t-il raison de tous ces trouble-fêtes ?