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Football - Cadors européens: Que signifie cette baisse de régime ?

par Adjal Lahouari

Il y avait des doutes mais ils se sont dissipés ces dernières semaines. Tous les « seconds couteaux » des cinq grands championnats européens étaient résignés face à l'impitoyable suprématie des clubs comme le Real Madrid, Barcelone, Man City, Juventus, Bayern, Liverpool, Paris SG et, il n'y a pas si longtemps, Man United de Sir Alex Ferguson. Il y a peine trois mois, la situation était celle qui a toujours existé, à savoir que les gros clubs étaient partis pour d'autres conquêtes, ne laissant que des miettes à leurs adversaires. Conscients de l'hégémonie de leurs clubs, les dirigeants ont élaboré un projet de « Super Ligue » dont ils seront d'office, les participants de droit. En fait, c'est une menace pour l'UEFA qui pense que l'actuelle Ligue des champions est spectaculaire et génératrice de belles recettes via les chaînes de télévision, la publicité et les recettes annexes. Mais la pandémie a donné un coup d'accélérateur au projet des grosses écuries, impactées sur le plan financier. Cette Super Ligue promet de verser aux clubs composant cette compétition des quotes-parts plus conséquentes. Mais ce projet se heurte à l'opposition de l'UEFA et d'autres organismes comme la FIFA, soucieux de leurs intérêts, et, bien évidemment, des nombreuses équipes des championnats européens « mises sur la touche ». Dans trois semaines, les huitièmes de finale de la Ligue des champions vont se disputer et, ce qui était quasi certain il y a trois mois sur le plan sportif, ne l'est plus aujourd'hui.

C'est d'ailleurs l'avis de Pep Guardiola qui avoue être incapable de prévoir ce qui va se passer, tant en Premier League qu'en Ligue des champions d'Europe. En Angleterre, l'ogre Liverpool pointe au quatrième rang, devancé par les deux Manchester et Leicester. Les Reds viennent d'être écartés de la coupe d'Angleterre par Man United, après leur défaite en championnat par Burnley, un club en difficulté, mettant fin à une longue série d'invincibilité à domicile. De ce fait, l'équipe de Mahrez a toutes les chances de s'installer en solo sur le fauteuil de leader si elle remporte son match en retard. Le coach de Liverpool Jürgen Klopp, qui assume l'échec de son équipe, avoue ne pas comprendre cette baisse de régime de ses joueurs, pourtant d'authentiques cracks qui ont fait largement leurs preuves ces dernières saisons. En France, le Paris SG est sérieusement concurrencé en championnat par Lille, co-leader, et Lyon, ce qui nous change de la suprématie des Parisiens au cours de la dernière décennie. En Espagne, le Real Madrid et le FC Barcelone ne font plus peur à personne, se faisant éliminer des compétitions par des adversaires moins nantis dans tous les domaines. En outre, la Liga semble promise à l'Atlético, qui pourrait augmenter son avance sur son voisin madrilène lors de la mise à jour du calendrier.

En coupe du Roi, le Real a été éliminé par un petit club de troisième division, pourtant réduit à 10 durant les dix dernières minutes de la seconde prolongation. Le Barça a été sorti par Bilbao dans le trophée des champions, ce même adversaire ayant éliminé auparavant le Real ! Toujours en coupe du Roi, les Catalans ont dû batailler durant 120 minutes pour s'en sortir face à l'UE Cornella, un club de troisième division. En Italie, la Juventus, neuf fois championne d'affilée, est lâchée au tableau cette saison par le Milan AC, l'Inter, la Lazio, la Roma et l'Atalanta qui vient de donner samedi dernier une leçon de football au leader de la Série A, le Milan AC. Malgré les exploits répétés de l'inusable Cristiano Ronaldo, la «Vieille Dame» est en train de marquer sérieusement le pas. En Allemagne, même le Bayern, qu'on croyait intraitable, commence à inquiéter ses dirigeants. S'il est en tête de la Bundesliga, il n'est plus aussi dominateur. On se souvient qu'il a subi une déroute historique face à Hoffenheim, suscitant le courroux de la légende Franz Beckenbauer. Et puis, ses poursuivants, grâce aux hasards du calendrier, sont en train de se « massacrer » entre eux, pour le plus grand bonheur des Munichois. S'il est appelé à être sacré une nouvelle fois, on devra souligner que le Bayern aura bénéficié de circonstances rares.

Dans trois semaines donc, le suspense sera de mise en raison de ce nivellement des valeurs par le bas. Et les duels Atlanta - Real Madrid, Barça - Paris SG, Lazio - Bayern, Leipzig - Liverpool et Porto - Juventus devraient être plus équilibrés et plus indécis qu'on ne croit. En outre, il ne faudrait pas oublier que les outsiders comme l'Atlético, Séville et M'Gladbach entre autres, vont sonner la révolte. La leçon, c'est que dans le football, rien n'est jamais totalement acquis. Et c'est tant mieux pour le spectacle.