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Eclipse des assemblées élues

par Abdelkrim Zerzouri

Où sont passés les élus du peuple ? L'éclipse remarquable ces derniers jours des assemblées élues, nationales et locales, laisse croire que le pays est en état de guerre. Effectivement, on y vient doucement mais sûrement à cet état de guerre totale contre le coronavirus. Désormais, le pays fonctionne selon un schéma administratif, avec en haut de la pyramide le président de la République, qui régule toute la vie politique, sociale et économique et en bas les commis de l'Etat, les walis qui disposent de larges prérogatives pour prendre les décisions qui s'imposent en matière de vie locale.

Bien sûr, l'urgence des interventions dans le cadre de la lutte contre l'ennemi invisible, en l'occurrence le Covid-19, met le président de la République devant sa responsabilité constitutionnelle, qui lui accorde de larges pouvoirs en pareille situation d'urgence ou d'exception, mais cela ne constitue pas pour autant un alibi à cette éclipse des parlementaires

et des élus locaux. Ces derniers doivent au moins se rendre utiles dans cette guerre, à travers des signes de solidarité avec les sans-abris et les nécessiteux, ou encore en se mettant à l'avant des lignes de combat pour empêcher la propagation de la pandémie, notamment par le biais des actions de sensibilisation, d'hygiène publique, tout simplement se tenir aux côtés des populations dans ces moments difficiles.

Hélas, en général, puisqu'il peut exister des cas d'exception, c'est cet acte de présence qui fait défaut aux assemblées élues, dont on n'entend plus parler depuis plus d'un mois, pas

seulement parce qu'on ne peut réunir leurs membres. Il est vrai que la pandémie du coronavirus a posé ce problème dans de nombreux pays, soumettant un sérieux problème d'un point de vue démocratique dans ces pays où rien ne passait sans l'aval des assemblées élues, mais en Algérie, où cette force de la démocratie, qui soupçonnerait une quelconque monopolisation de l'autorité publique dans ces conditions singulières, n'existe pas encore, on aurait juste souhaité que ces élus se manifestent, non pas pour bloquer les décisions du président de la République ou des walis, mais à minima pour donner une justification à leur existence en tant qu'institutions qui roulent également pour le bien du pays et des citoyens.

En tout état de cause, cette «situation extraordinaire» due à la pandémie du coronavirus devrait donner à penser, quand on aura des assemblées élues légitimes et fortes, pour la situer clairement dans la prochaine Constitution, notamment sur ce plan de l'urgence sanitaire et des mécanismes qu'il faudrait mettre en place sous l'autorité du président de la République. Ne plus laisser l'autorité qui décide, gérer l'état d'urgence, elle-même.

Présentement, pour faire face à cette situation, les autorités publiques ont tout fait dans ce sens, seules, recourant à l'innovation, en créant des commissions administratives chargées de la gestion de cet état d'urgence. Les élus dans tout ce branle-bas de combat ? Ils ne doivent pas attendre des invitations pour s'y impliquer. Ils sont des citoyens, et force est de reconnaître que le combat réel contre la pandémie du coronavirus est entre les mains des citoyens, puisqu'il n'existe ni médicaments ni autres moyens à leur disposition que cet acte volontaire de se cloîtrer.