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L'immobilisme forcé

par Abdou BENABBOU

On ne mesure pas encore l'incidence économique provoquée par ce qui semble être le début d'un cataclysme épidémique mondial. S'il est vrai que la psychose au sein de la population algérienne est bien là comme elle est présente partout dans le monde, le parcours sans frein du coronavirus produit un autre mal non encore visible et risque de malmener sérieusement tout un pan de l'économie algérienne.

L'ouverture du marché au commerce libéral, bien qu'elle soit survenue avec des tares évidentes, a permis néanmoins à des milliers de pères de familles de vivoter en écoulant des bagatelles toutes chinoises allant d'ustensiles secondaires aux petits bibelots primaires. Parallèlement, de petites industries se nourrissant d'une multitude de composants et d'attirails importés de Chine vivent actuellement désemparées face à la profonde anesthésie des ports et la plupart d'entre elles ont baissé les rideaux. L'un dans l'autre, ces évidentes mises à mort se rejoignent pour renforcer une maléfique crise économique et sociale devant laquelle l'action politique et ses éventuels remèdes deviennent hypothétiques.

Devant le confinement chez elle de la population qui a déjà à tort ou à raison commencé, il est à craindre que la situation déjà noircie par tout ce que les Algériens ont depuis des années vécu ne soit encore plus obscurcie. Le large immobilisme forcé par la pandémie devenu visible à l'œil nu, conjugué avec la décrépitude d'une gouvernance passée, n'offre pas des perspectives rassurantes.

Il est vrai que le gouvernement a déjà fort à faire et que sa tâche est déjà ardue. De par la sclérose du négoce international naissante avec sa tendance à s'accentuer, important tout ou presque, l'Algérie risque de voir sa consommation s'acheminer vers une généreuse gelée. Si le génie malfaisant sournois de l'épidémie peut apparaître comme une providence pour restreindre encore plus les importations, il peut aussi s'ériger comme un fatidique paravent contre des biens et services essentiels pour la population. Tenter de tempérer les peurs et les angoisses par le gouvernement est certainement le remède le moins efficace. Dans ce cas d'espèce, user de la langue de bois et du vocabulaire de tempérance n'est pas productif. Contre les situations de détresse, le peuple est déjà plusieurs fois vacciné. Sans doute faudrait-il d'ores et déjà se préparer à étaler le langage de la vérité.