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Une diplomatie à relancer

par Abdelkrim Zerzouri

L'ouverture de représentations consulaires à Dakhla et à Lâayoune au Sahara Occidental par les gouvernements de la République de Guinée et du Gabon ne peuvent en aucun cas légitimer l'occupation de ce territoire ni remettre en cause le droit inaliénable du peuple sahraoui à l'autodétermination, a fait entendre l'Algérie en relevant qu'il s'agit là de décisions graves et injustes.

Il s'agit d'une violation flagrante des normes du droit international, des décisions et des résolutions pertinentes du Conseil de Sécurité et de l'Assemblée générale des Nations unies relatives à la question du Sahara Occidental, s'insurge encore le ministère algérien des Affaires étrangères. L'Algérie affiche, ainsi, sa position inaliénable dans ce dossier. Mais, comment en est on arrivé à ce stade où des pays africains, naguère rangés derrière la position algérienne, se retournent contre des principes chers à l'Union Africaine, vantant la solidarité qui doit prévaloir entre les pays fondateurs de l'Union Africaine et qui doit guider leurs relations s'agissant tout particulièrement de leur nécessaire engagement à la défense en toute circonstance des règles et des principes figurant dans l'acte constitutif de l'Union Africaine, comme le rappelle le ministère algérien des Affaires étrangères ?

C'est un long cheminement, voire une guerre d'usure adoptée par le Royaume, qui a su tirer profit du repli algérien sur le plan diplomatique. Empêtré dans ses problèmes internes et préoccupé en premier lieu par les problèmes générés au niveau de ses frontières suite à de graves conflits sanglants dans les pays du voisinage, qui menacent directement sa stabilité, l'Algérie a sombré dans un «vide diplomatique» qui a profité à ses rivaux. Principalement au Maroc qui a su, particulièrement en 2019, tisser des liens forts avec de nombreux pays, notamment ceux de l'Afrique de l'Ouest, regroupés au sein de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDAO), dont fait partie la Guinée, alors que la décision du Gabon n'a rien d'étonnant ou de surprenant vu les liens «amicaux» de longue date qui lient les deux pays. Une communauté que le Maroc a intégrée avec un statut d'observateur et où il a usé de son influence pour les amener à reconnaître la «marocanité» du Sahara Occidental. Parce que, même si l'enjeu apparent est économique, le souci majeur du roi Mohamed VI demeure cette bataille qui vise à faire admettre par la communauté africaine et internationale le fait accompli de la «marocanité» du Sahara Occidental. Et quoi de plus consistant que la pression ou l'argument économique pour rallier ces pays à sa cause. Cela rappelle la politique suivie par l'Etat d'Israël, qui cherche à convaincre ses alliés d'ouvrir des représentations diplomatiques dans la ville d'El Qods occupée, pour faire taire les Palestiniens qui revendiquent cette ancienne cité comme capitale de leur Etat. Le roi du Maroc, bien éclairé par ses conseillers, a foncé dans cette tactique qui vise à faire reconnaître de facto la «marocanité» du Sahara Occidental par la communauté africaine et internationale, puisqu'il n'est pas exclu que d'autres pays européens ou américains suivent l'exemple de ces deux pays, et avant eux Les Comores, qui ont ouvert, déjà, un consulat général à Laâyoune le 18 décembre 2019. L'Algérie, qui sort à peine de sa torpeur diplomatique, devrait certainement aller plus loin que confectionner des communiqués de dénonciation. Il serait primordial à l'Algérie de faire les bouchées doubles pour regagner les espaces d'influence qui sont siens, notamment en renversant le sens de la vapeur qui fait pousser des ailes au Maroc dans la Sahara Occidental.