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Madame la Ministre, vous n'êtes pas coupable, mais responsable!

par El Yazid Dib

Apparemment, à l'heure de la transcription de ces lignes, sa démission ou son limogeage est en l'air. Des noms ont été annoncés pour son remplacement. Encore que ces noms ne pourront pas remplir adéquatement le fauteuil ministériel. Enfin ceci est une autre affaire.

Toutefois et en l'état, le grand patron de la caisse des droits des auteurs et de tout artiste vient de subir une belle coupe longitudinale. Une mesure dite préventive. Une mise fin à ses fonctions. Ainsi et avant même que les résultats de l'enquête diligentée par l'autorité judicaire n'aient à établir les culpabilisations, voilà qu'un premier présumé auteur indirect et pas des moindres vient de tomber. Cela s'apparente à la chute d'un empereur en attendant l'effondrement du sommet de l?empire. C'est la moindre des mesures à prendre au plan administratif diront les plus avertis quand la plus importante reste toujours dans cette indifférence de la tutelle de vouloir se démettre ou se de se voir carrément démis. Si dans la règle de Droit et ses élémentaires théories, les responsabilités sont ou d'un fait personnel, du fait d'autrui ou du fait des choses et des animaux, il y est de ces responsabilités tacites et non expresses qui ne s'inscrivent que dans la case morale et qu'aucun code ne prévoit. La responsabilité politique. Celle pour laquelle l'on ne peut faire des choix à demi-mesure. Elle est entière, totale et de bout en bout dès l'acquiescement à remplir ou pourvoir le poste. C'est presque une vente en gros, à prendre ou à laisser.

En pareille situation, devant un tel drame l'on ne doit pas émettre ses propres émotions, mais assumer ses propres responsabilités. Les condoléances les plus attristées ou les mansuétudes les plus affligées ne régleront en rien le chagrin des parents éplorés. Certes, la démission aussi n'aura, quant à elle que le même effet à un degré donné et n'arrivera pas à consoler les proches des défunts. Mais fera, tout de même, enraciner cette culture de savoir prendre sur soi le sens d'avoir failli à une mission et l'absence de déclinaison des risques encourus. Elle permet au moins la décantation de sa conscience et le refroidissement de la tête après l'euphorie, le faux enthousiasme et l'excès de suffisance. La responsabilité politique est un acte de bravoure, la démission lorsqu'elle s'impose est une expression d'honneur. Une auto-évaluation.

Fuir ce qui est imputable ou imputer le fait à des faits externes de sa volonté n'est qu'une gageure de mineur. Une négation puérile, type de ce n'est pas moi, Monsieur ! L'élément exogène comme effet dans la responsabilité n'absout en rien l'endogène comme cause. Il n'y a nul besoin d'aller chercher les causes mortelles dans le stade ou ses alentours. Dans la densité ou la chronologie. La mort était déjà dans le manque de professionnalisme, le défaut de savoir réunir les foules et dans le choix de la géographie comme p'tit salon de réception. La mort de ces enfants et les souffrances de ces blessés seraient, à priori dans cette compétitivité absurde de vouloir égaler de talentueux organisateurs, cette envie de paraître travailler et faire quelque chose dans la morosité d'une citoyenneté à bout de souffle.

Ce sont au sens managérial tous ces imprévus, ce croisement fortuit impensé, à la limite ce compter sur l'autre et sur tout le monde, qui viennent charger d'une lourde responsabilité gestionnelle la ministre de la Culture.

C'est sous son égide, son haut patronage à défaut de fakhamatouhou, que s'est déroulé la tragédie. En toutes circonstances ce fâcheux événement restera dans la triste mémoire de la culture algérienne, de ses désinvoltures et de ses plus mauvais relais.

Il sera une mention supplémentaire à rajouter à la pauvreté d'un cursus par une encre funéraire pour bien attester la nomination par défaut. Six mois après, la culture doit sortir de toutes ses convalescences.