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Une impasse qui interpelle l'esprit patriotique

par Kharroubi Habib

Gaïd Salah persiste à camper dans le refus de tout accommodement sur la question de la transition qui tout en maintenant celle dans le cadre constitutionnel défendu par lui donnerait satisfaction au peuple qui ne veut pas la voir conduite par les trois « B », Bensalah à la présidence de l'Etat, Belaïz à celle du Conseil constitutionnel et Bedoui à la tête du gouvernement. Son obstination ne lui est assurément pas dictée par une inflexible fidélité à l'esprit et à la lettre de la loi fondamentale régissant le pays. Les Algériens ont eu à vérifier que Bouteflika régnant, Gaïd Salah qui leur martèle aujourd'hui l'obligation de rester dans le cadre constitutionnel n'a même pas été perturbé par les tripatouillages qu'a subis la loi fondamentale et n'a pipé mot sur l'usage vénéneux qu'en firent le président et ses affidés.

En fait, si le commandant en chef de l'armée ne veut pas céder sur la revendication populaire de la mise à l'écart des trois « B », c'est parce qu'il a parfaitement conscience qu'en la satisfaisant il conforterait la dynamique du « dégagez tous » qui soude le mouvement citoyen et dont il n'ignore pas qu'il est tout autant la cible qu'eux. L'autre raison qu'il a pour ne pas le faire est qu'en se montrant tatillon sur le respect du cadre constitutionnel, cela renverrait ainsi à l'opinion internationale l'image que la transition qu'il défend ne contrevient pas à l'ordre institutionnel du pays et qu'en la soutenant l'armée n'enfreint nullement celui-ci.

Dans l'impasse où est la situation en Algérie du fait que le nouvel homme fort ne veut pas entendre parler d'une transition « aménagée » qui satisfasse la revendication populaire et que le mouvement qui l'exprime s'en tient irrévocablement à elle, la tentation est grande chez les deux parties d'exercer une pression plus forte l'une sur l'autre. Elle se manifeste déjà de la part du pouvoir qu'incarne le chef de l'état-major de l'armée par les actes d'intimidation et d'interventions brutales que commettent les forces de l'ordre contre les contestataires qui continuent à dénoncer la solution de la transition constitutionnelle avec les trois « B » pour acteurs. De la part du mouvement citoyen aussi qui se montre déterminé à faire des démonstrations de sa force sous forme d'actions visant à la paralysie du gouvernement dont il ne veut pas et à rendre illusoire la tenue de l'élection présidentielle censée intervenir au terme de la transition qu'il conteste.

C'est dire que le bras de fer entre les deux protagonistes de la crise politique qui a revêtu jusque-là un caractère pacifique festif par certains aspects, voire même débonnaire risque de prendre une tournure dont la gestion leur échappera à la moindre dérive.