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Fin de règne

par Mahdi Boukhalfa

Une réunion de crise de l'état-major de l'ANP, une autre proche du cercle présidentiel, des chefs d'entreprises publiques et privées empêchés de sortir du territoire national et le Conseil constitutionnel qui reste sourd aux appels à l'application de l'article 102 donnent un tour inédit aux événements politiques actuels. Et accélèrent la décantation, même si le cercle présidentiel, qui a l'appui du président du Conseil constitutionnel, veut résister autant à la charge de l'ANP qu'à celle de la rue qui réclame l'application de l'article 7 de la Constitution.

Les dernières 24 heures ont montré que l'ANP commence à s'énerver devant l'entêtement du premier cercle présidentiel à résister à la volonté populaire et de ne pas vouloir céder le pouvoir. Il en est ainsi de la position inexpliquée du Conseil constitutionnel qui aurait dû s'autosaisir sur la question de l'application de l'article 102, mais qui n'a pas été réceptif notamment à «la solution» préconisée par Gaïd Salah. Cela confirme qu'il y a de fortes résistances au départ de l'actuel système. La réunion «de crise» de samedi du chef d'état-major avec les chefs de forces et celui de la 1re Région militaire donne à penser que des manœuvres sont en cours pour faire durer cette période d'instabilité, sinon à sortir avec un scénario encore plus déstabilisant pour le pays. D'autant que le président Bouteflika n'est plus intervenu depuis son message à l'occasion de la fête de la Victoire et qu'on n'entend plus parler du Premier ministre.

La sortie de Gaïd Salah en dégainant le 102 ne semble pas avoir fait grand effet au niveau du Conseil constitutionnel, encore moins dans l'entourage du président, en dépit des défections de l'UGTA et du RND et le basculement progressif du FLN. C'est une sorte de défiance autant à l'armée et son chef qu'au peuple et les institutions du pays. Une posture qui risque d'envenimer les rapports de force au plus haut sommet de l'Etat avec un autre scénario hitchcockien, à l'instar de celui annoncé le 11 mars dernier. Dans ces circonstances, on peut craindre toutes les dérives.

Il semblerait que le passage du 102 aux articles 7 et 8 de la Constitution, invoqués autant par les manifestants vendredi que l'ANP samedi au cours d'une réunion d'urgence, est en train de faire son effet auprès non seulement des «dirigeants», mais de leurs relais dans le milieu des affaires avec les départs de prétendus hommes d'affaires, empêchés de quitter le territoire national. Pour beaucoup, qui tentent de s'enfuir, cela a une odeur de fin de règne.