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En attente d'un relogement depuis plus 50 ans: Les habitants du bidonville oued Bastiane interpellent le wali

par Rachid Boutlelis

  Les habitants du bidonville Oued Bastiane, dans la commune de Mers El Kebir, viennent d'adresser une correspondance au wali d'Oran pour intervenir et mettre un terme au calvaire qu'ils endurent depuis plusieurs années. Dans cette correspondance, dont une copie nous a été remise, les habitants interpellent le chef de l'exécutif pour les intégrer dans les opérations de relogement inscrites par la wilaya, dans le cadre de l'éradication de l'habitat précaire.

Selon les représentants des habitants, d'importants programmes de logement ont été attribués aux habitants de plusieurs bidonvilles, à l'image de Ain El Beïda, Sidi Chahmi, Es Senia... etc., alors que leur hameau n'a jamais été intégré dans les opérations de relogement. Avant de recourir au wali, les habitants du bidonville ont organisé plusieurs rassemblements devant la mairie, pour revendiquer un relogement.

Les habitants de ce bidonville, nommé ainsi en référence au ru qui le traverse, viennent d'exprimer au Quotidien d'Oran leur vif désappointement au sujet de la non-prise en considération de leur déplorable situation. « Les précédentes autorités locales n'ont pas honoré leurs engagements alors que des assurances ont été données à nos représentants pour notre relogement », se sont indignés nos interlocuteurs avant de renchérir « nous revendiquons nos droits et nous ne baisserons pas les bras jusqu'à la satisfaction de nos doléances. Tout ce que nous réclamons c'est d'être intégrés dans le prochain quota de logements. A notre humble avis nous méritons au même titre que les autres familles sinistrées d'être relogés ».

Le hameau Bastiane, qui est constitué d'une trentaine de maisonnettes rudimentaires, essentiellement construites de parpaing et de tôle ondulée, s'étend en contrebas d'une petite route franchissant partiellement le lieudit Sardina. Pour y accéder, on doit emprunter un petit sentier en terre battue, dissimulé par d'abondants feuillages d'arbres, qui longe en amont une rigole d'eaux usées, véritable source de maladies où se reproduit une diversité d'espèces d'insectes, et en aval l'oued Bastiane où se lovent toutes sortes de reptiles. C'est également le lieu où viennent s'abreuver, à la tombée du soir, des meutes de sangliers. L'étroitesse de la piste qui permet d'accéder à ces lieux est inaccessible à n'importe quel véhicule et rendent ainsi une évacuation d'urgence quasiment impossible pour une ambulance. Un unique poteau électrique éclaire une infime zone où les maisonnettes sont blotties les unes contre les autres, accrochées de part et d'autre du ru Bastiane à de petits monticules de terres humides, qui risquent à tout moment de s'effondrer. De vulgaires planches en bois sont disposées transversalement pour permettre de passer à l'une ou l'autre rive. « Presque tous les habitants sont atteints d'affections respiratoires en raison des exhalaisons putrides qui se dégagent des eaux de la rivière et de la briqueterie », a fait remarquer avec une pointe de dépit, au Quotidien d'Oran, un habitant demeurant depuis cinq décennies dans une habitation dont une grande partie du toit s'était effondrée. Les 27 familles qui tentent d'y survivre depuis cinq décennies, sont toutes issues de couches sociales très modestes qui trouvent d'énormes difficultés à joindre les deux bouts. En revanche, toutes ces familles disposent, chacune, de documents en bonne et due forme, attestant la conformité et autorisant à l'époque la construction de leur habitation. « Ces documents prouvent au moins que nous existons », a ironisé un habitant avant de renchérir « nous vivons à l'âge de pierre et les hommes des cavernes ne nous envieront certainement pas ». Notons que le hameau Bastiane est sorti de l'anonymat une année plus tôt à la faveur d'une autre protesta qui a failli basculer vers l'irréparable, orchestrée par ses habitants pour exprimer leur ras-le-bol et attirer l'attention des autorités sur leur situation de déliquescence. Notons que les habitants de ce hameau ont également souligné qu'ils ont usé de tous les droits que leur confère la loi et interpellent une fois de plus le wali d'Oran.