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La présidentielle reportée: Bouteflika renonce à un 5e mandat

par Mahdi Boukhalfa

La pression de la rue, la montée en cadence de la protestation de larges couches sociales et professionnelles contre le 5ème mandat et l'impasse constitutionnelle qu'aurait provoquée le maintien de la candidature du président Bouteflika ont été entendues par les autorités et par le chef de l'Etat qui a annoncé le report de la présidentielle d'avril prochain. Une annonce qui met fin à beaucoup de supputations et qui, dans la foulée, a été accompagnée par une seconde annonce, tout aussi importante, celle du retrait par le président de sa candidature à un 5ème mandat.

Dans un message adressé hier lundi à la nation, le président Bouteflika, rentré dimanche de son séjour médical à Genève, a annoncé le report de l'élection présidentielle du 18 avril 2019 ainsi que sa décision de ne pas briguer un 5ème mandat à la magistrature suprême. Mais, le processus politique enclenché ne sera pas pour autant annulé, ni remis au placard, puisque le chef de l'Etat annonce également que le principe de la tenue d'une conférence nationale inclusive et indépendante ne sera pas abandonné, un projet qu'il avait prévu et divulgué dans son programme préélectoral par son ex-directeur de campagne Abdelmalek Sellal, s'il était élu. Cette conférence nationale inclusive, qui rassemblera toutes les forces politiques, les acteurs de la société civile entre autres, se tiendra et devra ouvrir la voie à la préparation d'une élection présidentielle, et précédée cependant par la formation d'un gouvernement de compétences nationales.

Le report de l'élection présidentielle d'avril prochain et le retrait de sa candidature ainsi que la tenue d'une conférence nationale inclusive sur le devenir du pays au double plan politique et économique ne sont pas des annonces nouvelles, mais juste le résultat logique et prévisible de cette formidable colère de la rue, la protestation au sein de toutes les forces sociales et économiques, et un large mouvement national anti-5ème mandat. L'annonce de l'agenda politique du pays pour au moins les 12 prochains mois est autrement une réaction politique salutaire, car elle fait économiser au pays beaucoup de temps et de fausses manœuvres, comme elle est un signe évident que face à la maturité politique du peuple algérien, ses gouvernants ont également su comprendre et traduire dans les faits cette envie farouche d'un changement de gouvernance.

La pression de la rue, avec deux journées de grève générale après trois vendredis de suite de protesta contre le 5ème mandat et pour le changement politique dans le pays, a également fait sauter le verrou du Premier ministère, avec la démission de M. Ahmed Ouyahia du gouvernement. Des changements rapides sont prévus dans les prochains jours et on annonce déjà le remplaçant de M. Ouyahia, qui devra avoir comme principal agenda de préparer la conférence nationale inclusive, ensuite la prochaine élection présidentielle.

Dans son message à la nation, le président Bouteflika dit: « Premièrement, il n'y aura pas de cinquième mandat et il n'en a jamais été question pour moi, mon état de santé et mon âge ne m'assignant comme ultime devoir envers le peuple algérien que la contribution à l'assise des fondations d'une nouvelle République en tant que cadre du nouveau système algérien que nous appelons de tous nos vœux». «Deuxièmement : il n'y aura pas d'élection présidentielle le 18 avril prochain. Il s'agit ainsi de satisfaire une demande pressante que vous avez été nombreux à m'adresser dans votre souci de lever tout malentendu quant à l'opportunité et à l'irréversibilité de la transmission générationnelle à laquelle je me suis engagé.» Et «troisièmement : dans la perspective d'une mobilisation accrue des pouvoirs publics et du rehaussement de l'efficacité de l'action de l'Etat dans tous les domaines, j'ai décidé de procéder tout prochainement à des changements importants au sein du Gouvernement. Ces changements constitueront une réponse adéquate aux attentes dont vous m'avez saisi, ainsi qu'une illustration de ma réceptivité à l'exigence de reddition de comptes et d'évaluation rigoureuse dans l'exercice des responsabilités à tous les niveaux et dans tous les secteurs».