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La grève générale diversement suivie

par Y. Alilat, K.B., H.M.

La grève nationale contre le 5ème mandat, après des appels anonymes sur les réseaux sociaux, a été diversement suivie à l'échelle nationale, et a été également accompagnée. Les initiateurs de cette grève nationale s'étaient tracé l'objectif de « paralyser l'économie du pays pour que le régime entende notre colère ». Mais, hier, le suivi a été très disparate, d'une ville à une autre, et d'une wilaya à une autre, selon les rapports et témoignages. A Blida, qui concentre pratiquement toute l'activité commerciale, financière et bancaire et des moyens de transports du centre-ouest du pays, l'appel a été modérément suivi, en particulier dans le secteur des Transports. Hier dimanche, tout le réseau des transports publics (bus et trains) était paralysé, et les dessertes vers les villes de l'intérieur du pays ou vers Alger étaient assurées par les transporteurs privés. Les commerces étaient globalement ouverts, ainsi que les administrations, les banques et les agences d'Algérie Télécom et Algérie-Poste.

A Alger, la grève générale n'a pas été globalement suivie, si ce n'est des commerces fermés dans le centre-ville, entre la rue Larbi Ben M'hidi et Didouche Mourad et la Place Audin, où ont convergé des manifestations de lycéens. Par contre, les transports publics étaient absents dans le centre-ville également, notamment les bus de l'ETUSA et les trains de banlieue. Le métro fonctionnait normalement par contre, et seule la station de la Grande Poste-Tafourah était fermée, alors que celle de Khelifa Boukhalfa, en haut de la rue Didouche était ouverte. Les administrations et les banques étaient ouvertes, et aucune grève des fonctionnaires n'a été enregistrée, selon des témoignages. Plusieurs structures de Sonatrach ont été touchées par la grève, à travers le pays.

Par contre, à Béjaia la grève a touché tous les commerces, hormis les pharmacies, ainsi que le port commercial, totalement paralysé.

A Constantine, la journée d'hier ressemblait plus à un jour férié, car pratiquement tous les commerces ont gardé les rideaux baissés, en signe d'adhésion à l'appel à la grève générale. Dans les grands centres urbains, la grève générale a été largement suivie, tous les marchés des fruits et légumes étaient fermés, ainsi que les commerces de détail, les cafés et les buralistes et autres kiosques multiservices.

Les travailleurs de certaines administrations ont adhéré à cette grève générale, en marquant leur présence sur les lieux de travail, mais sans accomplir aucune activité, à l'exemple des services de l'état civil, dans la nouvelle ville Ali Mendjeli. D'ailleurs, rares sont les citoyens qui se sont manifesté pour un quelconque service. Les bureaux d'Algérie-Poste et les banques ont ouvert leurs portes et le travail fonctionnait d'une manière presque de contrainte, ainsi que les transports qui assuraient, par bus et taxis, les déplacements des citoyens vers toutes les destinations, y compris le tramway qui a fonctionné d'une manière régulière.

Dans la wilaya d'El Tarf, la grève générale a été observée dans les grandes agglomérations où les commerces ont baissé rideau, alors que les employés et fonctionnaires de nombreuses administrations n'ont pas travaillé. Le transport par bus et taxis était quasiment paralysé.

Même ambiance de grève des commerçants à Ouargla, Beni Ourtilane, dans la wilaya de Sétif, à Haizer, Bouira.

Par ailleurs, les travailleurs de la direction régionale du Trésor public de Annaba ont fait grève contre le 5ème mandat, indique dans un post, le député du PT Smain Kouadria, alors qu'à Tizi Ouzou, la grève a été largement suivie, avec des transports à l'arrêt, commerces et écoles fermés. A Bordj Bou Arreridj, où la grève des commerçants était mitigée, des travailleurs ont fermé la zone industrielle, alors que la zone industrielle de Rouiba, dans la wilaya d'Alger, est paralysée par la grève des travailleurs. A Tlemcen et les villes périphériques, tous les commerces étaient fermés. « Je n'ai jamais vu une grève générale de commerçants qui a paralysé toute l'activité commerciale de la ville de Tlemcen ! Même le marché couvert du centre-ville, le cœur historique de l'activité commerciale de Tlemcen, a fermé ses portes », souligne un habitant.

Selon des témoignages, toutes les villes de la wilaya de Tlemcen ont été touchées par cette grève des commerçants. A Ghazaouet, près de 700 employés de l'entreprise ?ALZINC' ont observé, de leur côté, un immense sit-in devant l'entrée principale de cette usine d'électrolyse de zinc et d'acide sulfurique, contre le 5ème mandat. Le port de Ghazaouet a été également paralysé par une grève des travailleurs.

A El Bayadh, également, la grève générale a été largement suivie par les commerçants de la ville, ainsi que par ceux des daïras de Brezina, El-Abiodh et Bougtob.

Dans plusieurs grandes villes du pays, cette grève a été diversement suivie, tant pour les commerces que les administrations et les transports publics.

Après, le fait que ces appels à la grève, largement suivie dans les villes de Khenchela, Béjaia, Bouira, Tizi Ouzou où même au Sud comme à Ouargla et dans plusieurs secteurs d'activités, est un signe évident du succès populaire des marches contre le 5ème mandat et la revendication d'un changement de régime. Les grèves d'hier dimanche, si elles n'ont pas été suivies partout dans le pays, ont cependant maintenu la pression contre le 5ème mandat. C'est la Confédération syndicale des forces productives (COSYFOP), qui a été le soutien principal à l'appel à la désobéissance civile avec son préavis de grève générale. L'appel a été soutenu par des syndicats autonomes, dont ceux de la Santé et de l'Education, et d'autres corporations professionnelles. Une grève nationale « reste très possible vu l'étendue des marches sur l'ensemble du territoire national et la détermination de la population contre un 5ème mandat de Bouteflika », avait estimé Mohamed Hennad, politologue. Et d'ajouter « en raison du manque d'initiatives de la part des tenants du pouvoir, qui donnent l'impression de se terrer, tout en laissant le chef de l'armée, M. Gaïd Salah, s'exprimer à leur place... » Cette grève nationale sera, selon lui, « l'ultime recours car elle va bloquer tout le pays ».

Hier, la grève nationale, pour appuyer la revendication populaire d'un rejet du 5ème mandat et le changement politique dans le pays, n'a pas rencontré le succès escompté par ses initiateurs, selon le constat de nombreux témoins.