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Lettre de Bouteflika: L'opposition parle de «provocation»

par R. N.

  Plusieurs partis politiques ont réagi hier à la «lettre de Bouteflika», doutant, pour certains, de son origine, appelant, pour d'autres, à «déclarer l'état d'incapacité» du chef de l'Etat, alors que les principaux partis de la «majorité présidentielle» estiment que le président a été «à l'écoute des Algériens ».

Dans sa réaction, le président de Talaie El Hourriyet, qui a annoncé dimanche le retrait de sa candidature, doute de l'authenticité du message du président de la République. «La lettre aux Algériens», attribuée au bénéficiaire d'une candidature fictive à un mandat présidentiel fictif, n'est manifestement pas la sienne », affirme un communiqué de Ali Benflis. « Ce sont toujours les forces extraconstitutionnelles qui sont à la manœuvre. Cette lettre est, dans le fond comme dans la forme, un nouveau défi inacceptable et une provocation supplémentaire inqualifiable», poursuit le document. Selon Benflis, le peuple algérien qui « attendait une réponse sans ambiguïté et sans louvoiement à ses demandes», «n'a eu droit qu'à la répétition d'anciennes promesses non tenues depuis vingt ans». «Aussitôt la lettre connue, la réponse du peuple algérien n'a pas tardé. Cette réponse populaire a, encore une fois, fait la démonstration de pacifisme, d'un très haut niveau de maturité civique, de conscience politique, ainsi qu'un attachement inébranlable à la paix civile », affirme encore l'ancien chef de gouvernement. Pour sa part, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) estime, dans un communiqué, que « la lettre lue par le directeur de campagne du chef de l'Etat, spoliant l'opposition de son projet pour mieux le pervertir, résonne comme une insulte de plus, une insulte de trop à l'intelligence collective du peuple algérien ». Le communiqué met en doute la sincérité des promesses contenues dans la lettre de Bouteflika. « Qui peut croire qu'un homme dont l'action politique se confond avec la longue liste des coups de force, des reniements et des intrigues qui ont mutilé la nation, peut se transformer en son contraire pour réaliser ? maintenant que les forces l'ont abandonné et que les caisses sont vides ? ce qu'il a scrupuleusement et méthodiquement combattu sa vie durant», lit-on dans le document. Par ailleurs, le RCD « en appelle à l'ensemble des forces politiques et sociales conscientes des enjeux et soucieuses d'offrir au pays les issues qui redonnent au peuple le libre choix de son destin». «Il s'agit de nous hisser au-delà des affiliations claniques, des tentations de carrières et des calculs opportunistes pour être à la mesure de l'extraordinaire élan de dignité et de témoignage de solidarité que nous prodigue notre jeunesse ».

Le Parti socialiste des travailleurs (PST) constate que «les gigantesques mobilisations populaires de ces dix jours qui ont ébranlé le pouvoir autoritaire de Bouteflika, n'ont pas suffi à le faire renoncer à un 5ème mandat. Sa réponse tant attendue ce dimanche 03 mars, s'est avérée être une farce de mauvais goût». «En réalité, à travers la pirouette de la conférence nationale, qui ne sera ni élue ni légitime, il propose un semblant de concession, non pas au peuple qui réclame la chute de ce système autoritaire et antisocial, mais à l'autre faction, oligarchique et libérale, qui n'a pas cessé de revendiquer le partage du pouvoir et qui semble parrainer l'ex-général candidat à cette présidentielle, Ali Ghediri», ajoute le communiqué du PST. Pour sa part, le Parti des travailleurs (PT), par la voix de sa secrétaire générale, Mme Louisa Hanoune, a appelé à « décréter l'état d'incapacité pour le candidat Abdelaziz Bouteflika ». « Hier et à travers le dépôt de dossier de candidature (du président de la République) a été organisée une provocation lourde parce qu'elle a exprimé un mépris intolérable pour le peuple qui exige le départ du système », a soutenu la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT). Dans une déclaration à TSA, Mme Hanoune affirme: « J'ai pris connaissance de la lettre d'engagement attribuée au président de la République (...). Je voudrais avant tout m'adresser à ceux qui parlent et décident au nom du président de la République et qui ont décidé de présenter son dossier de candidature pour leur dire: Messieurs, déclarez l'état d'incapacité du président de la République, (...) ayez pitié pour ce pays et pour cet homme ! ».

Le FLN et le RND satisfaits

Pour sa part, le Rassemblement national démocratique (RND) de Ahmed Ouyahia estime que le message de Abdelaziz Bouteflika « contient les réponses adéquates aux revendications de changement exprimées par les citoyens». Dans un communiqué publié sur sa page Facebook, le RND a salué le processus de « réformes révélées par le Président Bouteflika, le 10 février dernier lors de l'annonce de sa candidature, et qu'il a détaillées plus amplement dans son message à la nation, dont la tenue d'une conférence nationale de consensus, une profonde révision de la Constitution et l'organisation, prochainement, d'une élection présidentielle anticipée, en couronnement de ce processus, sans la participation du moudjahid Abdelaziz Bouteflika». Le RND estime que les engagements de Bouteflika dans sa lettre de candidature «apportent des réponses satisfaisantes aux revendications des citoyens pour le changement» et exprime le souhait de voir ce message «contribuer à l'instauration de la quiétude permettant à notre pays de continuer à avancer dans la sérénité et la stabilité vers le rendez-vous du 18 avril prochain ».

De même, le Front de libération nationale (FLN) affiche sa satisfaction pour les mesures annoncées dans la lettre de candidature de Bouteflika pour un 5e mandat. Dans un communiqué publié sur le site du parti, le FLN estime que la lettre du président de la République est « une feuille de route claire » qui apporte des «réponses aux réclamations du peuple, notamment aux jeunes».

«Les engagements pris par le Président dans sa lettre au peuple algérien démontrent, par son contenu et ses dimensions, la lecture juste et saine des revendications légitimes exprimées par les citoyens par des manifestations organisées à travers le pays », estime le FLN.