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80ème anniversaire de la Guerre civile espagnole: Oran, pour un hommage aux réfugiés républicains

par M.W. Et K.A.

A l'instar d'autres villes européennes et latino-américaines, la ville d'Oran a été retenue pour abriter, le 5 mars prochain, le 80ème anniversaire de la Guerre civile espagnole (17 juillet 1936 - 1er avril 1939), a-t-on appris auprès de Mme Immaculada Jimenez, directrice de l'institut Cervantès d'Oran. Un choix approuvé par le Parlement espagnol qui a décidé d'inclure, dans le programme de célébration, Oran qui a accueilli, rappelons-le, les exilés républicains. La fin de la Guerre civile espagnole et la défaite républicaine entraîna un important flux migratoire du nord vers le sud avec l'arrivée, dès février 1939, de milliers d'exilés espagnols en Algérie. Les hommes arrivés à Oran sont transférés dans la cinquantaine de camps d'internement ouverts dans le pays dont cinq à Oran, où les exilés espagnols sont confinés par l'administration coloniale française. Les républicains espagnols ont été traités comme des prisonniers de guerre, alors que c'étaient des civils, hommes, femmes et enfants, fuyant la guerre civile en Espagne, souligne-t-on. Dès le 31 mars 1939, une lettre du Gouverneur général d'Algérie (GGA) au ministre de l'Intérieur l'informe que le total des réfugiés espagnols en Algérie s'élève à 5100 personnes, auxquelles il faudrait ajouter un nombre indéterminé d'individus arrivés individuellement et hébergés par leurs familles. Deux camps sont alors ouverts dans le département d'Oran, l'un à Relizane et l'autre à Aïn El Turck. Cependant, les autorités administratives décident, pour des raisons politiques, de les transférer vers des camps dans le département d'Alger. Ainsi, le préfet, dans une lettre datée du 14 avril 1939, adressée à son homologue d'Alger, l'informe qu'il « pourvoit à l'entretien de 4265 réfugiés espagnols » et demande leur évacuation vers les camps du département d'Alger. La raison invoquée est que « la population européenne du département d'Oran est à 80% d'origine espagnole ». Les réfugiés espagnols sont rapidement internés dans des camps et il est proposé de les utiliser comme main-d'œuvre à bon marché dans les secteurs des ponts et chaussées (travaux ferroviaires et routiers, comme la construction de la transsaharienne), dans l'agriculture (greffe d'oliviers sauvages).

Ainsi et pour marquer cet évènement placé sous le thème de l'exil espagnol, une cérémonie d'inauguration de la bibliothèque de l'institut Cervantès d'Oran sera organisée le 5 mars prochain en présence d'une forte délégation espagnole dont la ministre de la Justice espagnole, le directeur général de la mémoire historique, le directeur général de l'institut Cervantès, l'ambassadeur d'Espagne à Alger, le consul général d'Espagne à Oran, des professeurs universitaires espagnols et algériens et de nombreux convives dont les autorités civiles algériennes. Cette bibliothèque sera baptisée du nom du photographe catalan Francisco Boix Campo, né le 14 août 1920 à Barcelone et mort le 4 juillet 1951 à Paris, apprend-on encore. Ce républicain espagnol est exilé en France en 1939 où il est emprisonné avec plus de 7000 Espagnols à Mulhouse. Considéré comme un prisonnier politique, il est déporté ainsi que ses camarades au camp de concentration de Mauthausen, le 27 janvier 1941 où il est affecté au service d'identification du camp. Ce clin d'œil à l'histoire fera également l'objet d'une table ronde avec pour thème l'exil républicain espagnol. Plusieurs témoignages seront apportés à l'occasion par des historiens et des universitaires sur l'exil espagnol notamment à Oran.

Pour rappel, à partir du XIXe siècle, une importante émigration a quitté l'Espagne pour l'Algérie et le flux a atteint son intensité maximale entre 1830 et 1880, et plus largement 1914, même s'il a duré pendant toute la période coloniale. Ce phénomène migratoire a concerné inégalement le territoire algérien en corrélation avec la proximité géographique, l'implantation décroissant de l'ouest vers l'est pour être négligeable dans le Constantinois et a donné naissance à la collectivité étrangère la plus nombreuse présente sur le sol algérien et des liens étroits étaient maintenus avec le pays d'origine.