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L'histoire à méditer

par Ahmed Farrah

Certes, 56 ans ne sont qu'un laps de temps insignifiant dans la vie des peuples pour arriver à ressusciter et refonder un Etat qui avait cessé d'exister il y a plus de 2.000 ans, depuis qu'il fut mis dans la parenthèse romaine, vandale, byzantine, omeyyade, ottomane et française. Mais continuer à bidouiller un modèle obsolète qui ne répond plus aux exigences du présent ni aux attentes du futur, condamne à revivre le passé avec toutes ses épreuves.

Il serait temps d'inventer du viable et du durable en ayant l'œil sur le chemin parcouru pour éviter de tomber dans le piège mortel de l'amnésie. Si, dans un passé récent, la légitimité historique s'était substituée au recours à la volonté populaire comme mode de gouvernance, plaçant des générations d'Algériens dans un épisode d'infantilisation, rien ne justifierait aujourd'hui le tutorat et le paternalisme, parce que les temps ont changé et les générations aussi. Ceux qui veulent étirer le temps en déréglant leurs montres ne pourront pas décaler les fuseaux horaires et empêcher le soleil d'être au rendez-vous, pile à l'heure.

Ces voix qui s'élèvent çà et là, méprisant l'intelligence, soufflant sur les braises pour attiser le feu et rajoutant de grosses couches au flou qui entoure déjà la prochaine élection présidentielle, devraient d'abord méditer sur l'histoire avant de mettre leur ego en travers des espérances d'un pays qui n'a plus de temps à perdre pour se normaliser.

En écoutant le retour venant des stades et de la rue et en parcourant ce qui se publie sur les réseaux sociaux, on ressent bien le malaise qui étreint son monde et qui serait dangereux d'occulter ou dissoudre dans des chapelles secrètes concoctant et reproduisant à la chaîne des scénarios dans lesquels l'épilogue est toujours le même. Ce monde, celui d'une jeunesse mal comprise -par ceux qui vivent le temps en rabiot- qui exprime son désarroi avec des codes propres à lui, mérite d'être écouté parce qu'il a accepté les règles du jeu et n'a pas rejeté la faute sur les générations précédentes pour avoir réduit les espoirs ou pour l'avoir jugé avec sévérité. Il n'est ni dans le déni, ni dans l'oubli, ni dans l'ingratitude. Il vit son temps sans plus? pour ne pas perdre l'autre partie de la réalité, l'avenir.