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Ouyahia, un «joker»

par Mahdi Boukhalfa

L'un, dans l'opposition, ne veut pas trop s'impliquer, l'autre, à la tête de la seconde force politique nationale, continue à jouer le jeu et le troisième, qui dirige le premier parti du pays, reste convaincu que le président Bouteflika va briguer un 5ème mandat. C'est, résumé, l'essentiel de l'actualité politique qui reste encore rivée sur les pronostics des uns et des autres quant à une éventuelle 5ème candidature de M. Bouteflika à la prochaine élection présidentielle. Certes, les images montrant un président affaibli lors des festivités du 1er Novembre ont donné du tonus aux opposants à cette candidature. Par contre, «Talaie El Hourriet», le parti d'Ali Benflis, ancien allié de Bouteflika passé dans l'opposition, reste prudent et ne donne aucune visibilité sur ses prétentions électorales pour le moment. Il préfère attendre la suite des événements, c'est-à-dire l'annonce soit d'une candidature pour un 5ème mandat, soit le retrait du chef de l'Etat de la course à la prochaine présidentielle.

Ali Benflis ne fait pas en réalité grand mystère de sa tactique puisqu'il l'a expliquée samedi devant ses militants. «L'Algérie vit politiquement une opacité totale, il n'y a pas de certitude sur un cinquième mandat. On n'est pas sûr qu'il y aura un cinquième mandat et on n'est pas certain qu'il n'y aura pas de cinquième mandat». Devant ses militants, il laisse la porte ouverte à toutes les éventualités en refusant de trancher si oui ou non son parti va participer à cette élection dans le cas d'une candidature officielle de Bouteflika. Prudent, il laissera cette décision au comité central du parti, une manière comme une autre de montrer qu'au sein de Talaie El Hourriet «on est démocratique».

Ce n'est pas le cas pour le patron du RND Ahmed Ouyahia qui a donné des consignes strictes à ses militants pour soutenir un éventuel 5ème mandat du président Bouteflika. Or, selon d'anciens cadres du FLN, il n'y a qu'Ahmed Ouyahia qui remplit les critères d'un potentiel présidentiable, en cas de retrait du président Bouteflika. Certes, il y a l'incontournable cooptation, mais Ouyahia pourra aisément l'avoir, même dans le cas d'une farouche opposition du FLN, un partenaire souvent imprévisible. D'autant que le SG du FLN, tranquille sur ses 18 mètres pour le moment, pourrait être tenté de rebattre les cartes si, comme le laisse entendre le président de Talaie El Hourriet, il n'y aurait pas une candidature pour un 5ème mandat. Et Ali Benflis, en homme du système, sait que tout est possible à ce stade des événements. D'autant que la prudence d'Ahmed Ouyahia à rester dans ses bottes et ne pas s'aventurer en terrain inconnu à un moment de rassemblement de la majorité présidentielle est significative de l'extrême discipline politique et morale de l'homme.

Jamais Ahmed Ouyahia, que l'on présente volontiers comme un potentiel présidentiable, avec un large consensus autour de sa candidature, ne tentera le diable en allant laisser transparaître quelques prétentions politiques alors que pour le moment un 5ème mandat n'est pas encore remis en cause. En cela, Ouyahia ne présente pour le moment aucun danger politique et restera dans le giron des orientations du président Bouteflika. A moins d'un signal, un feu vert pour que la donne change et que la course à la prochaine présidentielle soit plus ouverte, une éventualité qui ferait éclater la belle harmonie des partis de la majorité. Les pronostics restent ouverts et les options encore plus.