Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Pour répondre à une demande locale en hausse: L'Algérie «obligée» de recourir au gaz de schiste

par Yazid Alilat

L'Algérie va s'orienter résolument dans l'exploitation du gaz de schiste dans les pro chaines années pour couvrir la demande locale en gaz naturel, en hausse constante, a affirmé jeudi devant des journalistes le ministre de l'Energie Mustapha Guitouni. Il a expliqué, en marge d'une session de l'APN réservée aux questions orales, que» nous allons nous orienter vers l'exploitation du gaz de schiste, car nous sommes obligés d'augmenter les capacités de production, d'autant que la consommation interne est en constante augmentation.'' Le ministre a rappelé que les députés ne cessent de réclamer ?'le raccordement des 48 wilayas du pays au gaz naturel avec un taux de 100%». Fatalement, ce sera le gaz de schiste qui va couvrir cette demande future en gaz naturel, car actuellement près du tiers de la production de gaz est orientée vers l'exportation. Pour autant, le ministre reste prudent et explique que ?'l'exploitation du gaz de schiste se fera dans un cadre réglementé, d'autant que les technologies en la matière enregistrent un développement important''. ?'Nous allons travailler dans ce sens, a-t-il dit, car l'intérêt du pays en dépend», avant de préciser que la couverture à 100% en gaz naturel implique une production de 100 milliards de m³ pour la consommation interne. ?'C'est pourquoi, selon le ministre, il est impératif de trouver d'autres sources, à l'image du gaz du schiste que nous allons exploiter mais pas au détriment de la santé du citoyen ou de l'environnement». La production nationale actuelle en gaz naturel est d'environ 130 milliards de m³, dont 50 milliards de m³ sont destinés à la consommation interne, 50 milliards m³ réservés à l'exportation et 30 milliards m³ consacrés à l'activité des puits pétroliers. ?' Dès lors, l'option du gaz de schiste devient vitale pour le ministre, qui a souligné que «si nous arrivons à un taux de couverture de 100%, cela veut dire que nous allons consommer tout ce que nous produisons, et arrêter ainsi nos exportations et perdre des revenus considérables en devises. Nous sommes dans l'obligation donc de trouver d'autres sources de production du gaz». La couverture actuelle de la demande nationale en gaz naturel a atteint les 60 %, selon M. Guitouni, qui a ajouté que ?'si nous comptons l'utilisation du gaz butane et les réseaux d'approvisionnement en gaz naturel, nous pouvons dire que la couverture au niveau national a atteint 100 %''.

«L'Opep est libre et souveraine»

Par ailleurs, sur la dernière réunion à Alger des pays de l'Opep et Non-Opep, dont les décisions ont fait remonter les cours du brut malgré les appels insistants du président américain pour une hausse de la production, le ministre de l'Energie a réitéré que «l'OPEP est libre et souveraine dans ses décisions''. La réunion d'Alger «a été une réussite en ce sens qu'elle a permis aux pays de l'OPEP et non-OPEP de rester dans l'accord de juin 2018". Il a également souligné que la stabilité caractérisant actuellement le marché pétrolier a permis aux participants à la réunion d'Alger de parvenir à une décision «rationnelle». Quant au prix actuel du baril, qui est de 80 dollars en moyenne, M. Guitouni a rappelé qu'il dépend de la demande sur les marchés. «Si les prix augmentent, l'industrie s'arrêtera, la demande baissera et les stocks seront alors plus importants. Par conséquent, les prix chuteront, d'où l'importance de réaliser un équilibre entre l'offre et la demande», explique M. Guitouni, relevant qu'»un prix entre 70 et 80 dollars convient à l'Algérie». Il a également évoqué les concertations en cours entre les pays de l'Opep et Non-Opep, indiquant que ?'nous sommes en discussion avec les consommateurs pour trouver un compromis, et je pense que tout va pour le mieux, d'autant que le marché est stable. Cette stabilité, nous l'avons voulue et nous espérons qu'elle durera», a-t-il ajouté. Les pays producteurs, Opep et non-Opep, avaient convenu le 23 juin dernier à Vienne de maintenir à 100% le respect des engagements pris dans le cadre de l'accord de baisse, conclu fin 2016 à Alger, qui vise à retirer du marché près de 1,8 million de barils/jour (1,2 million barils/jour pour les membres de l'Opep et 600 000 barils/jours pour les producteurs Non-Opep).

Extension stratégique sur le Medgaz

Par ailleurs, le ministre de l'Energie a démenti la fermeture du gazoduc Maghreb-Europe (GME), inauguré en 1996 et qui fournit du gaz algérien aux marchés espagnol et portugais via le Maroc et le détroit de Gibraltar. Le Maroc avait récemment laissé entendre qu'il n'a plus besoin de gaz algérien pour alimenter ses centrales électriques, après un accord avec le Nigéria pour la fourniture de gaz. Selon M. Guitouni, une extension de ce gazoduc sera reliée au réseau du Medgaz, qui part de Beni Saf vers Almeria en Espagne, pour augmenter les exportations gazières de l'Algérie. Mis en service en mars 2011, le gazoduc Medgaz transporte annuellement près de 8 milliards de m³. Les travaux d'extension du GME, également dénommé Gazoduc Pedro Duran Farell, vers le gazoduc Medgaz sur 200 km, avaient débuté le 12 septembre dernier dans la wilaya de Tlemcen. Une extension qui permettra de relier le Gazoduc Pedro Duran Farell, qui va d'El Aricha (wilaya de Tlemcen) vers l'Espagne à travers le Maroc et le détroit de Gibraltar, au deuxième gazoduc sous-marin, le Medgaz, qui va de Beni Saf (wilaya d'Ain Témouchent) à Almeria (Espagne). Ce projet, officiellement, permettra d'améliorer les volumes d'exportations de gaz algérien vers l'Espagne de 8 mds de m3/an à 10 mds de m3/an, selon le PDG de Sonatrach Abdelmoumen Ould Kaddour. ?'Notre objectif est de continuer à produire plus de gaz et à en transporter plus vers l'Europe et en particulier vers l'Espagne'', avait-il récemment déclaré. Mais, officieusement, l'Algérie se prépare à répondre immédiatement à la non-reconduction par le Maroc de l'accord sur le GME, qui expirera en 2021.

Sur le front de la production nationale d'électricité, le ministre de l'Energie a annoncé que «le cahier des charges relatif à l'appel d'offre national pour la production de 150 MW d'électricité à partir de sources renouvelables avec des capacités de production locales sera lancé dans un délai d'un mois au maximum», et les entreprises intéressées par cet appel d'offre trouveront toutes les explications et les détails dans le cahier des charges. Le Programme national de développement des énergies renouvelables prévoit une production d`ici à 2030 de 22.000 mégawatts d'électricité à partir de l'énergie renouvelable destinée au marché intérieur. Le même programme prévoit la production de 10.000 mégawatts supplémentaires destinés à l'exportation. L'énergie produite à partir des sources renouvelables devrait représenter 27% de la production globale d'électricité en 2030 et le double de la capacité actuelle du parc national de production d'électricité, selon les prévisions du programme national de production d'électricité, ce qui devrait réduire de plus de 9% la consommation d'énergie fossile à l'horizon 2030 et l'économie de 240 milliards m³ de gaz naturel, soit 63 milliards de dollars sur 20 ans. Jusqu'à présent, le secteur a produit 400 MW à partir d'énergies renouvelables.