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Difficile transition politique

par Mahdi Boukhalfa

La dernière sortie médiatique du vice-ministre de la Défense, si elle continue de susciter moult réactions dans le landerneau politique national, n'en a pas moins révélé l'extrême indigence idéologique de beaucoup de partis qui aspirent à gouverner le pays. Certes, Gaïd Salah a recadré les acteurs de la scène politique, les invitant à éviter d'impliquer l'institution militaire dans de sombres calculs idéologiques à l'approche de la prochaine élection présidentielle et de faire preuve de plus de maturité. Il a surtout montré le chemin à éviter pour tous ceux qui veulent accéder au pouvoir, tout en confirmant que la grande muette reste au-dessus des enjeux politiques.

La parenthèse étant fermée, les partis politiques sont ensuite sortis de leur silence pour stipendier la proposition du MSP d'une transition démocratique et une alternance au pouvoir en douceur sous le parapluie de l'armée. Mais, l'appel «au secours» du MSP à l'armée pour cautionner cette démarche, en plus d'être une posture politiquement suicidaire, a montré que les partis, en particulier ceux bénéficiant d'une large audience populaire, restent loin des «minimas» démocratiques. Ce que le RCD a en effet dénoncé et montré du doigt quand il dit, en réaction à l'initiative du MSP, que «le combat démocratique (?) a pour but le changement du système à l'origine du désordre socio-économique et de l'instabilité institutionnelle qui menacent l'existence de la nation». «Faute d'assumer leur part de cette exigence, celles et ceux qui se réclament de la démocratie devraient au moins éviter de compliquer la situation par des initiatives sans issues».

L'allusion à la proposition du leader du MSP est à peine voilée et démontre la colère de certains partis de l'opposition quant à cet appel à l'armée pour garantir une transition démocratique à l'actuelle situation politique dans le pays que l'opposition n'hésite pas à qualifier de «critique» en évoquant une grave crise politique. Car beaucoup ont estimé dangereuse cette propension de recourir à l'armée pour garantir un difficile processus démocratique, à un moment où les partis proches du pouvoir plaident et poussent pour un 5ème mandat du président Bouteflika. Car il s'agit, bien évidemment, de cette élection présidentielle de 2019 qui fait bouger le landerneau politique, dans la perspective d'une possible 5ème mandature de Bouteflika, que certains, comme le MSP, veulent contourner, sinon avoir les garanties d'une présidentielle «propre», et c'est là que prend sa signification cette démarche du MSP qui voudrait en quelque sorte avoir une «caution» de l'armée pour une vraie alternative démocratique à l'actuelle situation politique.

C'est également cette ruse du MSP qu'évente le RCD quand il souligne qu'au lieu «de revendiquer les conditions d'une compétition régulière et transparente pour garantir l'exercice de la souveraineté du peuple, des parties (?) s'égarent dans des fausses et vaines pistes pour contourner cette condition sine qua non de toute sortie de crise». A moins de huit mois de la prochaine élection présidentielle, il semblerait que l'opposition ira en rangs dispersés affronter des partis au pouvoir qui ont déjà leur candidat et se préparent pour une 5ème mandature de Abdelaziz Bouteflika. Et, en attendant l'annonce d'une candidature officielle du candidat du FLN, du RND et des partis de la coalition gouvernementale, l'armée a définitivement clos le débat sur sa participation à la vie politique du pays. Il reste aux partis de donner de la texture à une démocratie qui se cherche encore et, surtout, à donner une vraie consistance à une si difficile alternative politique.