Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Bouteflika à l'occasion du 24 Février: Préférence nationale, «droits légitimes» et «devoirs»

par Ghania Oukazi

Le président de la République a rappelé hier qu'il a instruit le gouvernement à «faire valoir le principe de la préférence nationale» et à «agir en profondeur sur la gouvernance économique des structures de l'Etat et des entreprises publiques».

Le ministre de la Justice, garde des Sceaux a lu hier à partir d'Oran le message que le chef de l'Etat a adressé aux travailleurs en général et aux travailleuses en particulier à l'occasion de l'installation des instances organiques de leur Commission syndicale nationale. Tayeb Louh a représenté Bouteflika aux festivités commémoratives du double anniversaire du 24 Février marquant la 62ème année de la naissance de l'UGTA et la 47ème de la nationalisation des hydrocarbures. «Ces deux accomplissements historiques sont porteurs de la capacité du peuple algérien de se surpasser chaque fois qu'il s'engage pour un but déterminant pour son destin», a déclaré le président de la République. Comme l'avait fait le secrétaire général de l'UGTA la veille de la célébration des deux événements à Oran, Bouteflika a rappelé hier dans son discours «les sacrifices consentis par les travailleuses et les travailleurs algériens durant la décennie noire pour défendre l'outil de production et permettre la survie de notre économie face au déchaînement de la violence terroriste». Il estime qu'«ils ont démontré qu'ils sont et demeurent les dignes dépositaires du legs des héros du mouvement ouvrier national(?).» Il en appelle à la jeunesse «à se mobiliser, plus que jamais, pour relancer notre économie, construire l'Algérie forte qui offrira à tous ses enfants les conditions de vie et de travail souhaitables pour tous». Le président de la République enchaîne sur «la crise économique qui a perturbé les fondamentaux économiques mondiaux par ses conséquences multidimensionnelles» pour souligner qu' «elle nous interpelle pour bien fixer notre choix des meilleurs voies et moyens de réaliser l'essor de notre économie». Le déséquilibre des marchés pétroliers, dit-il, «et ses conséquences sur nos équilibres macroéconomiques implique pour nous la nécessité de sortir de la dépendance de notre économie des revenus des hydrocarbures et de nous atteler à diversifier nos sources de revenus en créant des richesses».

Instructions au gouvernement

Notant que «tout en restant fidèles à notre doctrine en matière de politique sociale et de solidarité nationale», Bouteflika affirme être convaincu que «la puissance des Etats repose désormais sur la faculté d'anticipation conjuguée à la compétitivité de leurs économies nationales, elles-mêmes articulées autour de la recherche et développement(?).» Il fait savoir alors que «le gouvernement a été instruit pour inscrire la relance de notre économie dans cette perspective et faire en sorte qu'elle fédère les forces vives de notre pays et repose sur l'énergie de notre jeunesse(?), qui ne doit plus entrevoir son avenir à travers le prisme des variations des prix du pétrole». Il met en avant l'obligation de «remettre en cause les distorsions structurelles de notre économie qui ont rendu possible notre exposition excessive à la crise qui a marqué les marchés pétroliers depuis 2014». Il affirme que «les travailleurs sont sur la ligne de front car l'industrie est au cœur du processus de relance de notre économie». Pour lui, l'entreprise «qu'elle soit publique ou privée est le levier de l'essor économique(?).» Le chef de l'Etat déclare avoir «instruit le gouvernement pour prendre la mesure des enjeux et définir les grands axes d'une action structurante à long terme en vue de moderniser le tissu industriel pour le porter aux standards internationaux de compétitivité et d'excellence technologique». C'est ainsi qu'il souligne encore à l'adresse du gouvernement qu' «il lui revient d'agir en profondeur sur la gouvernance économique des structures de l'Etat et des entreprises publiques, de créer les conditions de la cohérence des processus industriels en encourageant les dynamiques d'intégration verticale des chaînes de valeurs, en stimulant l'innovation et en multipliant les synergies». Le secteur public marchand doit, à ses yeux, jouer un rôle moteur dans la dynamique, en même temps, le secteur privé devra être encouragé et bénéficier d'incitations à investir et à innover. La nouvelle loi sur la petite et moyenne entreprise va, dit-il, dans ce sens et met en place les dispositifs nécessaires à l'émergence d'un large tissu d'entreprises compétitives.

Le président de la République aborde la nationalisation des hydrocarbures en tant que «grande date dans le processus de recouvrement de notre souveraineté et l'affirmation de la Sonatrach comme porte-drapeau efficace de notre industrie des hydrocarbures».

Le principe de la préférence nationale

L'Algérie doit désormais «fructifier son génie national afin de s'imposer comme un acteur économique performant et compétitif(?)», et ce pour «réduire notre vulnérabilité aux cycles des marchés pétroliers(?).». L'Algérie est déjà, affirme-t-il, «un acteur énergétique important, nous devons en profiter pour développer une économie souveraine et diversifiée, à cet égard, l'industrie pétrochimique, qui est en train de prendre son élan, devra être encouragée davantage pour valoriser nos hydrocarbures ». Abordant le volet des énergies renouvelables, Bouteflika note que «l'ensoleillement naturel exceptionnel de notre pays autorise les plus hautes ambitions dans une transition énergétique volontariste et visionnaire». Il rappelle «l'ambitieux projet de réalisation de 22 gigawatts avec notamment des centrales solaires devra être en ce sens un projet structurant au plus haut point(?).» Il déclare que «j'accorde une très grande importance à cet objectif et insiste pour que nous adoptions une attitude volontariste et visionnaire, mobilisant toutes nos entreprises et nos universités». L'agriculture, le tourisme, l'économie des services sont les domaines qu'il cite pour diversifier l'économie nationale. «Le gouvernement doit veiller, dit-il, à promouvoir la production nationale à travers la mise en place de conditions à même d'améliorer la compétitivité et la qualité des produits nationaux». Il recommande «d'adopter une conduite patriotique économique offensive qui verra l'Etat, loin de s'enfermer dans un protectionnisme stérilisant pour les entreprises nationales, fonder sa politique de modernisation du tissu industriel et la saine émulation entre entreprises publiques et privées dans le respect de l'éthique et des intérêts suprêmes de la Nation». Il appelle de fait «tous les acteurs concernés  à s'investir résolument dans la révolution numérique qui doit constituer la trame de notre ambition industrielle, ils bénéficieront de tout mon soutien mais aussi de mon exigeante attention». Il conditionnera plus loin sa demande «d'une économie diversifiée appuyée de plus en plus sur des activités plus intenses en technologie et à forte valeur ajoutée qui devra induire un repeuplement industriel qualitatif», à l'obligation qu'il fait au gouvernement pour faire prévaloir « rigoureusement le principe de la préférence nationale dans les commandes publiques de même que nous encourageons les produits nationaux à gagner en compétitivité et occuper une place majeure sur le marché national(?)».

«Droits légitimes et observation effective des devoirs»

Le capital humain étant, a-t-il précisé, «la clé de la réussite et le signe le plus évident de toutes les Nations, nous veillerons sans relâche à ce que notre pays(?) accède à l'excellence de ses universités et à un haut niveau technologique de ses entreprises». Il promet que «la politique de désendettement volontariste a porté ses fruits puisque nous sommes en mesure d'affronter cette crise (?), tout en étant rassurés quant à nos marges de manœuvre en mesure de nous permettre de mener un plan d'action efficace de sortie de crise».

 Bouteflika rappelle par ailleurs que «notre pays fait  face à l'instabilité de nos frontières» et prévient « qui nous impose vigilance et attention accrue dans nos approches en même temps qu'elle représente un coût économique dont tout le monde doit être conscient». Il recommande alors «la plus grande rigueur dans l'allocation de nos ressources et aller encore plus loin dans notre politique de réformes». Son autre instruction au gouvernement que «notre quête d'une plus grande rigueur dans la gestion ne puisse pas affecter les bas revenus ni sacrifier les principes de justice sociale et de solidarité nationale qui fondent notre action». Il estime ainsi que «il nous revient aujourd'hui de mener une politique de développement inventive, soucieuse de justice sociale, dans une situation exceptionnelle où la diversification de notre économie, dans un contexte de crise, impose rigueur et moralisation de la gouvernance, j'accorde une grande attention à ces questions stratégiques».

Son dernier mot aux travailleurs, «veiller à ce que la défense légitime et vigilante de leurs droits aille de pair avec l'observation effective et régulière de leurs devoirs et obligations, dans cette phase si cruciale du développement national».