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Mostaganem: Le chef de file d'Al Ahmadiya condamné à la prison avec sursis

par Moncef Wafi

Le chef d'Al Ahmadiyya, en Algérie, a été condamné, hier, à six mois de prison, avec sursis, en première instance par le tribunal correctionnel de Aïn Tédelès, dans la wilaya de Mostaganem, pour collecte de fonds, sans autorisation, atteinte au Prophète et constitution d'une association sans agrément. L'annonce a été faite par son avocat, Me Salah Dabouze sur les réseaux sociaux qui précise qu'il «sera remis en liberté dans peu de temps» expliquant que son mandant pourrait faire appel de cette sentence. Rappelons que le premier responsable d'Al Ahmadiyya, qualifiée, officiellement de secte en Algérie, avait été arrêté, le 28 août dernier à Aïn Sefra, wilaya de Naâma, dans la maison de sa mère et incarcéré au Centre de rééducation de Mostaganem, en attente de son procès. Me Debouz avait dénoncé le déroulement du premier procès durant lequel le juge et le procureur ont interrogé Mohamed Fali sur ses convictions religieuses. Le procureur de la République près le tribunal correctionnel de Aïn Tédelès avait requis, le 6 septembre dernier, un an de prison ferme, assorti d'une amende de 20.000 DA, contre Fali.

Le dossier Al ahmadiya et particulièrement l'arrestation de son chef de file, a valu à l'Algérie d'être épinglée par Human Rights Watch (HRW). Dans son communiqué, l'ONG internationale était revenu sur cette interpellation qu'elle qualifie de «dernier exemple en date de la répression que subit cette minorité religieuse». L'organisation basée à New York avait exigé la libération immédiate de Fali et de ses coreligionnaires et de «cesser de s'en prendre à cette minorité sans défense», avait déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord, à HRW qui parle d'«intolérance envers les croyances minoritaires, qu'elles se disent islamiques ou non». L'ONG dénonce également, l'attitude officielle du pays évoquant même un «discours de haine», tenu par de hauts fonctionnaires du gouvernement citant, nommément le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa ainsi que l'ex-directeur de cabinet de la présidence Ahmed Ouyahia. Se basant sur les chiffres fournis par la communauté ahmadie et le témoignage de certains de ses membres dont le présumé président, HRW dresse un bilan sévère de la riposte du gouvernement entre poursuites en justice, peines de prison et harcèlements administratifs.

M. Fali est revenu pour HRW sur ses poursuites judiciaires «débuté en juin 2016» dans la wilaya de Blida avant de s'étendre à d'autres régions. Il dira qu'un an plus tard, «ce sont 266 Ahmadis qui ont été traduits devant les tribunaux de tout le pays, avec plusieurs personnes poursuivies dans de multiples procès». Un chiffre que l'ONG n'a pas été en mesure de confirmer, auprès d'une source indépendante. Parmi les chefs d'inculpation présentés par la justice, Fali cite notamment le dénigrement du dogme ou des préceptes de l'Islam ; appartenance à une association non autorisée ; collecte de dons, sans autorisation, et possession et distribution de documents d'origine étrangère et nuisant à l'intérêt national. Il a, aussi, déclaré que des peines avaient été prononcées, à l'encontre de 123 accusés, allant de 3 mois à 4 ans d'emprisonnement. Il y a eu 4 acquittements. Dans le cas des 161 inculpés restants, l'instruction est toujours en cours. Se basant toujours sur le témoignage du chef de file des Ahmadis algériens, HRW indique que plusieurs adeptes de la secte ont même été poursuivis 2 fois ou davantage, parfois dans différentes régions du pays.

Enfin Mohamed Fali a déclaré à Human Rights Watch que les tribunaux avaient placé sous contrôle judiciaire au moins 70 fidèles ahmadis actuellement, mis en examen. Des représentants de la communauté ont, également, déclaré à l'organisation qu'au moins 17 fonctionnaires de confession ahmadie avaient été suspendus de leurs postes.