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Macron président !

par Brahim Chahed

Emmanuel Macron sera, très probablement élu, en mai prochain, président de la République française et ce n'est pas de sa faute, sinon de l'entêtement irraisonné de ses rivaux, aussi bien, la droite que la gauche, pour le mettre sur le trône.

Une droite incapable de destituer un Fillon miné par le soupçon d'un passé de délinquant financier, jusque-là insoupçonné et une gauche, gauche, incapable de passer outre les egos d'un Mélenchon accompli et d'un Hamon en gestation, pourtant certaine de perdre divisée et gardant des chances sérieuses de gagner rassemblée.

Emmanuel Macron aura, ainsi le temps pour accomplir son œuvre ou celle de ses commanditaires : mettre fin au clivage gauche-droite et sonner le glas de la cinquième République. Il aura, jusqu'à la fin, su surfer sur le ni gauche-ni droite, pour ratisser large et brasser les mécontents des deux camps, exploiter l'attentisme et la résignation du centre et profiter de la peur des Français de la doctrine Front National, malgré les tentatives de tempérance conduites, depuis quelque temps déjà, par Marine Le Pen. Il aura su prospérer dans le désert politique français, faute d'hommes capables d'incarner la fonction au goût des Français.

S'il faut reconnaître à Macron son habileté à cacher ses manquements, il faut rappeler que depuis l'avènement de la cinquième République, au moins, les Français ont toujours adoubé des hommes aguerris par la politique, fortifiés par les coups et accomplis par la pratique du pouvoir. Du Général De Gaule à François Hollande, en passant par Pompidou, Giscard, Mitterrand, Chirac et Sarkozy, tous ont eu leur lot d'adversité pour incarner la fonction. On ne naît pas présidentiable, on le devient à coups d'essais, de travail acharné et de temps interminable d'apprentissage pour servir ses concitoyens. Emmanuel Macron, lui, est sorti de nulle part, préservé par des protecteurs et entraîné par des professionnels pour être, enfin, au moment opportun, présenté aux Français, en sauveur.

Il le sait, tous le savent, ce n'est pas le leader qui importe, c'est ses suiveurs. Ils (les suiveurs) feront de lui un grand leader. Et c'est cette théorie qui ouvre les portes à Macron. Il ne sait pas tout, il a des fois quelques idées, pas plus que les autres d'ailleurs, mais il demande aux Français de le rallier pour les accomplir. Ce n'est pas original comme stratégie mais cette fois-ci c'est flagrant.

Si le sort des présidentielles, en France, est scellé, l'avenir est hélas, incertain. Emmanuel président, inhalant, avec ferveur, les effluves mortels de la victoire, de la superpuissance et du pouvoir, sera confronté à la dure réalité de la responsabilité. La responsabilité, envers l'histoire de la France, envers les Français, leurs besoins, leurs exigences, leurs espérances et leur futur. S'il est rallié par des femmes et des hommes politiques, de tout bord, c'est parce que ces derniers quittent, en catastrophe, leurs navires respectifs, les laissant ainsi couler sans état d'âme. S'il veut injecter de nouvelles têtes, c'est pour avoir main mise sur les nouveaux arrivants et, à l'occasion, les mettre en opposition avec les anciens qu'il croit, de toute façon, irrécupérables, perdus à jamais par les anciennes-mauvaises pratiques.

Il devra, en tout état de cause, être un virtuose de la baguette s'il veut mettre en musique toutes ces énergies, venant d'horizons différents et guidés les uns, par des passions inavouables et les autres, par des desseins inavoués. Les prochaines années seront déterminantes pour l'Europe, difficiles pour la France et si les Français n'étaient pas encore prêts pour recevoir le Front national, cette fois-ci, ils risquent de le faire, après Macron et ça sera toujours sous la conduite de M. Le Pen, mais pas Marine, plutôt Marion.