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CNAS: Les certificats médicaux de «complaisance» dans le collimateur

par Abdelkrim Zerzouri

Même si l'évènement s'annonce toujours chaud sur le front social, la rentrée 2016/2017 semble accaparée par deux dossiers qui sortent du lot des préoccupations de l'heure, en l'occurrence les certificats de maladie dits «de complaisance» et l'annulation de la retraite anticipée. Le premier dossier relatif à la lutte contre les certificats de complaisance est adopté comme slogan de la rentrée sociale par les pouvoirs publics, alors que le second, l'annulation de la retraite anticipée, est enfourché comme cheval de bataille des syndicats. Le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, Mohamed El Ghazi, a révélé, avant-hier, à partir de Tipasa, le recensement de près de 0,7% d'assurés ayant bénéficié de «certificats médicaux de complaisance» et reçu des indemnités auprès de la Caisse nationale d'assurances sociales des travailleurs salariés(CNAS), qui feront l'objet de poursuites judiciaires. « Des enquêtes ont révélé qu'un taux de près de 0,7% des certificats médicaux présentés par les assurés sont «de complaisance» et que leurs porteurs ont bénéficié d'indemnités auprès de la CNAS, sans y ouvrir droit », a révélé le ministre dans une déclaration à la presse, en marge de sa visite de travail à Tipasa. Qualifiant ce chiffre d'«important», certainement au regard du nombre imposant de certificats de maladie transmis aux caisses de la CNAS, il a de ce fait appelé à l'«intensification du contrôle particulièrement concernant les maladies nerveuses et psychiques». Une recommandation pas du tout aisée à suivre, car ce sont là des maladies très difficiles à vérifier par les services de contrôle médical de la CNAS, car les pathologies en question ne sont pas apparentes physiquement et, donc, impossibles à examiner par des non spécialistes, soit des psychiatres. Même ces derniers ne peuvent généralement remettre en cause le diagnostic de leurs confrères. En tout cas, se montrant plus dissuasif, M. El Ghazi a mis en garde toute partie impliquée dans ce trafic, soulignant que «des poursuites judiciaires seront engagées tant contre les assurés fraudeurs que les médecins complaisants, qui ont accordé des congés de maladies sans considération aucune pour la déontologie professionnelle et médicale». Pour rappel, avant cette intervention, c'est la ministre de l'Education, dont le secteur souffre particulièrement de ces maladies de «complaisance», qui avait prévenu que ce dossier sera désormais «sévèrement contrôlé», notamment l'origine des certificats et les médecins signataires. «La lutte contre les certificats de maladies accordés dans un cadre de complaisance ne date pas d'aujourd'hui et la CNAS a ouvert depuis longtemps tout un service dédié à cette tâche, le contrôle médical. Et s'il n'y avait pas de la complaisance au sein même de ce service, il serait pratiquement impossible de valider un certificat de maladie sans être réellement inapte au travail», constatent des employeurs destinataires de certificats d'arrêt de travail dûment certifiés par les services de la CNAS. Le mal est profond et il s'est propagé à tous les membres, d'où la nécessité d'une «sensibilisation» à tous les niveaux.

Sur un autre plan, le ministre du Travail fait planer le brouillard sur la retraite anticipée, indiquant que l'actuelle loi est toujours en vigueur, jusqu'à l'entrée en application de l'avant-projet fixant l'âge minimum de départ à la retraite à 60 ans pour les hommes et à 55 ans pour les femmes, en janvier 2017, après son approbation par le Conseil des ministres en juillet dernier sous la présidence du président de la République Abdelaziz Bouteflika.

Rappelant que les travailleurs concernés par la retraite anticipée ou proportionnelle ont jusqu'à la fin de l'année pour déposer leurs dossiers, le ministre semble dire aux syndicats qui promettent de monter au créneau dès la rentrée contre l'annulation de la retraire anticipée qu'il n'y a pas lieu de protester contre une décision qui reste encore un projet à l'état de finition. Tout semble à ce sujet «lointain». Le ministre souligne notamment que ses services «travaillent en collaboration avec les partenaires sociaux en vue de la mise au point d'une liste des métiers et professions pénibles, puis la promulgation d'un décret exécutif fixant cette liste, avant sa présentation devant le Parlement pour examen et approbation».

Même la CNR se joint à cette vision lointaine en assurant «n'avoir reçu aucune instruction pour le gel de la réception des dossiers de demandes de retraite proportionnelle, ou sans condition d'âge».

Pour rappel, l'avant-projet de loi en question stipule que «le bénéfice de la pension de retraite ne peut être accordé avant l'âge de 60 ans pour les hommes et 55 ans pour les femmes, avec une durée de travail effective de pas moins de 15 ans». D'autres articles prévoient la possibilité, pour certains, de travailler cinq (5) ans supplémentaires, avec l'accord de l'employeur, avec ouverture du droit à une retraite avant 60 ans, pour les emplois dits pénibles (qui seront fixés par la loi), ainsi que la possibilité pour les employés occupant des emplois nécessitant de hautes qualifications de travailler au-delà de 60 ans. L'avant-projet est exposé comme lointain mais le rouleau compresseur est en marche.