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Cris et chuchotements à l'APN

par Moncef Wafi

Avait-on besoin d'un tel déballage de grossièretés, d'invectives et de violence verbale dans une assemblée aussi auguste que celle des parlementaires ou n'était-on en fin de compte que rattrapé par la piètre image que renvoie le pays, peuple et institutions, à travers leurs sigles ? Ce qui s'est produit dans une APN décrédibilisée, vidée de sa substance par des élections successives frappées du sceau de la fraude est désolant pour l'Algérie.

Un élu du peuple, qui a apostrophé un ministre de la République, se voit exclure de six séances plénières et insulté publiquement par un autre élu du FLN qui le qualifiera de «handicapé». Déjà que le niveau de nos parlementaires n'atteignait pas les cimes qu'aujourd'hui il vole tout simplement sous les radars à la grande hilarité des Algériens. Entre affliction et ironie, le peuple assiste à ces passes d'armes dignes de petits voyous de quartier ou de règlements de compte à la sortie des écoles reléguant le vrai travail de l'APN aux oubliettes. Mais faut-il pour autant s'étonner de cette déliquescence de l'institution à la lumière de sa composition humaine ?

Un premier aperçu nous a été donné avec le vote de la loi de finances 2016 et un début de révolution au sein de l'APN en réponse aux intimidations de la majorité parlementaire sous l'œil placide du président du palais Zighoud Youcef. Par ailleurs, la sanction infligée à un «spécifique», courageux pour certains, baudruche pour d'autres, a fait réagir les députés, toutes chapelles politiques comprises, qui y ont vu une atteinte aux droits du parlementaire et de son immunité.

Cet épisode illustre parfaitement le deux poids deux mesures constaté dans la chambre basse et partant dans le pays puisque le député Tahar Missoum a été sanctionné alors que Tliba, et après son dérapage verbal, n'a pas été inquiété.

A tout jamais et au contraire de ce que pense la majorité du peuple, cette APN reflète fidèlement l'image des Algériens. Niveau du débat politique au-dessous du zéro, intérêts personnels au-dessus de tout, violence verbale et physique où la loi du plus fort, du nombre et du clientélisme est en vigueur. Qu'attendre alors de ces députés dont le souci premier est de gonfler leurs salaires et indemnités, quémander un passeport diplomatique pour eux et leurs livrets de famille et faire le maximum d'affaires protégés par une immunité forcée ? Rien. Ou si, ne plus passer leur temps à lever le petit doigt en signe d'allégeance et de remerciement à ceux qui les ont placés sinon démissionner pour le salut de ce pays. La meilleure chose qui pourrait arriver à la démocratie en Algérie, c'est qu'on dissout cette assemblée, qu'on renvoie ces députés budgétivores à leur cuisine et enfin qu'on ne fasse plus semblant de vivre dans une république démocratique.