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Pour faire face à la chute des recettes de l'Etat : Les Algériens appelés à faire preuve de patriotisme

par Zahir Mehdaoui

Abderrahmane Benkhalfa, le nouveau ministre des Finances, appelle les Al gériens à faire preuve de «patriotisme économique» pour faire face à la crise financière que traverse le pays. L'ancien président de l'ABEF (association des banques et établissements financiers) qui reproche aux médias de verser dans l'alarmisme, voire dans des analyses fantaisistes, affirme tout de go qu'en dépit des «contractions» des recettes, il n' y a pas lieu de s'alarmer.

S'exprimant hier à l'ouverture d'une journée d'étude organisée par la chambre algérienne de commerce et d'industrie, (CACI) à l'hôtel Hilton d'Alger, autour de la loi de finances complémentaire 2015 (LFC), le ministre ne veut pas reconnaître qu'il existe de «crise financière » mais affirme cependant que «nous devons revoir notre stratégie et notre comportement en matière de dépenses publiques ».

La LFC a été pensée et élaborée dans le but « d'ajuster » les dépenses, affirme M Benkhalfa, qui dénonce une « ambiance de pessimisme » qui n'a pas lieu d'être.

«Nous sommes dans des pratiques d'ajustement et de rigueur introduits dans la LFC» déclare le ministre, qui souligne que le but est «d'optimiser» les dépenses publiques.

L'ancien analyste et expert financier ne veut pas tenir compte des signaux d'alarme lancés par de nombreux économistes sérieux de la place.

Il affirme, sans donner de chiffres, que désormais grâce aux dispositions de la loi de finances complémentaire, entrée en vigueur il y a à peine un mois, l'Etat est en train de ramasser plus de fiscalité ordinaire que de fiscalité pétrolière.

Mieux, le ministre soutient que l'appel lancé par le gouvernement pour « bancariser » l'argent qui circule dans le circuit informel est en train de donner des fruits.

Des « sommes importantes » sont déposées par des « individus » assure le ministre des Finances qui ne donnera pas également de chiffres précis. Il assure dans le même cadre que les déposants de ces « sommes importantes » ont tous reçu, dans la semaine, un document qui stipule que l'argent déposé au niveau des agences bancaires n'est pas « redressable », autrement dit n'est pas soumis à un quelconque impôt.

Abderrahmane Benkhalfa dira que cet argent qui circule dans l'informel et estimé selon lui entre 13 et 14 milliards d'euros, peut constituer un véritable gisement pour l'investissement national.

«Pourquoi voulez-vous qu'on s'endette de l'extérieur alors qu'on peut utiliser l'argent des Algériens », tonne encore le ministre des Finances qui assure, par ailleurs, en ce sens, que des instructions ont été données à toutes les banques pour trouver une nouvelle formule aux déposants qui sont contre « riba » (l'intérêt). Ce dernier sera substitué par des « marges bénéficiaires » qui seront accordées à tous ceux qui, par conscience religieuse, sont contre l'intérêt bancaire. L'invité de la CACI soutient que beaucoup de pays ont fait la même chose et que l'opération a permis de bancariser des sommes considérables.

«Nous avons à ce sujet notre propre démarche», renchérit Benkhalfa qui ajoute que « nous n'allons pas ne pas dormir à cause du recul de quelques dollars du prix du baril de pétrole».

Le ministre veut rester optimiste. En fait, M Benkhalfa, a mis de côté hier sa longue carrière d'expert financier pour parler comme un quelconque membre du gouvernement qui veut rassurer le citoyen et surtout les opérateurs économiques qui attendent des gestes forts et du concret.

A ce sujet justement, le ministre a annoncé que la loi de finances 2016 a prévu d'exonérer d'impôt (IBS, TAP, TVA, droits de douanes et même l'IRG) durant 5 ans les opérateurs économiques d'environ une douzaine de filières. L'objectif visé est de développer ces filières dans la perspective de substituer la production locale aux importations, affirme encore le ministre des Finances qui prône une baisse de la « pression fiscale » pour diversifier notre économie. Le ministre des Finances, dont les intentions sont sûrement louables, est en train de faire les mêmes erreurs que tous les membres du gouvernement qui se sont succédés à la tête de ce pays. Sachant que les textes ne valent que par leur application sur le terrain, il serait intéressant de voir l'état d'avancement de ces «mesures d'ajustement» l'année prochaine sans une véritable réforme de l'administration qui constitue le plus grand obstacle pour la diversification de notre économie.