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FLN : Un redéploiement pour des changements sans remous

par Ghania Oukazi

Le rebondissement du FLN sur la scène politique permet au pouvoir de préparer sans remous les changements qui l'agréent, même au niveau des plus hautes instances de l'Etat.

C'est toute l'impression que laissent les trois jours du 10ème congrès du FLN et ce qu'il a entrepris pour renouveler ses textes, ses structures mais aussi ses « militants. » Ce retour triomphal et triomphant du FLN augure très certainement d'un recentrage des positions du pouvoir, de ses moyens de persuasion auprès «des masses» ainsi que de ses instruments pour pérenniser son règne. Le plébiscite, jeudi dernier par les congressistes, du chef de l'Etat pour être président du parti n'en laisse aucun doute. Bouteflika a décidé de (re)prendre le FLN en main pour redéfinir la scène politique nationale et maîtriser pleinement les choses et ce, en mettant en avant ce que ses soutiens indéfectibles définissent comme étant « le courant nationaliste. » L'expérience de l'Alliance présidentielle avec, nous dit un haut responsable, « le trépied FLN-RND-MSP », n'a été ni efficiente ni opérante. Parfois, elle a même compliqué les choses au pouvoir, notamment après que «le pied» islamiste voulait lui faire faux bond. A son arrivée, Bouteflika voulait s'appuyer ainsi sur une association « les nationalistes, les laïcs et les islamistes », mais le temps lui a montré qu'il n'était pas ou plus permis de s'allier avec le courant islamiste, en ces temps de bouleversements internationaux, sans en canaliser les véritables poids et forces. C'est ce qui le pousse aujourd'hui à revenir à l'hégémonisme du parti unique et empêcher la pratique démocratique de s'implanter comme culture au sein de la société. C'est « la régression féconde » dans toute son ampleur. Le FLN est décrété ainsi, première force politique partisane du pays, secondé par le RND quand les conjonctures l'imposent. Il n'est pas dit, en effet, que le retour d'Ouyahia au poste de secrétaire général du RND fera de ce parti une force politique à part entière. Il redeviendra ce parti qui soutiendra l'appareil FLN dans les contrebalancements d'équilibres que le pouvoir définira selon ses intérêts à travers d'autres profils. Le reste, tout le reste, aura toute « la liberté» de se débatte dans un espace au préalable bien délimité mais où toutes les expressions sont permises. Cela importe peu de recourir à plus de fermetures pour un pouvoir qui à chaque fois qu'il doit se trouver une sortie, non seulement il en balise les bords et rebords, mais la laisse paraître honorable. La consécration de Saadani par Bouteflika en démontre si besoin est, le niveau de veulerie qu'il est prêt à accepter pour se régénérer et consolider son règne. Le pouvoir qu'incarne le clan Bouteflika donne à travers le redéploiement du FLN, une lecture de ses ambitions et sa prétention à vouloir s'éterniser aux commandes du pays même s'il faut pour cela, qu'il recourt à la théorie de l'absurde sous le slogan «pour le Renouveau et le Rajeunissement. » Précautions étant prises de neutraliser tous les contrepouvoirs, il semble qu'il s'apprête dans un proche avenir à définir «l'alternative» de laquelle tout le monde parle sans en connaître les facettes.

Simple procédure de routine, les membres du Comité Central du FLN ont été élus dans la nuit du vendredi à samedi. Une trentaine de recours, nous dit-on, ont été introduits le samedi et à la résolution desquels toute la journée a été consacrée. A l'heure où nous mettons sous presse, la liste définitive n'est pas encore finalisée. Mais on parle de plus de 500 membres qui constitueront le CC, en comptant avec un quota national qui représente le tiers du nombre global et au titre duquel le SG a toute latitude de nommer en tant que membre « qui il veut ». C'est dans ce cadre que la présence de Sellal et de plusieurs autres ministres, même la toute jeune des TIC, est avancée et sera certainement consacrée. Le retour au gouvernement FLN est ainsi décrété par la force de la loi? « du plus fort ». D'autant qu'il est attendu que l'ensemble des propositions qu'il avait formulées à propos de la révision de la Constitution seront toutes retenues dans la nouvelle loi suprême du pays, ceci, pour qu'il en soit le seul garant.

En devenant président du FLN « à part entière », Bouteflika a la prérogative essentielle de permettre ou non la convocation d'un congrès ou d'un CC extraordinaires, au cas où l'un ou l'autre sont demandés par le SG ou par les deux tiers. Reste la recomposition du bureau politique dont le nombre a aussi augmenté pour avoir plus de sièges pour les nouveaux hauts fonctionnaires de l'Etat devenus « militants » du FLN par la volonté d'un pouvoir absolu. Le plébiscite pour retenir Saadani dans son poste de SG du parti est acquis. L'on dit que Bouteflika pourrait partir tranquille. Certains disent qu'il le ferait dès que la mosquée d'Alger sera opérationnelle. D'autres pensent une fois que la Constitution sera révisée et adoptée. Ce qui a été fait et élaboré pour redonner au FLN son aura des années de plomb montre que rien n'est difficile pour les décideurs. Qu'ils veulent rester ou partir, ils trouveront toujours les moyens d'inscrire leurs intérêts dans un magma politico-économico-social où l'argent soudoie les plus loyaux et où l'opportunisme lui fait le rabatteur.