Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Nouvelle manifestation d'islamophobie en France : Un maire fiche les élèves musulmans

par Moncef Wafi

Robert Ménard, le fantasque maire de Béziers, une commune de plus de 70.000 habitants, dans le département de l'Hérault, refait, encore, parler de lui. Et cette fois-ci, pour peu que la justice française le rattrape, il risque de passer un sale quart d'heure. La raison : une déclaration faite, ce lundi, sur le plateau de l'émission politique «Mots croisés», sur France 2, consacré aux querelles au sein du FN. Ménard donne, alors, des pourcentages d'enfants de confession musulmane, dans les écoles de sa ville. Interrogé sur la provenance de telles statistiques, il répondra que « ce sont les chiffres de ma mairie. Pardon de vous dire que le maire a les noms, classe par classe, des enfants. Je sais que je n'ai pas le droit, mais on le fait. ».

Ce que semble ignorer ou pas l'édile de Béziers, c'est que le fichage racial est interdit en France. La loi «informatique et liberté» du 6 janvier 1978 stipule, à propos de cette question, qu'il est interdit de recueillir et d'enregistrer des informations faisant apparaître, directement ou indirectement, les origines «raciales» ou «ethniques», ainsi que les appartenances religieuses des personnes. En 2007, le Conseil constitutionnel avait prohibé les statistiques à base ethnique.

En février dernier, lors de la 5ème conférence de presse de son mandat, le président français, François Hollande, avait, clairement, rejeté l'idée de «statistiques ethniques», jugeant que ce débat «n'apporterait rien». Robert Menard, hué par les invités présents sur le plateau, persiste dans sa logique et affirme «que les prénoms disent les confessions.

Dire l'inverse, c'est nier une évidence». Le maire de Béziers, conscient de sa énième bourde, est revenu, hier, sur ces déclarations malheureuses, en mettant, en avant, sa bonne foi, en comptant aider les enfants «d'origine musulmane, maghrébine» faisant ainsi un lien direct entre Islam et immigration. Concernant les chiffres qu'il a donnés la veille, il réfutera l'existence de listes pouvant répertorier les différentes confessions. «Je fais le tour des écoles et constate ce qu'il en est», s'est-il contenté de dire, sur RMC, sans apporter plus de précision.

Un peu plus tôt, la mairie de Béziers a pris ses distances avec son édile, répondant sur un compte Facebook qu'elle «ne constitue pas et n'a jamais constitué de fichiers des enfants scolarisés dans les écoles publiques de la ville. Le voudrait-elle qu'elle n'en a d'ailleurs pas les moyens. Il ne peut donc exister aucun « fichage » des enfants, musulmans ou non.». Un démenti cinglant à Robert Menard qui risque, maintenant, d'être poursuivi en justice. Le procureur de Béziers a annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire et le maire est passible, pour profilage communautaire, d'une peine de 5 ans d'emprisonnement et 300.000 euros d'amende, en application de l'article 226-19 du code pénal. Les déclarations de Ménard ont fait réagir la classe politique française de gauche et le Premier ministre, Manuel Valls, a exprimé son indignation en tweetant « Honte au maire ! ». Karine Berger, la député socialiste des Hautes-Alpes évoque «une injure infinie à la République.». Nombre de ministres du gouvernement Valls ont, également, réagi sur leurs comptes tweeter. Coutumier des décisions controversées à l'adresse de la Communauté maghrébine et réputé proche des milieux de l'extrême droite et plus particulièrement du Bloc identitaire, celui-là même qui a voulu interdire les couleurs algériennes, brandies par les supporters, en France, lors des scènes de liesse entourant les matchs de l'équipe nationale de football.