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Menée par l'Arabie Saoudite : Une coalition de 10 pays bombarde le Yémen

par Yazid Alilat



Sollicitée par l'Egypte pour intégrer une coalition militaire arabe de 10 pays menée par l'Arabie Saoudite pour empêcher les Chiite Houtis de prendre le pouvoir au Yémen, l'Algérie a catégoriquement refusé une telle éventualité. Jeudi à Charm Echeikh, à la veille du sommet arabe et au lendemain de la première opération armée contre les houtis, le chef de la diplomatie algérienne Ramtane Lamamra, a clarifié les choses: «l'Algérie n'autorisera aucune participation de ses troupes armées à des opérations militaires en dehors de ses frontières», a-t-il affirmé, ajoutant qu'elle (l'Algérie) «pourrait toutefois apporter un soutien en logistique au delà de ses frontières sans pour autant impliquer ses troupes armées». «Nous prenons acte de la proposition soumise par le Président Abdelfettah El Sissi concernant de telles initiatives au service de l'action arabe commune et de la sécurité dans les pays arabes, de même que nous estimons nécessaire de tirer les bons enseignements à partir des précédentes expériences», a-t-il expliqué à la presse en réponse à une question sur la position de l'Algérie quant à la création d'une force arabe commune. M. Lamamra, qui intervenait en marge de la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères, en prélude au sommet arabe qui s'est ouvert ce samedi dans la station balnéaire égyptienne sur la mer rouge, a évoqué «l'expérience africaine avérée qui pourrait servir de référence dans tout examen des fondements de la sécurité collective». «J'estime, de prime abord, que tous les maillons de ce système doivent s'enchaîner de manière solide et cohérente. Pour ce faire, il convient de focaliser sur la sécurité et la stabilité dans chacun des pays arabes», a-t-il poursuivi.» Des mesures préventives doivent également être prises dans chaque pays à part afin de pouvoir construire en son sein une société tolérante et complémentaire, où règne justice sociale et bonne gouvernance», a ajouté M. Lamamra. Et c'est à partir de ce moment, suggère le ministre des Affaires étrangères, que ?'nous devrions penser à exploiter au mieux les moyens prévus par les chartes de la Ligue arabe et de l'ONU, tels le déploiement des forces de maintien de l'ordre. Les pays dont les Constitutions permettent de telles actions sont en mesure d'agir dans ce cadre», a-t-il poursuivi.

Pour autant, «la récente détérioration de la situation sécuritaire au Yémen et l'élargissement du champ des affrontements armées nous interpellent et nous préoccupent grandement». Il ajoute: «nous sommes convaincus qu'il n'y a pas d'alternative au dialogue et le règlement pacifique est un impératif» entre les différentes parties yéménites, qui sont «en mesure d'instaurer une paix interne», et a souhaité «l'arrêt des affrontements et l'entame d'un dialogue inclusif sous le parrainage de l'ONU», en réponse à l'appel des pays du Golfe au dialogue que l'Arabie saoudite est prête à abriter.

La crise politique au Yémen, qui a donné lieu à un coup d'état des Houtis, des chiites soutenus par l'Iran, avait inquiété autant l'Arabie Saoudite, voisine du Yémen et en conflit avec sa propre minorité chiite, que les Etats-Unis, soucieux de protéger leurs intérêts dans la région et de faire barrage à la progression de Téhéran dans la région. C'est en septembre 2014 que les Houtis, puissamment armés, ont déferlé sur Sanâa, contesté le pouvoir du président Hadi et dénoncé un projet de Constitution sur un État fédéral qui priverait son fief dans le nord d'un accès à la mer. L'Arabie Saoudite, chef de file de la coalition armée, composée de 10 pays, a lancé, dans la nuit de mercredi à jeudi, les premiers raids aériens contre des cibles militaires à Sanâa et diverses régions du pays.          

Les avions de la coalition menée par l'Arabie saoudite ont lancé, jeudi soir, de nouvelles frappes au Yémen contre les positions des houtis. Au moins 39 civils ont été tués dans ces frappes depuis le début des bombardements, ont indiqué vendredi des responsables du ministère de la Santé à Sanâa. Douze des victimes ont été tuées dans un raid qui a visé, dans la nuit de jeudi à vendredi, une base militaire au nord de Sanâa, et qui a touché un quartier résidentiel proche, ont ajouté les responsables de ce ministère, contrôlé par la rébellion houtie. Les frappes de jeudi soir ont visé une base militaire près de Taëz, la troisième ville du pays, sur la route entre la capitale Sanaa et Aden, dans le sud, selon des sources officielles et des témoins.

Un autre raid a visé une base des forces spéciales alliées aux Houtis à Qatabah, à 120 km au nord d'Aden, d'après des habitants du secteur. L'intervention militaire s'est poursuivie, hier vendredi pour la troisième journée consécutive, avec de nouvelles frappes signalées au lever du jour à Sanâa, la capitale, et dans le nord du pays, la région dont sont originaires les Houtis. A Sanâa, que les houtis contrôlent depuis le mois de septembre, des avions de la coalition ont tiré à proximité du complexe présidentiel et d'un site militaire de stockage de missiles, rapportent des habitants. Par ailleurs, un porte-parole de la coalition a affirmé à Ryad que les premiers raids de cette opération baptisée «Tempête décisive» sont un succès et se prolongeront jusqu'à ce que les objectifs soient atteints. Il a précisé qu'il n'y avait pas de projet d'offensive terrestre dans l'immédiat. Le premier responsable des Houtis, Abdel Malek al-Houthi, qui a condamné une invasion derrière laquelle se cachent les États-Unis et Israël, a averti que les Yéménites ne vont pas rester sans réagir. Si l'Iran a condamné cette intervention militaire contre le Yémen, et mis en garde contre une propagation du conflit, les États-Unis ont apporté leur soutien à l'intervention, la Maison-Blanche s'étant déclarée inquiète des activités iraniennes au Yémen, parlant d'informations sur le transfert iranien d'armes dans ce pays. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a de son côté affirmé que la négociation était la seule solution pour résoudre la crise, alors que l'Union européenne s'est inquiétée des risques de graves conséquences régionales.    Le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, a exprimé quant à lui son soutien total à l'intervention militaire conduite par l'Arabie saoudite pour défendre le président du Yémen face à l'avancée des rebelles chiites Houtis. «C'est une opération contre des cibles appartenant aux Houtis qui ont mené un coup d'État», a jugé M. Arabi. Pour cette opération, qui n'a pas reçue l'aval de l'ONU, ni celui de la Ligue arabe par une vote, l'Arabie saoudite a mobilisé 150 000 militaires et 100 avions de combat, les Émirats arabes unis ont engagé 30 avions de combat, le Koweït 15 appareils et le Qatar 10, alors que Bahreïn a annoncé participer avec 12 avions. L'Égypte y participe avec son aviation et sa marine, ainsi que la Jordanie, le Soudan, et le Maroc, selon Ryad. Cette intervention militaire ?'vise à défendre le gouvernement légitime du Yémen et à empêcher le mouvement radical houthi de prendre le contrôle du pays», a expliqué l'ambassadeur saoudien aux États-Unis, Adel al-Jubeir. Les rebelles chiites Houtis, soutenus par l'Iran, ont déposé le président Hadi, réfugié à Riyad. Suffisant pour que l'Arabie Saoudite rassemble les pays du Golfe, moins Oman, pour mener une guerre au Yémen, qui a pris les contours d'un conflit ouvert entre sunnites et chiites.