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Le Sud : entre le flou et la mue, les remous de la rue !

par Slemnia Bendaoud

Le gaz de schiste dégage désormais une insupportable odeur de brûlé. A présent, un gros et sombre nuage obstrue au loin la vision à tout son monde. On s'en couvre même dans notre raisonnement le plus logique et le plus sûr.

Le sud est depuis, ce point de fixation vers lequel se tournent le pouvoir et l'opinion, après qu'on eut pour un temps suffisamment long détourné notre regard en sa direction, par simple mégarde ou véritable ignorance des besoins propres à cette immense et peu développée région. Entre les populations d'In Salah et les autorités locales, ce bras de fer engagé au sujet de l'exploration et bien évidemment l'exploitation éventuelle du gaz de schiste n'est pas prêt de connaitre son épilogue. A leur deuxième mois, les manifestations semblent finalement redoubler d'ardeur pour véritablement s'installer dans la durée. Déjà données pour complètement essoufflées, en raison du chemin jusque-là parcouru, ces dernières semblent, au contraire, tenir davantage encore plus dans la durée, espérant, à terme, freiner ce projet qui hante leurs nuits pour les expédier dans les profondeurs de ce cauchemar qui n'en finit plus !

Sur un tout autre plan, le gouvernement redouble d'efforts et de promesses, multipliant les visites sur site des membres techniques de son staff ministériel ainsi que des actions très concrètes à entreprendre sur le terrain sans trop tarder, afin de booster le développement multiforme de la région. Exposé à tous les dangers, ceux tout à fait naturels comme ceux vraiment structurels ou considérés très occasionnels, le sud parait avoir désormais définitivement vaincu son isolement et son éloignement des principaux centres de décision, grâce notamment, entre autres, au développement accéléré et multiforme des nouvelles techniques de communication (TIC, réseaux sociaux, mœurs nouvelles, tendance au regroupement, le partage de l'espace et autres paramètres ?).

Hier encore,longtemps emmitouflé dans ses vieilles guenilles et piètres guêtres, le Grand Sudparait, en ce moment, focaliser -peut-être même parfois monopoliser- tous les feux de la rampe, suscitant, au passage, moult interrogations au sujet de ce véritable flou assorti de nombreux remous qui annoncent probablement sa toute prochaine ou inévitable mue.

Sur ce registre-là, tout le monde en est d'ailleurs bien conscient ; préparant seul, en catimini ou en fanfare -selon l'angle de vue approprié- la réplique à adapter à cette nouvelle situation. Ce fut, en effet, en rapport avec la nature de ce brûlant dossier qu'apparurent intempestivement ces hypothétiques Wilayas déléguéesou en bonne et due forme à lancer sur le champ, ou à programmer pour d'autres contrées selon un planning étalé dans le temps.

Convoité sur plusieurs volets et toute une multitude de fronts, non pas comme une belle fille à conquérir au péril de sa vie toutjuste pour sa troublante beauté, mais surtout pour les énormes potentialités que recèlent son sol et son sous-sol, le sud voit désormais affluer sur son territoire, sans discontinuité ou demandes express préalables, toutes ces sollicitations et grands égards dont jouit le plus chanceux des candidats au trône à marquer de son empreinte son accord au profit d'une gouvernance qui manque fondamentalement d'arguments à faire valoir,en vue de s'assurer dans ce très difficile intervalle une très grande tranquillité et une véritable pérennité.

Pour avoir été souvent à tort oublié, il est devenu cette région aux immenses frontières à très haut risques, cette étincelle qui attise le feu de la discorde, cette poudrière à surveiller de près, ce monde nouveau à rapidement prendre en charge, cette dimension territoriale, économique et sociale à au plus vite reconsidérer son impact sur le devenir immédiat du pays.

Autrefois image féérique de sites idylliques de ses splendides oasis qui hypnotisaient,dénuées du moindre commentaire, le regard fouineur et très curieux du touriste ahuri lui parvenant du vieux continent, grâce à un tourisme florissant que connut alors la région en plein essor et ses magnifiques " évasions ", il se suffit, à présent, ou se complait dans ses hideuses bâtisses qui cachent très mal d'ailleurs ses endémiques misères et ses artères qui crachent le feu de la colère de sa jeune génération, animée par ce désir ardent et très fou de couper court avec ces pratiques d'antan, les ayant légués à cette peu reluisante place de la cinquième roue d'une charrette qui court à la vitesse de son désespoir et perte de ses véritables repères.

Parent pauvre d'un développement économique tâtonnant ou plutôt déséquilibré, le territoire sud du pays achève donc très maladroitement la longue étape d'une réminiscence qui l'aura complètement lessivé, pour lui avoir ôté sans sommation ni préavis les véritables atouts de sa légendaire tradition, laquelle contrastait fondamentalement avec celles des autres régions du pays.

S'agit-il d'une véritable rupture épistémologique que nos spécialistes des sciences humaines auront commis la très lourde erreur de ne pas porter en temps opportun à la connaissance des gouvernants du pays ?

Ou alors juste d'un rééquilibrage territoriale à opérer au sein de ce chapitre plutôt revendicatif et très inventif d'une jeunesse voulant tenter cette tête piquée en haute mer, mais qui ne peut rejoindre facilement la côte Méditerranéenne sans avoir à parcourir dans la chaleur suffocante du pays du soleil toute cette grande distance qui la sépare des eaux marines où elle pourrait enfin noyer les indices apparents liés à son grand désespoir ? Quelle est donc la part du premier phénomène mais aussi l'impact réel du second du genre dans la formation de ce nouveau puzzle, auquel se doivent nos spécialistes de la sociologie politique de lui apporter les réponses appropriées ? Dans un tout premier et habile jet, le Docteur NacerDjabi le situe déjà, lui, au niveau de ce concept générationnel dont la mue des habitants des régions du sud du pays, ayant entre-temps fait ou acquis une remarquable avancée (un véritable bon) au plan de l'accaparement des sciences, pose, à présent, avec acuité un très sérieux problème d'équilibre régional en matière de l'harmonie à apporter par la gouvernance quant besoins sociaux de ses administrés.

Il eut à étayer son analyse à travers ces " nouvelles revendications " produit d'une " toute autre réflexion " d'une jeunesse dont les traditions s'écartent quelque peu du niveau propre aux valeurs sociétales de ses devancières (leurs aïeux), devenant donc de plus en plus exigeante au plan de la satisfaction à assurer à leurs besoins citoyens.

Cependant, il nous parait opportun de souligner encore davantage l'incidence certaine d'autres facteurs-clefs ayant eux aussi largement influé sur le comportement jadis ou hier encore " pacifiste " des citoyens des régions de notre Grand Sud, liés à ce métissage et mutations opérés dans la durée au sein des nouvelles agglomérations de la région indiquée, comme la dislocation de la famille et son émiettement en de petites particules de cellules familiales microscopiques, très favorables au changement des mœurs en rapport avec l'avancée des nouvelles techniques de la science, manifestées grâce à l'impact de l'image sur le comportement humain, lui suscitant impérativement ces besoins nouveaux à rapidement les satisfaire.

A cela, il y a lieu d'ajouter les toutes nécessaires répercussions nées de l'effet de la mondialisation et de l'harmonie en termes de valeurs qu'elle implique, modifiant ou harmonisant, au passage, les manières de se comporter et ou de consommation de tous les citoyens de la planète.

Il en résultera de ce qui précède forcément ces comparaisons à tout le temps tenter, entre des citoyens d'un même bord ou territoire, sinon avec ceux de la contrée la mieux développée et la plus éloignée, grâce notamment à l'apport très conséquent de l'impact du son et de l'image, du fait survenu et de son écho qui nous est immédiatement parvenu, devenu lui aussi si permanent, très percutant, vraiment impressionnant, mâtant à tous les coups le mensonge ou l'hypocrisie politiques, se basant sur des arguments très convaincants à l'appui de toute affirmation ou constat fait au sujet d'une quelconque situation.

Ainsi donc, les sceptiques au changement social qualifient ce changement social d'un véritable flou qui vient leur perturber la vue au prix de tous ces remous et agitations superflues de populations dans les rues dont ils ne voient l'issue qu'en termes de la déstabilisation du pays.

Quant à ceux qui croient vraiment ou très fermement en cette obligatoire mue de la société Algérienne au travers de l'apparition de ces tous nouveaux comportements et attitudes de ces régions toutes indiquées, le phénomène évoqué n'est plus donc un secret pour personne, dans la mesure où les indices de sa réelle prise en charge demeurent très probants, impliquant forcément l'usage de nouvelles méthodes en vue de lui apporter les solutions appropriées. Le problème du gaz de schiste a surtout cet avantage de faire entendre ces voix d'une contrée lointaine que certains bureaux feutrés de notre administration les croyaient à jamais tues, pour avoir à toujours peu accordé du crédit à leurs doléances et surtout de l'importance à leurs réelles préoccupations.

Qui mieux que le citoyen d'In Salah peut partager la douleur terrible de la catastrophe des habitants de Reggane ? Comment donc le convaincre qu'il ne s'agit nullement d'un bis répétita ? Comment surtout le convaincre de l'utilité de l'exploitation du gaz de schiste ? Et pourquoi ne l'avoir pas associé au tout début de cette rocambolesque opération ?

Le Grand Sud, depuis un certain temps, grogne. Il s'insurge comme un seul homme contre le pillage de ses ressources sans la moindre vergogne. Cette arrogance sans bornes de la gouvernance du pays pousse les habitants de notre Sahara à se comporter bien autrement qu'autrefois !

L'épilogue des épisodes de Berriane, Ghardaïa, Ouargla, Touggourt et autres consœurs des contrées du pays fait vraiment très peur à cette pourtant très lucide population d'In Salah. De quoi échauder un chat qui éprouve cette peur bleue de l'eau chaude !

Autant de questions très pertinentes dont leurs réponses les plus honnêtes ne peuvent malheureusement faire rapidement dégager ce ciel si sombre et très bas qui caractérise toutes les régions du pays. Tant la confusion est presque totale et que la mue qui s'annonce dans cette région du pays se faitplutôt imminente.

Une question se pose néanmoins avec une très grande acuité : cet écho porté en chœur par ces voix exténuées et enrouées des fins fonds du sud du pays a-t-il les faveurs d'être bien décodé par ceux-là mêmes à qui il est tout particulièrement destiné ? A l'allure dont se déroulent les évènements d'In Salah, les canaux semblent complètement obstrués. Une nouvelle vision s'impose de droit, la véritable solution doit se trouver dans cette direction. Une approche pareille implique-t-elle une métamorphose dans la douleur ?