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Les résultats officiels de la présidentielle tunisienne : Essebsi en tête avec 39,46% devant Marzouki

par Kaouther Larbi De L'afp

Le second tour de la présidentielle, en Tunisie, opposera l'octogénaire Béji Caïd Essebsi, chef du parti anti-islamiste ?Nidaa Tounès', au président sortant Moncef Marzouki, arrivés, tous deux, loin devant les autres candidats, au premier tour de dimanche. Comme prévu, l'ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi est arrivé en tête. Avec 39,46% des suffrages, il devance, de 6 points, le chef de l'Etat (33,43%), selon les résultats officiels annoncés, hier, mardi, à l'issue du décompte des voix de ce scrutin historique.

La campagne du second tour s'annonce, vive entre ces deux finalistes, au profil et au parcours très différents, qui ne cachent pas leur inimitié, l'un pour l'autre. Si l'écart de voix, entre eux, est important, il est bien moindre que ce que l'équipe de M. Caïd Essebsi, 87 ans, et des sondages réalisés, à la sortie des bureaux de vote, prédisaient. Loin derrière les deux hommes, Hamma Hammami, figure de proue de la gauche, arrive 3ème avec 7,82% des voix, suivi de l'entrepreneur de tendance islamiste, habitant à Londres Hechmi Hamdi (5,75%) et du richissime homme d'affaires et président de club de football Slim Riahi (5,55%). Ceux-ci n'ont, dans l'immédiat, donné aucune consigne de vote. Les 22 autres candidats se partagent le reste des suffrages de ce scrutin dont le taux de participation s'est élevé à 62,9% des inscrits. Le second tour aura lieu en décembre mais sa date précise dépendra des éventuels recours en justice contre les résultats préliminaires, a indiqué l'instance électorale (ISIE). La mission d'observation électorale de l'Union européenne a salué, hier, un scrutin « crédible et transparent » et « l'attachement à la démocratie » des Tunisiens, une exception dans la région, l'essentiel des pays du ?Printemps arabe' ayant basculé dans la répression ou le chaos. M. Caïd Essebsi fait campagne pour rétablir le « prestige » de l'Etat, après quatre années mouvementées, marquées par l'essor d'une mouvance djihadiste, armée, accusée d'attaques ayant tué des dizaines de soldats et des assassinats de deux opposants à Ennahda. Il présente M. Marzouki comme le candidat des « islamistes » et même des « salafistes djihadistes ».

« Pour un homme de droit, qui défend les droits de l'Homme, qui écrit des livres, un homme cultivé, un médecin, il y a quelque chose qui ne colle pas », a lâché M. Caïd Essebsi, mardi, sur la chaîne d'information ?France 24'. M. Marzouki considère, de son côté, que son adversaire - un ancien ministre de Bourguiba et président du Parlement, sous Ben Ali, au début des années 1990 - représente l'ancien régime renversé par la Révolution de janvier 2011.

Et le chef de l'Etat sortant, un militant des droits de l'Homme séculier, exilé en France, sous Ben Ali, estime avoir empêché le chaos en Tunisie par son alliance avec Ennahda, évitant, ainsi, une fracture du pays entre « laïcs » et islamistes. Le chef de ?Nidaa Tounès' rejette ces critiques et rappelle que, juste après la Révolution, il avait, en temps que Premier ministre, organisé les premières élections libres de l'histoire de la Tunisie, remportées par Ennahda. Depuis son indépendance, en 1956, la Tunisie n'avait jamais connu de scrutin présidentiel disputé, les précédents présidents, Habib Bourguiba et Zine El Abidine Ben Ali, renversé par la Révolution de 2011, ayant usé du plébiscite ou de falsifications pour se faire réélire avec des scores dépassant les 90% des voix. M. Marzouki avait été élu, fin 2011, par l'Assemblée nationale constituante, à la faveur d'un accord de coalition avec les islamistes d'Ennahda, alors majoritaires.

Ce parti, deuxième force politique du pays, à l'issue des législatives du 26 octobre, n'avait soutenu aucun candidat, au premier tour de la présidentielle. Afin d'éviter un retour à la dictature, la nouvelle Constitution donne des prérogatives assez limitées au président, élu pour cinq ans, mais l'élection au suffrage universel lui confère un poids politique important. L'essentiel du pouvoir exécutif dépend, cependant, du futur Premier ministre, issu de la majorité parlementaire. M. Caïd Essebsi espère qu'une victoire lui permettra de former, plus facilement, une majorité de gouvernement, la victoire aux législatives de son parti, en octobre, ayant été insuffisante pour gouverner seul. Il se veut, néanmoins, confiant. « Nous savons, exactement, comment nous allons obtenir le soutien de la majorité de l'Assemblée législative », a-t-il dit, sur ?France 24'.