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Duel au sommet en Tunisie

par Kharroubi Habib

Les résultats du scrutin de l'élection présidentielle tunisienne ne seront proclamés officiellement par l'instance électorale compétente l'ISIE que dans la journée de demain mercredi. Mais il y a déjà certitude qu'il va y avoir un second tour car le candidat arrivé en tête dimanche n'aura pas les 50% de voix requis pour être proclamé élu.

L'autre certitude étant que ce second tour opposera le président intérimaire sortant Moncef Marzouki au chef du parti Nidaa Tounes, Beji Caïd Essebsi. Ce que confirment les entourages des deux candidats mais en étant en désaccord sur les scores qu'ils attribuent à leurs favoris respectifs. Le camp de Caïd Essebsi affirmant en effet que celui-ci a largement devancé Marzouki dont les partisans proclament qu'il pourrait bien au final du dépouillement des voix en cours coiffer son rival car ayant été avant ce stade au coude à coude avec lui. Cette controverse sera tranchée demain par l'ISIE et il restera que les Tunisiens vont devoir arbitrer entre les deux postulants à la magistrature suprême de leur pays.

Dès les premiers sondages ayant fait entrevoir la probabilité d'un second tour pour les départager, les deux candidats ont chacun de son côté appelé les électeurs à arbitrer en sa faveur leur duel du second tour. Un homme en tout cas est particulièrement courtisé par les deux candidats, il s'agit de Hamma Hammani qui en tant que représentant du Front populaire regroupant des partis de gauche et d'extrême gauche a créé la surprise du premier tour en se classant troisième avec un score qui sera probablement au-dessus de la barre des 10%.

Tablant sur le fait que l'adversaire prioritaire pour le Front populaire dont Hammami a été le candidat ne peut être que Moncef Marzouki à qui les partis et les militants regroupés en son sein vouent une rancœur tenace pour avoir « trahi » le camp de la liberté et de la démocratie en s'alliant par opportunisme politique à Ennahda et autres formations islamistes, les observateurs pensent acquis le soutien de Hammami et du Front populaire au candidat Caïd Essebsi dont la candidature et la campagne électorale portent l'empreinte du refus d'un retour sous quelque forme que ce soit des islamistes au pouvoir en Tunisie.

Ce que peut-être Hammami appellera ses électeurs à faire, non sans toutefois soulever de sérieuses objections au sein du Front populaire et de ses sympathisants. De la part de ceux nombreux qui ne portent pas dans leur cœur Beji Caïd Essebsi et beaucoup de ceux s'étant rangés sous sa bannière. Le choix pour le second tour constitue un dilemme pour nombre de Tunisiens dont les militants du Front populaire.

Moncef Marzouki rassemble en effet autour de sa candidature des électeurs d'Ennahda islamiste, mais Beji Caïd Essebsi draine derrière lui les nostalgiques du régime déchu. Les deux sont donc susceptibles de détourner les voix que pourront leur attribuer entre autres les électeurs du Front populaire au profit de ces deux milieux, islamiste et nostalgiques de l'ancien régime, qu'ils abhorrent.

Pour ce qui le concerne, Ennahda fait profil bas dans la joute électorale même si ses sympathisants sont comptés pour soutenir la candidature de Moncef Marzouki. Officiellement, le parti ne leur a pas formellement donné la consigne dans ce sens. Le parti islamiste pense ce faisant n'avoir pas insulté l'avenir aux yeux des Tunisiens en se montant d'une modération et d'un respect pour leur libre arbitre qui lui permettront de renouer avec eux à l'heure des désillusions qui pour Ghannouchi et la direction du parti ne tarderont pas à se manifester compte tenu des défis qui attendent les gagnants des élections tunisiennes, lesquels seraient loin d'avoir les solutions qu'exigent pareils défis.