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La très difficile reprise de l'activité de distribution des films

par Kamel Hamzi

Des salles de cinéma fermées et une activité de distribution des films qui a pratiquement disparu dans les années 90. Et les rares qui essaient font face à une bureaucratie dissuasive. Et pourtant, on sait qu'il ne sert à rien de faire de bons films s'ils ne sont pas distribués !

Voir à Alger le dernier James Bond est plutôt rare. «Skyfall» de Sam Mendes a pourtant été projeté durant tout le mois de décembre 2012 à la salle Ibn Zeydoun au complexe Riad El Feth. Au même moment, la fiction était projetée dans les salles européennes et au Moyen Orient. Depuis plus de vingt ans, l'Algérie est en décalage presque total par rapport au mouvement cinématographique mondial. Tunis et Casablanca, mieux dotées en salles de cinéma, sont plus «actuelles», plus «branchées» en matière de cinéma. La liquidation des entreprises publiques, au début des années 1980, chargées de la distribution des films, la fermeture des salles de cinéma ensuite, ont donné le coup de grâce à l'activité de distribution des films en Algérie. L'activité a complètement disparu durant les années 1990 en raison notamment de la violence qui sévissait dans le pays. La timide reprise dans les années 2000 devait faire face au phénomène du piratage des films et de la nouvelle culture des DVD et DVIX, celle du «petit écran».

LA QUADRATURE DU CERCLE DU DVD !

Cirta Films que dirige El Hachemi Zertal est l'une des rares entreprises à tenter l'aventure de la distribution malgré toutes les difficultés administratives et financières. El Hachemi Zertal s'est, à plusieurs reprises, plaint des complications pour l'obtention du visa d'exploitation du film. Sans ce visa, accordé par le ministère de la culture, un film ne peut pas être dédouané et projeté ensuite en salle. Or, pour accomplir la procédure du dédouanement, il faut présenter un DVD du film (une censure qui ne dit pas son nom). «Dans la chronologie du merchandising du cinéma, le DVD n'est disponible que six mois après la sortie commerciale du film. Nous, en tant que distributeurs, en l'occurrence Cirta films qui lutte pour la légalité respectant ce processus, je me vois obligé de présenter un DVD piraté pour avoir le droit de payer les taxes, les frais de douane, mettre à la disposition du public le film dans une salle. Je trouve cela immoral d'acheter un DVD piraté et de le présenter au ministère», a protesté El Hachemi Zertal dans des déclarations à la presse nationale. La ministre de la culture a, pour sa part, regretté que les nouveaux films algériens ne soit pas vus par le public car mal distribués. «La distribution est la question épineuse du cinéma algérien. Il ne sert à rien de faire de bons films qui gagnent des prix dans les festivals mais qui ne circulent pas dans le pays. Quand les gens vont dans les salles et payent leurs tickets, une taxe est prélevée de ce ticket pour alimenter le fonds d'aide à la production cinématographique mais également la fiscalité des communes», a-t-elle soutenu.

LA QUESTION DE LA GESTION DE SALLES !

Les distributeurs estiment que la gestion des salles de cinéma par des privés professionnels peut faciliter l'exploitation commerciale des films dans le futur. Certains ont tablé sur l'ouverture d'un multiplex au Centre commercial Bab Ezzouar, à l'est d'Alger, qui sera le premier du genre en Algérie. D'une capacité globale de 1400 places, ce multiplex, qui s'étale sur 2000 m² au deuxième étage du centre commercial, sera composé de huit salles. Déjà construites et équipées, les salles n'ont toujours pas été ouvertes au public. L'ouverture de ce multiplex était prévue à fin 2011. Depuis, aucune date précise n'a été donnée pour l'ouverture des huit salles. On précise toutefois que des «contacts» sont toujours en cours pour lancer ce multiplex. Il a été dit à un moment donné que le distributeur français Jean-Pierre Lemoine était intéressé par la gestion du multiplex de Bab Ezzouar. Déjà présent au Maroc, Jean-Pierre Lemoine, qui est fondateur de l'UGC Ciné Cité à Paris, a tendance à projeter les films qu'il distribue uniquement dans les salles qu'il gère. D'où les craintes exprimées par les professionnels qui ont appelé à bien réglementer l'activité de distribution des films pour éviter les situations de domination du marché. Cependant, la réhabilitation et la modernisation des salles, au niveau national, sont nécessaires pour la relance de la distribution des films en Algérie. De plus, la tendance actuelle est d'abandonner le 35 mm au profit du DCP (Digital Cinema Package). Le DCP est une norme numérique de projection de films basée sur les données et les fichiers informatiques. Fin 2013, le DCP sera obligatoire dans toutes les salles européennes.