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Législatives du 10 mai : Les bons et les mauvais points de la mission de l'UE

par Z. Mehdaoui

La mission d'observation des élections du 10 mai dépêchée par l'Union européenne a rendu public, hier, son rapport final à l'occasion d'une conférence de presse organisée à l'hôtel Sofitel d'Alger.  

Le chef de la mission des observateurs de l'UE, José Ignacio Salafranca, a réitéré encore une fois que les élections «se sont globalement bien déroulées», en soulevant certains «points négatifs» qui n'ont pas influé, estime-t-il encore sur l'opération de vote.

Salafranca rappelle en outre que la mission a pu observer l'ensemble des opérations préélectorales, le jour du vote (ouverture, vote, clôture, dépouillement) et les opérations post-scrutin (compilation et consolidation des résultats) dans l'ensemble des wilayas du pays. Lors de la journée électorale, 845 bureaux de vote ont ainsi été observés de l'ouverture à la fermeture, soit 1,74% de l'ensemble des bureaux de vote, a-t-il ajouté en remerciant les autorités algériennes pour toute l'assistance apportée dans l'accomplissement de sa mission d'observation.

«Sous la base d'une évaluation approfondie, détaillée et impartiale, la mission constate tout un nombre d'aspects positifs du processus électoral», note le parlementaire européen qui énumère notamment que parmi ces «aspects positifs», il y a l'augmentation du nombre de partis politiques et de listes indépendantes par rapport aux scrutins précédents, ce qui a permis «d'élargir l'offre politique». «L'instauration de mécanismes de contrôle additionnels de l'opération de vote tels que la CNSEL et la CNISEL, l'incorporation des urnes transparentes et de l'encre indélébile comme instrument supplémentaire lors des vérifications de vote et l'entrée de 143 députés femmes dans la nouvelle assemblée» sont autant d'autres éléments positifs énumérés, hier, par Salafranca qui fait état d'un «avancement notable».

«La campagne électorale s'est déroulée dans le calme malgré quelques incidents mineurs et tous les moyens étaient réunis dans les bureaux de vote le jour du scrutin», s'est félicité M. Salafranca. Le conférencier fait toutefois une série de recommandations et soulève une «série d'éléments susceptibles d'être améliorés lors de consultations à venir». Il s'agit notamment, note Salafranca, du système d'enregistrement des électeurs, qui présente, selon l'analyse des observateurs de l'UE, certaines faiblesses structurelles, en raison principalement de l'absence de «consolidation nationale du fichier électoral». «Dans ces conditions, la mission constate que le fichier électoral ne peut pas faire l'objet d'un contrôle avéré de la part des partis politiques et candidats indépendants», soutient la commission des observateurs de l'UE dans un communiqué. Ce dernier, qui a été lu auparavant par José Ignacio Salafranca, souligne par ailleurs clairement que la transparence des opérations au sein des deux niveaux de commissions électorales pourrait être améliorée. L'amélioration pourrait se matérialiser par notamment l'affichage public des résultats au niveau communal (absent dans 36% des commissions observées) et par la remise systématique d'une copie certifiée des résultats aux représentants des partis politiques et des candidats présents, suggère la mission de l'UE dans son rapport, qui indique en outre que «l'absence de publication des résultats détaillés a affaibli la transparence du processus électoral, compliquant la lisibilité des sièges attribués qui ont alors l'objet de contestation par certains partis politiques et les représentants de la société civile».

Le rapport de la mission de l'UE fait état du peu d'éléments concernant le recours devant le conseil constitutionnel. «La période de recours s'est achevée avant même que les résultats aient été publiés en détails, affectant alors la transparence du processus», est-il écrit dans le rapport de la mission de l'UE qui propose plus d'une trentaine de recommandations afin «d'accroître la transparence et l'intégrité des scrutins à venir». Il s'agit notamment «d'établir un fichier électoral consolidé au niveau national et procéder à la publication des listes définitives des électeurs, «la publication systématique des procès-verbaux des résultats de chaque bureau de vote sur le site Internet», «permettre l'accès des partis politiques et/ou des candidats, à toutes les étapes du processus et aux diverses structures de l'administration électorale», «étendre le mandat de la CNSEL jusqu'au dépôt des PV auprès du Conseil constitutionnel», «assurer l'indépendance de la CNISEL en renforçant sa structure et en lui octroyant un budget propre», «simplifier les démarches concernant la création de partis politiques», «abaisser le seuil de 20% des suffrages exprimés afin que les partis politiques/candidats puissent obtenir un remboursement partiel des dépenses engagées» ou encore la mise en œuvre d'une stratégie d'éducation civique durant la période électorale qui s'étalera au-delà des rendez-vous électoraux.

En matière de médias, le rapport de la mission de l'UE recommande d'amender certaines dispositions de la nouvelle loi sur l'information ainsi que la mise en œuvre rapidement d'une nouvelle loi sur l'information afin, est-il noté dans le même rapport, «d'assurer le développement d'un environnement médiatique pluraliste et libre». Sur le même chapitre, le rapport soutient que le monopole sur la publicité du gouvernement algérien représente un outil économique pour limiter ou sanctionner la presse privée qui se montre trop critique envers le pouvoir.

Interrogé sur le degré de transparence des élections du 10 mai passé, Salafranca répond calmement que la mission d'observation qu'il a présidée n'est ni un arbitre ni un tribunal.

Le succès du FLN aux dernières législatives est dû au système de la proportionnelle, note Salafranca pour qui le nombre de sièges remportés par ce parti est «stable» par rapport au précédent scrutin. «Si le FLN est majoritaire, c'est la faute au système électoral», ajoute le chef de la mission des observateurs qui rappelle à chaque fois que la venue de la mission de l'UE entre dans le cadre de l'amitié qui lie l'Algérie à l'Europe.

Pour ceux qui l'ont accusé d'être complaisant à l'égard des autorités algériennes, le parlementaire européen s'en défend et invite les journalistes à bien examiner le rapport rendu public hier et mis en ligne.