Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Jusqu'où peut aller le rapprochement algéro-marocain?

par Kharroubi Habib



Lors de la rencontre qu'il a eue avec la presse, la veille de l'arrivée à Alger en visite officielle du nouveau chef de la diplomatie marocaine, Abdelkader Messahel, notre ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, a indiqué que la question de la réouverture de la frontière algéro-marocaine n'a pas été évoquée ni par la partie algérienne ni par la partie marocaine lors des différentes discussions entre les responsables des deux pays. Le sera-t-elle au cours de cette visite surprise à Alger de Saad Eddine El-Othmani ? Messahel s'est gardé de le confirmer ou de l'infirmer, en se limitant à faire valoir que la visite en Algérie du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération du Royaume du Maroc, à l'invitation de son homologue algérien, « s'effectue dans le cadre du renforcement des relations entre les deux pays et s'inscrit également dans un contexte marqué par des changements dans le monde et à la veille d'une volonté partagée par tous les pays de la région de dynamiser l'Union du Maghreb arabe (UMA).

Le pourquoi de la visite à Alger du chef de la diplomatie marocaine, expliqué ainsi officiellement par Abdelkader Messahel, a été destiné à couper court aux spéculations ayant été forgées tant au Maroc qu'en Algérie à l'annonce de la visite à Alger du tout nouveau chef de la diplomatie marocaine sur la question de la réouverture de la frontière entre les deux pays.

Que le problème de la réouverture de la frontière soit ou non évoqué au cours des entretiens entre les deux ministres des Affaires étrangères ou de l'audience accordée par Bouteflika à l'hôte marocain, il ne faut pas s'attendre à une annonce surprise sur le sujet. Les deux parties ne voient pas la question de la même façon et tant qu'elles resteront sur leurs positions respectives sur les conditions qu'elles avancent pour la réouverture de la frontière, celle-ci n'interviendra pas de sitôt.

Pour aussi souhaitée qu'elle soit par les opinions publiques marocaine et algérienne, la réouverture de la frontière algéro-marocaine est subordonnée aux autres considérations politiques constituant le contentieux algéro-marocain. Ce que la partie marocaine ne veut pas admettre et persiste à demander aux Algériens cette réouverture sans lui poser le préalable d'une révision de ses positions sur les autres sujets qui fâchent dans les relations algéro-marocaines. Les Algériens persisteront d'autant à faire le lien entre la question de la réouverture de la frontière et les autres points du contentieux algéro-marocain que ces mêmes autorités marocaines se refusent à reconnaître le tort qui a été le leur en 1994 à l'égard de l'Algérie et à l'origine de la fermeture par celle-ci de sa frontière.

Que les Algériens souhaitent tout autant que leurs voisins de l'Ouest l'ouverture de la frontière, cela est indiscutable. Sauf que le faire à la manière voulue par le Maroc, c'est-à-dire n'impliquant aucune révision de ses positions sur aucun autre dossier du contentieux algéro-marocain, leur est inenvisageable. Car cela équivaudrait à leurs yeux à accepter que l'Algérie apparaisse comme versatile dans les siennes.

Est-ce que le nouveau ministre des Affaires étrangères du Maroc est venu à Alger pour engager un dialogue global sur le contentieux algéro-marocain, ainsi que le demande l'Algérie, ou simplement pour donner l'illusion par sa visite que son pays a de bonnes intentions à l'égard de son voisin qui ne sont pas payées d'un retour ? On le saura quand l'hôte marocain répondra aux questions qui lui seront posées à l'issue de sa visite.