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Après le psychodrame, l'épilogue: ArcelorMittal accepte les garanties exigées par la BEA

par Salem Ferdi

Les choses se sont débloquées dans le dossier d'ArcelorMittal Annaba après les péripéties rocambolesques de ces dernières heures.

Le géant mondial de l'acier a accepté les garanties financières exigées par la Banque extérieure d'Algérie (BEA) pour l'obtention d'un crédit de 14 milliards de dinars. Epilogue dans un étrange psychodrame.

Un accord a été conclu, hier, entre la BEA et ArcelorMittal en vue du rachat d'un crédit de 9 milliards de dinars contracté par le sidérurgiste auprès de Société Générale Algérie, sous forme d'un crédit relais sur six ans, en contrepartie d'une garantie internationale de 120 millions de dollars, a indiqué à l'APS une source à la BEA.

 ?'C'est une garantie financière internationale qui sera fournie par la banque de la maison mère à l'étranger, payable à la première demande'', précise la même source. La BEA obtiendrait ainsi que la garantie internationale détenue par Société Générale sur ArcelorMittal sera transférée à la BEA».

«Les modalités de mobilisation de cette garantie financière seront à la charge d'ArcelorMittal : l'essentiel, c'est qu'ils ont accepté de couvrir le rachat de cette dette par une garantie financière internationale, qui sera libérée par la BEA au fur et à mesure de l'augmentation du capital», ajoute cette source. L'accord prévoit de transformer graduellement cette garantie en tranches d'augmentation de capital». Ces garanties viennent satisfaire les conditions de couverture de risque exigées par la BEA, en plus des conditions émises par la BEA et déjà acceptées par ArcelorMittal, à savoir la recapitalisation du complexe d'El-Hadjar à hauteur de 120 millions de dollars.

Sider, le partenaire algérien dans le complexe d'El-Hadjar, avait déjà mobilisé 30 millions de dollars pour augmenter le capital de l'entreprise à 150 millions de dollars. La seconde partie du crédit (5 mds de dinars) sera accordée par la BEA en contrepartie d'un nantissement des équipements. En outre, la BEA obtient de reprendre son statut, perdu, de banquier privilégié du complexe d'El-Hadjar.

«INTERFERENCE» SYNDICALE

Ce sont ces garanties financières que la direction d'ArcelorMittal Annaba s'était avérée incapable de présenter ou n'a pas voulu le faire, qui ont créé un semblant de «crise». Le syndicat UGTA de l'entreprise avait pris fait et cause pour la direction d'ArcelorMittal Annaba contre la BEA au nom de l'impératif de sauvegarde des 7.000 emplois.

Le gouvernement algérien n'a pas apprécié que les emplois du complexe servent d'éléments pour peser sur la négociation entre ArcelorMittal et la banque publique. Ahmed Ouyahia a de ce fait tancé les syndicalistes en leur demandant de ne pas être les jouets d'ArcelorMittal, tout en apportant la garantie que le complexe ne sera en aucun cas fermé. Cette intervention a permis de «neutraliser» le syndicat qui s'est dit «réconforté» par les propos d'Ouyahia.

«Nous appuyons toute décision émanant des pouvoirs publics et visant le maintien des activités du complexe sidérurgique d'El-Hadjar et la sauvegarde de milliers d'emplois», a déclaré son secrétaire général, M. Smaïn Kouadria.

De son côté, le PDG de la BEA, Mohamed Loukal, est monté au créneau pour défendre son institution et révéler que les garanties présentées par ArcelorMittal étaient «sans valeur». Un langage de banquier qui note au passage qu'ArcelorMittal n'a rien d'un client fidèle de la BEA puisqu'il l'a abandonnée dans sa gestion courante pour des banques étrangères installées en Algérie.

«Dans ce dossier, il y a lieu de ne pas se tromper de cible et de vouloir incriminer la BEA à tout prix», a déclaré M. Loukal en direction du syndicat qui a eu des propos peu amènes à l'égard de son institution.

L'affaire s'est corsée avec le dépôt par la direction d'ArcelorMittal Annaba, au niveau du tribunal d'El-Hadjar, d'une déclaration de cessation de paiement. La démarche est prévue par le Code du commerce et elle constituait un message qu'ArcelorMittal était prêt à se désengager de l'Algérie.

«RETENEZ-MOI-OU-BIEN-JE-ME-TAILLE !»

Les choses ont depuis été prises en main par la maison mère qui a, de facto, désavoué sa direction à Annaba en niant la déclaration de «cessation de paiement». Elle affirmait compter toujours sur le «support de ses deux actionnaires, ArcelorMittal et Sider», et croire «qu'une solution prochaine sera trouvée aux négociations en cours». Peu après cette mise au point de la maison mère, la direction d'ArcelorMittal Annaba publiait un communiqué indiquant que le «le groupe ArcelorMittal confirme son engagement en Algérie et souhaite mettre en œuvre au plus tôt son plan de développement et de croissance pour son unité de Annaba».

L'étrange psychodrame, qui a fonctionné sur le mode «retenez-moi-ou-bien-je-me-taille», était déjà en train de prendre fin. Manifestement, ArcelorMittal n'avait aucune difficulté à donner les garanties nécessaires et elle n'avait aucun intérêt, non plus, à délaisser un marché algérien quasi-captif avec l'assurance d'écouler toute la production. En confirmant à la Banque extérieure d'Algérie l'acceptation des garanties demandées par cette banque, on entre dans l'épilogue.