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L'Aïd, ses excès, ses pénuries

par E-H.D., T.L. & J.B.

Malgré l'appel, quoique timoré de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) à l'adresse de ses adhérents pour assurer un «service minimum» lors des fêtes de l'Aïd El-Adha, de nombreuses villes du pays ont connu des pénuries de pain et d'autres denrées.

La ville de Tiaret est restée «fantomatique» pendant quatre longs et ennuyeux jours. En effet, si la ville était un peu égayée le premier jour de l'Aïd, grâce surtout à l'insouciance des bambins, la ville de Tiaret ressemblait à une giga cité où il est devenu difficile de «vivoter» pendant quatre jours, tellement tout manquait. Et même si le curieux «phénomène» est connu de tous et par tout un chacun, cette année, le «bouchon a été poussé trop loin», commente, les nerfs en boule, un père de famille qui a parcouru samedi plusieurs kilomètres à pied sans trouver un bout de pain à ramener à ses deux enfants en bas âge. La majorité des commerces en alimentation générale est également restée fermée pendant les jours de l'Aïd, au plus grand dam des citoyens qui n'avaient d'autres solutions que de ronger leur frein en attendant la «reprise du cours normal ou presque de la vie, dès mardi», ironise un jeune chauffeur de taxi, fier d'avoir sacrifié sa journée de repos au service de ses concitoyens. L'autre manquement aux règles à respecter impérativement le jour des fêtes, puisqu'il s'agit de la santé des citoyens qui ne peut attendre, est la fermeture des pharmacies, en dépit l'obligation légale d'assurer une permanence de jour comme de nuit.

Dimanche, premier jour de l'Aïd, aucune pharmacie n'était ouverte à l'intérieur du périmètre urbain de la ville. Certains ont même fait le déplacement jusqu'à la ville voisine de Sougueur pour se procurer des médicaments indispensables, surtout pour les malades chroniques. «Les parties concernées (direction du commerce, de la santé, etc.) devraient réfléchir à imposer les sanctions que méritent ceux qui foulent au pied les règles élémentaires de civisme en prenant en otage des citoyens qui ne savent plus à quel saint se vouer», commentait, un rien philosophe, un retraité qui nous dit que «les fêtes sont devenues si insipides et ennuyeuses à mourir que l'on voudrait travailler toute l'année et sans relâche?».

Le premier jour de l'Aïd, Oran semblait vidée de tous ses habitants. C'est le propre de toutes les grandes métropoles et cela ne va pas sans conséquences sur l'activité courante pendant cette trêve. Les boulangeries ouvertes étaient rares, hier. Avant-hier, la plupart étaient fermées, et ce, malgré les annonces faites par l'UGCAA et les mises en garde de la direction du commerce. Et c'est le pain syrien, chez les petites boulangeries, qui a sauvé la mise à des centaines de ménages, pour ceux, bien entendu, qui ont pu s'en procurer.

Le transport également s'est fait rare et c'était l'aubaine toute trouvée pour les clandestins qui ne pouvaient rater pareille occasion en doublant les tarifs des courses. Les bouchers ambulants, quant à eux, n'ont pas chômé et ont monnayé leur savoir-faire, pour certains, jusqu'à 1.000 DA, à la tête du client.

Côté pénurie, toujours, une certaine tension sur les carburants a été observée samedi, veille de l'Aïd.

Par ailleurs, chez ceux qui ont accompli eux-mêmes le rite du sacrifice, de nombreux accidents ont été dénombrés. Le premier jour, une soixantaine de personnes victimes de blessures ont été admises au service des UMC de l'hôpital d'Oran, suite à la manipulation des couteaux utilisés dans l'opération du sacrifice. D'autres blessés ont été évacués vers d'autres structures sanitaires et hôpitaux comme l'hôpital d'El Mohgoun et l'hôpital d'Aïn El Türck. De son côté, le service des brulés a enregistré l?admission d'une dizaine de personnes victimes de brûlures. Toutefois, le nombre des brûlés a connu cette année un nette régression par rapport à l'année passée où il a été enregistré une cinquantaine de victimes. De son côté, la direction de la protection civile a mobilisé tous ses moyens pour faire face à toute éventualité, notamment les accidents de la circulation et les incendies. Pour la première journée de l'Aïd, à l'exception d'un incendie qui s'est déclaré dans une boulangerie, aucun incident majeur n'a été signalé, a-t-on appris de la direction de la protection civile. Notons que l'incendie s'est déclaré dans une boulangerie de Sidi El Houari. Deux personnes ont été asphyxiées et ont été évacuées vers les UMC. D'autre part, vers les coups de 16 heures, quelques commerçants ont «gratifié» leurs voisins par l'ouverture de leurs magasins. Et bien entendu, comme de coutume, les boucheries ont ouvert leurs portes le second jour de l'Aïd et ont été prises d'assaut, dès les premières heures de la matinée, par de nombreux citoyens désirant découper leurs moutons chez un professionnel, contre 600 dinars, voire 800 et 1.000 dinars dans certains quartiers.