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Professeurs d'université et chercheurs reçus hier: La commission Bensalah clôt les consultations

par Ghania Oukazi

Dans son dernier jour de consultation, la commission Bensalah a donné hier la parole à des professeurs d'université et des chercheurs qui ont été unanimes à défendre l'idée d'une redéfinition des rôles et des institutions de l'Etat national algérien.

Parmi le groupe des professeurs, Mohamed Bahloul, économiste universitaire d'Oran qui n'a pas hésité à déclarer que «j'avais beaucoup d'appréhension et même de doute comme de larges couches des élites de la société avant de venir ici, j'ai pris un risque sur l'efficacité de la démarche» Mais, dit-il, «je crois que c'est un bon risque». L'économiste reprend son optimisme pour affirmer que «nous avons discuté de manière très libre - nous avions une liberté intellectuelle et politique totale -, sur comment surmonter la fausse équation, crédibiliser le pouvoir sans se décrédibiliser». Il en déduit alors que «c'est une fausse équation». Il attire l'attention cependant que «nous ne sommes pas sur la même posture que les hommes politiques ou les partis politiques. Nous sommes des chercheurs et des experts, la recherche de la vérité est notre fonction, je pense que nous l'avons assumée totalement dans cette rencontre et nos interventions ont été complémentaires». Bahloul indiquera au titre de l'analyse que «l'Etat national a été producteur d'externalités négatives voire de nuisance pour tous y compris pour ceux qui nous gouvernent». Ce qui le pousse à souligner «la nécessité de la refondation de l'Etat sur la base du paradigme que le devoir du citoyen d'obéir aux gouvernants suppose le droit de les choisir loin des falsifications et des impostures».

Il juge que ces consultations ne répondent pas aux demandes des larges couches de la société algérienne et des élites. Alors il propose «l'ouverture d'un grand débat populaire pour injecter de l'espoir». Il fait valoir la nécessité d'organiser un congrès de l'Etat national algérien. L'objectif étant selon lui «l'élaboration d'un contrat social et d'une philosophie constitutionnelle, ce qui est aussi appelé design institutionnel de l'Etat », par la décentralisation, la fédération ou par toute autre organisation, la forme importe peu aux yeux de cet universitaire. L'essentiel pour lui est qu'il y ait «émergence d'un groupe du congrès pour rédiger un projet de Constitution». Autre proposition, «le congrès doit définir un mécanisme de transition politique avec un agenda précis pour bâtir les institutions de la légitimité populaire». Bahloul conclut en affirmant comme pour dire qu'il ne faut pas se voiler la face, « la fin du régime impose incontestablement l'élection d'une assemblée constituante».

Abderrezak Dourari, professeur à l'université d'Alger, pense pour sa part que «la méthode de la consultation par la commission est très lente pour être une réponse au danger de la situation en Algérie qui menace d'une explosion de la société et des institutions de l'Etat». Il craint que le rapport de l'instance de Bensalah sera rajouté à tous les autres qui l'ont précédé. Il pense que le problème n'est pas dans la révision de la Constitution ou d'autres lois mais déplore le fait qu'elles ne sont pas respectées. «La Constitution doit être respectée par tous les pouvoirs notamment celui exécutif», plaide-t-il en soutenant son idée par une autre, celle de la mise en place d'une commission de contrôle de l'application de la loi suprême du pays.

Le professeur Abdelhamid Aberkane de l'université de Constantine partage cette même idée de faire du respect des lois une obligation. L'étape prochaine doit être, selon lui, «celle du retour de la confiance dans les décisions des hautes autorités du pays». Aberkane appelle à «une décentralisation effective et responsable» parce que la gestion de tout le pays l'exige. Il estime que c'est la seule manière de «consolider la paix à travers l'Etat de droit». La démocratie participative figure aussi parmi ses propositions tout autant que celle d'un parlement représentant véritablement la société civile. L'universitaire Nouria Remaoune pose l'impératif de réaliser trois ruptures, «la centralisation du rôle du travail dans la société, la logique rentière, la décentralisation».

L'après-midi a été consacrée à des personnalités de la recherche et de la communication comme Mustapha Cherif, Selim Klala, Belkacem Hcene Djaballah, Brahim Brahimi ou Amar Belhimer. La démocratie participative, l'ouverture du champ médiatique notamment audiovisuel, le respect des lois et notamment de la Constitution «pour que personne ne doit être au-dessus des lois», ont été des propositions partagées pratiquement par tous.