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Mohammed VI persiste dans la diversion

par Kharroubi Habib

Face à la révolte pacifique mais ouverte et généralisée de la population en territoire sahraoui occupé et au grand mouvement de solidarité internationale qu'elle suscite, le Makhzen s'est lancé dans une opération de diversion, consistant à tenter de focaliser l'attention de l'opinion internationale sur une prétendue «répression» que subissent les réfugiés sahraouis établis dans les camps de Tindouf, dans le sud-ouest algérien. Un exercice auquel le roi du Maroc lui-même s'est adonné à l'occasion du35e anniversaire de la soi-disant «marche verte» qui s'est soldée par l'occupation marocaine du Sahara Occidental.

 Dans son discours pour la circonstance, le monarque a en effet totalement occulté la révolte contre cette occupation qui défraie l'actualité et dont la répression vaut au Makhzen et au trône une réprobation internationale assourdissante, pour s'apitoyer sur le sort des réfugiés sahraouis des camps de Tindouf, dont il a déclaré qu'ils «subissent les affres de la répression, de l'intimidation, de l'humiliation et des tortures qui leur sont infligées».

 Le Roi et le Makhzen ne sont pas à leur première manœuvre de tentative de faire diversion sur le fond du conflit sahraoui, qui est que le Maroc occupe illégalement le territoire sahraoui et subjugue par la force son peuple.

 Les premiers à déjouer cette fois l'opération de diversion des autorités marocaines sont ces milliers de Sahraouis qui, en territoire occupé, expriment pacifiquement et spectaculairement leur refus de l'occupation marocaine et leur adhésion à la revendication indépendantiste symbolisée par le Front Polisario, autour duquel se sont regroupés les réfugiés des camps de Tindouf. Leur révolte ruine la thèse du Trône qui donne à croire que la population sahraouie lui est fidèle et attachée à «l'identité marocaine» dont il la crédite.

 Tous ces Sahraouis qui ont abandonné les villes où s'exerce le pouvoir du Makhzen pour se regrouper en un camp en plein territoire occupé, démontrent par là qu'ils sont solidaires de leurs compatriotes réfugiés près de Tindouf et acquis comme eux au principe de leur droit à l'autodétermination.

 La tentative de diversion à laquelle se sont essayé le Roi et le Makhzen ne trompe personne. Au contraire, elle confirme pour l'opinion internationale la duplicité qui guide le comportement des autorités marocaines sur la question sahraouie. Il n'y a en effet rien de moins sincère que la «sollicitude» que Mohammed VI manifeste à l'égard des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf, qualifiés pour la circonstance de «compatriotes», quand, dans le même temps, sa gendarmerie et ses services de sécurité répriment de façon barbare la population restée en territoire occupé.

 Duplicité qui consiste également a accepter de discuter avec le Front Polisario, alors qu'il est accusé par la propagande royale «de réprimer, intimider, humilier et torturer» ces réfugiés sahraouis.

 Ce qui ressort en tout cas du discours royal pour le 35e anniversaire de la «marche verte» est que Mohammed VI est loin de souhaiter que les négociations informelles du Maroc avec le Polisario, dont la troisième réunion s'ouvre aujourd'hui à Manhasset, en banlieue de New York, soient empreintes de sérénité et de l'esprit de faire avancer l'idée d'une solution acceptable pour les deux parties.

 Sa diatribe violente contre le Polisario à la veille de cette réunion procède de la volonté de provoquer ce dernier, avec l'espoir qu'il en fasse raison pour refuser au dernier moment d'y participer. Le Polisario en a entendu d'autres de la part du monarque et de son Makhzen sans renoncer aux engagements qu'il donne à la communauté internationale sur son attachement à une solution pacifique et négociée au confit sahraoui. Il sera donc présent à Manhasset, à la confusion du Trône et des autorités du Maroc.