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A quand la CGTA ?

par Kharroubi Habib

L'idée de création d'une confédération générale des travailleurs algériens, lancée il y a quelques semaines par des syndicats autonomes de la fonction publique, refait surface à l'initiative du CNAPEST. Dans une déclaration rendue publique dimanche, cette organisation a d'abord tenu à exprimer sa solidarité aux deux syndicats autonomes qui paralysent actuellement le secteur de la santé et aux salariés de la SNVI Rouiba en grève. Pour ensuite estimer que «la situation précaire des travailleurs algériens est la conséquence directe de l'absence d'une organisation syndicale démocratique qui les représente et défend leurs droits».

 Partant de ce constat, le syndicat autonome de l'enseignement a lancé un appel aux travailleurs en vue de «la création d'un regroupement syndical démocratique qui englobera les travailleurs de la fonction publique et ceux du secteur public sous forme d'une confédération générale, dans laquelle chaque secteur aura une liberté d'action selon les intérêts de ses travailleurs».

 L'intérêt de l'initiative du CNAPEST est qu'elle part de la vision de rassemblement de l'ensemble des travailleurs algériens et non plus de celui, sectoriel, que les syndicats autonomes de la fonction publique se sont essayés à mettre en place sous la forme d'une intersyndicale. Cette dernière démarche, qui a eu jusqu'ici les faveurs des syndicats autonomes de la fonction publique, apparaissait comme une avancée qui leur a permis d'engager solidairement des actions revendicatives dans leurs secteurs respectifs. Il n'en demeure pas moins qu'elle a montré ses limites parce que n'étant pas parvenue à mettre fin à la fragmentation du champ syndical, qui est tout bénéfice pour les pouvoirs publics, n'ayant pas ainsi à faire à un mouvement revendicatif social porté et s'exprimant par le biais d'une organisation syndicale unitaire et représentative du monde du travail en général.

 Le CNAPEST a choisi le bon moment pour relancer l'idée de création d'une confédération générale des travailleurs. Le front social est en effet à un niveau d'ébullition exceptionnel et pas seulement dans la fonction publique, comme le prouve ce qui se passe présentement dans la zone industrielle de Rouiba.

 Il y a également que la dernière grève menée par les travailleurs du secteur de l'Education nationale a démontré que pour faire reculer les pouvoirs publics, l'unité d'action des syndicats est indispensable. Ce à quoi s'ajoute la désaffection dont est frappée l'UGTA et rend les salariés du secteur économique accessibles à l'idée de supplanter celle-ci par une organisation syndicale libre d'allégeance à l'égard du pouvoir politique.

 L'idée d'une confédération générale des travailleurs algériens est la seule dont la concrétisation est susceptible d'apporter à ceux-ci le moyen de défendre efficacement leurs intérêts et d'imposer la logique de négociation, totalement faussée actuellement par la présence exclusive de la centrale de Sidi-Saïd. Il n'est pas d'autre alternative. Car tant que l'échiquier syndical se distinguera par l'émiettement et l'esprit de chapelle ou de caste, le monde du travail ne sera pas en situation de se faire entendre de manière forte. C'est le bon sens même pour les syndicats d'aller au rassemblement de tous les salariés. L'union fait la force, dit-on. Dans l'action syndicale, plus encore qu'ailleurs.

 Et c'est parce que cette union n'est pas faite que les pouvoirs publics appliquent sans crainte la politique antisociale qui a paupérisé dramatiquement la nation.