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Le monde d'en haut et l'homme d'ici-bas

par El-Houari Dilmi

Dans sa marche sans arrêt vers le progrès, l'homme, après avoir goûté à l'atmosphère sélénite, se prépare à poser un premier pas sur la planète Mars.

 Le grand voyage, prévu vers 2011 nous émerveille-t-on, durera cinq cent dix jours en aller-retour. Le futur giga-voyage de l'homme vers le monde d'en haut, programmé vers 2062 nous assomme-t-on, sera extra-cosmique et devrait voir le genre humain enfin réaliser son rêve éveillé de se rendre sur une autre planète que celle de ses cousins «darwiniens», les singes. Entre-temps, l'autre homme, celui du monde d'ici-bas, sera toujours à s'interroger s'il faut continuer à se nourrir pour vivre ou simplement vivre pour boustifailler en circuit fermé, la bouche béante, en attendant le dernier voyage de la vie éphémère vers le monde immortel du trépas. Sous nos cieux ombragés, à regarder de près l'avancée triomphante de l'almanach algéro-algérien, il y a au moins une bonne raison de penser à recréer le monde sans nous.

 Partie des aurores novembristes, l'Algérie s'est payé un repos mérité par un étincelant soleil de juillet jusqu'à l'arrivée des premières secousses, chargeant son ciel, faussement serein, de gros cumulus, menaçant de nous mouiller jusqu'à l'os.

 Un pied par terre et le dos au mur, le pays de l'Emir Abdelkader s'imposa un arrêt d'urgence forcé, jusqu'à ce que des «mains invisibles» le conduisirent dans le gigantesque atelier de tous les ratisfolages. Arriva le jour où le pays se fatigua et aménagea son emploi du temps à sa guise, faisant de son semi-week-end, de ses fêtes nationales, des jours fériés puis des «jours sans» la sève (sur) vitale d'un calendrier sans temps ni âge.

 Et parce que justement il est connu et reconnu que l'âge opère des ravages là où le temps demeure indécis, l'Algérie s'est retrouvée à se reposer six mois par an, prendre congé en triple détente trois mois par an, faire la fête en petit et grand format quatre semaines tous les mois et travailler une demi-journée tous les deux lustres, pour boucler la boucle avec un demi-congé national dès l'annonce du mois de tous les soucis. Au point que sur la tombe de chaque Algérien fatigué de vivre, une main à sept doigts fera graver en lettres dorées: «ici repose Larbi Ben untel qui s'est reposé toute sa vie...!»