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En bref : le missile sur la Pologne, la Coupe du monde, Kherson

par Djamel Labidi

Le missile ukrainien qui a frappé la Pologne a fait deux morts. Deux travailleurs agricoles. Deux hommes simples. Personne n'en parle. Ni le président polonais, à part quelques mots de circonstance, ni les médias occidentaux, ni Zelensky.

Ils ne sont préoccupés que de savoir si le missile était russe ou ukrainien. Et puis lorsque la vérité s'impose, et que Zelensky devient indéfendable, on s'intéresse surtout à expliquer cet «incident», cette «erreur technique». Le missile ukrainien aurait simplement raté sa cible pour aller finir sa course en Pologne. «Et puis, il y avait ce jour-là, tellement de missiles russes dans le ciel ukrainien».

Finalement, le coupable est vite trouvé, c'est la Russie. S'il n'y avait pas cette guerre contre l'Ukraine, il n'y aurait jamais eu cet «incident». C'est dit et redit d'une seule voix par le Secrétaire à la défense américain, par le Secrétaire général de l'OTAN, par les animateurs de plateaux des médias occidentaux. Bien sûr! et si la Russie n'avait pas existé, et si l'Ukraine n'avait pas existé, et si le monde n'avait pas existé ! etc., etc. Summum de la bêtise, des lapalissades en guise de raisonnement dans la pensée dominante en Occident.

Mais tout cela, en fait, ne sert qu'à éviter le véritable sujet, celui de Zelensky qui, à la faveur de cet évènement, n'a pas hésité à mentir pour appeler l'OTAN à entrer en Ukraine, pour appeler à une troisième guerre mondiale, pour risquer la fin du monde.

Mais cette fin du monde est arrivée, réellement, pour ces deux travailleurs agricoles polonais, dont personne ne parle. Ils ont été là, dans une guerre où ils n'ont rien à voir. Ils ont rencontré leur destin dans des circonstances incroyables, d'un missile venu du ciel qui a fondu sur eux, à l'endroit précis où ils travaillaient. Alors ? Qui est responsable ?

La Coupe du monde

La Coupe du monde débute. Le 19 novembre, le président de la FIFA, Gianni Infantino, dénonçait la campagne occidentale contre le Qatar. Mais le Qatar est en réalité un vieil ami de l'Occident. Il est un élément important du système financier et économique occidental. Il a investi des centaines de milliards de dollars aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne, en France, etc. C'est un allié fidèle. Il est protégé par le dispositif militaire américain. Il a participé à l'intervention armée occidentale contre la Libye. Cette campagne de critiques contre le Qatar apparait finalement comme une comédie. Quand on connait les vraies campagnes déclenchées par l'Occident quand il le veut, celle-ci apparait bien pâle, tout juste pour la forme, pour garder une certaine cohérence par rapport «aux valeurs occidentales» et l'opinion publique. Néanmoins le président de la FIFA se permet, à cette occasion, des audaces contre les pays européens qui dominent le football mondial et son organisation. Il dénonce leurs «critiques hypocrites» et leur lance « Pour tout ce que nous, les Européens, avons fait pendant 3000 ans, nous devrions nous excuser pendant les 3000 prochaines années avant de commencer à donner des leçons de morale aux gens ». Mais le Président Gianni Infantino n'est-il pas lui aussi «hypocrite». Il ne dit pas un mot sur l'interdiction faite à la Russie de participer à cette Coupe du monde, et sur ce que cet acte, sans précédent, représente de discrimination et de viol de tous les principes du sport. La Coupe du monde a été ainsi dévalorisée, déshonorée. Toute victoire d'une équipe aura un goût amer, un parfum de complicité à un crime commis contre le sport. Certes, ce n'est pas la participation de la Russie qui aurait été déterminante dans le résultat final, mais c'est le principe, c'est l'idée que les jeux sont faussés dès que ce principe d'égalité des chances de chaque pays n'est pas respecté.

Je me surprends à être satisfait que l'Algérie ne participe pas à une compétition à ce point ternie. Cela apaise totalement la douleur que j'avais ressentie à son élimination, lors de ce coup du destin si injuste.

Kherson

Kherson. Les télés occidentales s'attardent longuement sur la joie des habitants de la ville. Je regarde les images. Mais quels sont les «vrais habitants», ceux qui sont restés ou ceux qui ont été évacués vers la Russie. Ceux qui sont restés sont quelques centaines à agiter de rares drapeaux, à danser sans grande énergie. Le cadrage serré veut donner l'impression d'une grande foule. J'ai l'impression d'une joie triste, surfaite. Le sentiment d'une guerre civile qui ne donne aucune satisfaction, où il ne peut y avoir de vainqueur. Souvent, en Ukraine, on est avec celui qui occupe les lieux mais on est surtout pour la paix, pour la fin de ces tueries absurdes. Mais même ça, on ne peut le dire au risque de paraitre suspect, à un camp comme à l'autre.

Le train de Kiev arrive pour la première fois depuis longtemps. Les médias occidentaux ont le commentaire plein d'émotion, des larmes dans la voix. On nous dit qu'ils sont plus de deux cents dans le train mais seulement quelques passagers en descendent.

Comment ce train a-t-il pu arriver à Kherson sans être bombardé par l'armée russe ? Pourquoi les Russes épargnent-ils Kherson alors qu'ils sont juste en face, sur l'autre rive du Dniepr, à moins de deux km ? Questions que se pose certainement chacun de ceux qui regardent ces images, mais que ne se posent pas les journalistes qui rendent compte de l'évènement. Pourquoi ? Par crainte de donner de la Russie une image humaine ?

Chaque jour, j'ai l'impression d'une dégradation toujours plus grande des médias occidentaux. Et pourtant, je continue de regarder comme fasciné par cette déchéance.