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Les Algériens disent non à tout tutorat

par Kharroubi Habib

A l'adresse des partisans de l'option d'une transition constituante qui la présentent comme voulue et revendiquée par le mouvement populaire et par voie de conséquence par la majorité du peuple algérien qui soutient ce dernier, le général Ahmed Gaïd Salah a martelé dans l'allocution qu'il a prononcée à Oran au troisième jour de sa visite en 2e Région militaire que le « peuple algérien n'a besoin d'aucun tuteur qui lui dicte quoi faire». Sur ce point, le chef de l'armée est dans le vrai.

Le peuple algérien s'est effectivement soulevé pacifiquement avec pour objectif d'en finir avec le tutorat qui s'est exercé sur lui sous couvert de prétendues légitimités successives depuis le recouvrement de l'indépendance du pays en 62. Sauf que lui-même et le haut commandement de l'armée se comportent en tuteur autoproclamé de ce peuple en ayant décrété en son nom qu'il n'est pas question d'une transition constituante et en soutenant qu'il est en accord avec l'option prônée par eux de l'organisation d'une élection présidentielle dans le plus bref délai.

Ni les partisans de la transition ni ceux qui adhèrent à l'option électorale prônée par Gaïd Salah et le haut commandement de l'armée n'ont le droit de parler au nom du peuple tant que celui-ci n'aura pas clairement et de manière indubitable fait son choix entre l'une et l'autre démarche. La seule certitude qui ressort des marches et manifestations populaires qui s'enchaînent sans discontinuité chaque vendredi depuis le 22 février est que les Algériens veulent le départ de tous les symboles du régime de Bouteflika et l'instauration d'un Etat de droit démocratique, non corrompu et non corrupteur. Que l'armée, les acteurs politiques ainsi que les associations et organisations issues de la société civile se déclarent à leur côté et en accord avec les revendications populaires, cela ne confère à aucune de ces parties le droit de s'autoproclamer leur représentant. En s'octroyant ce label de représentativité que ne confirment pas les positions citoyennes à leur égard, ces parties dans la crise politique font fi de la souveraineté que le peuple s'est réappropriée et ne veut en déléguer à nul l'interprétation et l'exercice. Ce n'est pas la poursuite des marches populaires qui est cause de l'impasse politique et des obstacles mis à son dépassement. Celle-ci est dans la prétention de ces parties à la crise à se croire chacune détentrice de solution dont le peuple veut la mise en œuvre. Ce qui est révélateur qu'elles ne sont pas prêtes à voir le peuple libéré de tout tutorat et devenir l'unique décideur de ce que sera le devenir de son pays et la source légitimante du pouvoir qui aura la charge de traduire dans les faits la volonté populaire. Oui l'ère du tutorat est bien finie en Algérie et les Algériens s'opposeront à son retour sous quelque forme que se manifestera la velléité de son retour.