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L'ANNEE BLACKWATER

par K. Selim

L'année Obama est finie ! Revoici l'année Bush avec Barack Hussein à la Maison-Blanche. Les actualités d'une fin d'année et du début d'une autre sont des sortes de feuilles de route. Depuis quelques jours, on est ramené brusquement à la grande confrontation de l'ère Bush : Al-Qaïda, qui est partout, contre l'Empire qui doit être de manière «préemptive » partout également. Les républicains, qui ont déjà gagné en imposant le respect de l'agenda guerrier de Bush, sont décidés à effacer les «égarements» de la présidence d'Obama en 2009.

 Et ce soudain activisme d'Al-Qaïda - de l'Afghanistan au Yémen et dans la zone sahélienne, sans compter la tentative d'attentat contre Northwest Airlines reliant Amsterdam à Detroit - est donc propice à ranger en tant que pures lubies les tergiversations «morales» du président nobélisé - de manière préemptive - par une académie norvégienne politiquement peu naïve. Il faudra donc surveiller pour 2010 les lignes de front déjà en feu. Et aussi s'attendre à ce que d'autres s'allument, au Proche-Orient notamment.

 Mais, c'est du coeur de l'Empire qu'est venu le plus important message en ce début 2010. Un juge américain a tout simplement décidé, apparemment pour une question de forme, d'absoudre les assassins employés par Blackwater qui ont tiré pour le plaisir sur de paisibles Irakiens et en ont tué quatorze. C'est un message impérial fait au nom de la loi. Américaine, s'entend.

 Les «bavures» et «dommages collatéraux» américains sont tellement nombreux qu'ils font partie de la routine de la Civilisation armée. Les organisations humanitaires s'en indignent et l'armée américaine se contente du laconique «enquête en cours», tandis que les Karzaï locaux se lamentent des conséquences électorales. Le scénario est archi-connu.

 Il n'en reste pas moins que la décision du juge d'absoudre les assassins de Blackwater est d'une violence inouïe. On n'est pas en présence d'une administration qui sait escamoter les affaires, mais d'une décision de justice qui, derrière une justification de procédure des plus douteuse, a décidé que des assassins récidivistes, impliqués dans diverses atrocités, qui ont accompli leur crime sous les yeux de centaines d'Irakiens, n'étaient pas punissables.

 Blackwater, devenue après le massacre des innocents la société de «sécurité Xe», est en définitive une organisation semblable à Al-Qaïda mais totalement protégée par la loi américaine. Il faut peut-être songer à faire de ce premier janvier 2010 le Blackwater Day, ou le jour de Ricardo Urbina, du nom du juge qui a décrété le droit de gangsters à tuer en plein jour. La doctrine Urbina entérine le droit des mercenaires à tuer sans avoir de compte à rendre. Les entreprises de pistoleros qui accompagnent l'armée régulière des Etats-Unis viennent de se voir délivrer la plus satisfaisante des assurances. Ils peuvent continuer à utiliser aveuglément leurs armes contre les Arabes et les musulmans qui sont, bien entendu, tous des suppôts d'Al-Qaïda, l'ennemi si utile de l'Empire.

 On attend de voir si ceux qui font semblant de gouverner l'Irak dans la Zone verte à Baghdad vont décider de renvoyer chez eux les sociétés de mercenaires qui sont restées après le départ de Blackwater.