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Le Fatah face à lui-même

par Kharroubi Habib

Dans son discours inaugural au 6e congrès du Fatah, dont les travaux ont débuté hier dans la ville de Bethléem, en Cisjordanie occupée, Mahmoud Abbas, qui est le président du mouvement en même temps que celui de l'Autorité palestinienne, a affirmé que son parti est pour la paix avec Israël mais qu'il n'exclut pas la lutte armée contre lui en cas de persistance de l'impasse dans laquelle sont les négociations israélo-palestiniennes.

 Ce qu'il n'a pas en revanche explicité, c'est à partir de quel moment, lui et son mouvement arriveront à la conclusion d'un horizon bouché pour ces négociations et donc à l'impératif de reprise de la lutte armée pour imposer les revendications nationales palestiniennes. Il va lui être en tout cas très difficile de faire l'unanimité du congrès du Fatah autour de cette position, qui est aussi dénoncée par le Hamas.

 La participation au congrès du Fatah a beau avoir été filtrée par Mahmoud Abbas et ses partisans, leur position ambiguë en ce qui concerne la relation avec Israël sera au centre des débats, d'autant que le président palestinien ne peut faire valoir qu'elle a permis au peuple palestinien d'enregistrer des avancées dans la satisfaction de ses droits nationaux.

 Voulu par Mahmoud Abbas et le courant sur lequel il s'appuie au sein du Fatah, comme devant ressouder les rangs de ce mouvement, le 6e congrès risque au contraire de consommer son implosion. La vieille garde historique, dont Farouk El-Kaddoumi est la figure de proue, rendue responsable de l'effondrement de la popularité du Fatah pour cause de sa corruption, s'attachera en effet à démontrer que ce sont les choix stratégiques imposés par Mahmoud Abbas et ses partisans qui sont à l'origine de cette impopularité. Un point de vue que partagent les jeunes activistes du mouvement, qui eux ne se font plus d'illusions sur une solution pacifique avec l'Etat sioniste.

 Les derniers développements qui sont intervenus sur la scène proche-orientale avec l'arrivée au pouvoir en Israël de l'alliance gouvernementale frappée du sceau de l'extrémisme, négateur de l'identité nationale palestinienne, ne sont pas pour donner du crédit à la défense par Mahmoud Abbas de la poursuite de la voie qu'il a imprimée au Fatah depuis la mort de Yasser Arafat en devenant son successeur. Au mieux donc, le président palestinien aura une majorité et parviendra ainsi à écarter de la direction du mouvement les personnalités qui lui sont radicalement hostiles.

 Mais cela se fera en provoquant d'inévitables dissidences, ce qui ne confortera en rien l'unité recherchée du Fatah. Ce qui aura pour conséquence d'amoindrir encore plus ce qui reste de prestige et d'autorité à Mahmoud Abbas. Lesquels ont été durement affectés par les déboires qu'il a subis dans la politique sans issue qu'il mène en direction de l'Etat sioniste, par l'impuissance qu'il a affichée lors de l'agression criminelle de celui-ci contre la bande de Gaza, et son incapacité à réduire la sécession de fait de ce territoire désormais sous contrôle du Hamas, qui ne lui reconnaît plus la qualité de président de l'Autorité palestinienne.

 Et ce n'est pas avec cette posture dégradée que Mahmoud Abbas pourra redorer son blason au plan international et espérer rassembler sur son nom les forces favorables à la cause nationale palestinienne.