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L'Etat cible les détenteurs de comptes à l'étranger: De l'argent à tout prix

par Moncef Wafi

L'Etat veut à tout prix capitaliser l'argent qui circule en dehors des circuits officiels en Algérie.

Après les mesures prises par le gouvernement de renflouer la fiscalité ordinaire, en dehors des recettes des hydrocarbures, le ministre des Finances vient d'annoncer, à partir d'Oran, le lancement d'une opération en direction de la communauté algérienne établie à l'étranger leur permettant d'ouvrir des comptes bancaires en devises en Algérie, dès juin prochain.

Benkhalfa ira jusqu'à faire peur aux Algériens de l'étranger brandissant la carte de l'instabilité des pays d'accueil. Cette mesure, précisera-t-il à leur intention, permettra de sécuriser leur argent dans leur pays face aux dangers des mutations que connaissent différentes régions du monde qui peuvent les contraindre à un retour au pays d'origine pour y résider. Il expliquera cette démarche par la volonté du gouvernement à multiplier le nombre des comptes courants de 7 à 17 millions.

Par ailleurs, il a mis en garde contre les conséquences de transfert d'argent vers des banques à l'étranger et les difficultés de récupération de ces avoirs en cas de changement de lois (suspension des visas et autres contraintes). Cette déclaration a de quoi surprendre au beau milieu de la tempête des Panama Papers où des noms d'Algériens ont été cités comme c'est le cas du ministre de l'Industrie ou de l'entourage de Chakib Khelil. Est-ce une perche tendue à ces détenteurs de comptes offshore, leur garantissant une immunité fiscale ? Benkhalfa a également mis l'accent sur la nécessité de sensibiliser les détenteurs de «fonds endormis» à les déposer dans les banques. Une volonté qui s'est déjà manifestée à travers la mise en conformité fiscale volontaire ciblant les opérateurs de l'informel qui, pour l'heure, n'a pas tenu toutes ces promesses, la canalisation des milliards de l'informel, le renforcement de la fiscalité ordinaire, l'endettement «qu'il soit interne ou externe», les dividendes liés aux transactions par chèques.

La dernière mesure en date concerne l'emprunt obligataire lancé le mois dernier et qui peine à trouver sa vitesse de croisière malgré le taux d'intérêt offert. La multiplication de ces opérations de recouvrement de liquidités, quelles que soient leurs origines, renseigne sur la situation de l'Etat presque aux portes du dépôt de bilan malgré tous les discours de bonne intention.

Des difficultés rencontrées dans le paiement des situations des projets réalisés mais aussi dans le gel d'autres programmés en amont.

Le gouvernement qui avait nié, dans un premier temps, recourir à tout endettement extérieur est en train de revoir ses cartes se dirigeant doucement mais sûrement vers des emprunts à l'étranger privilégiant la piste chinoise. Dans cette quête effrénée d'argent, l'Etat prête le flanc jusqu'à flirter avec l'amnistie fiscale et le blanchiment d'argent devenant la plus grande lessiveuse du pays. Les portes ouvertes sur l'argent propre devraient être l'opportunité toute rêvée pour les barons de l'informel et détenteurs de capitaux «louches» pour se racheter une virginité. Un risque que beaucoup n'ont pas l'intention de prendre craignant sans doute des scénarios à la Khalifa Bank et des lendemains politiques très incertains.