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Vol AH5017 d'Air Algérie : Les capteurs de pression des moteurs responsables du crash

par Yazid Alilat

La cause du crash de l'avion, loué par Air Algérie auprès d'une compagnie espagnole, Swiftair, pour assurer le vol Ouagadougou-Alger, du 24 juillet 2014, est désormais connue. Cet accident a fait 116 victimes, dont 110 passagers. Le crash du MDD 83 dans le nord du Mali, en pleine nuit et par une très forte tempête, a été provoqué par le givrage des capteurs de pression (EPR). Huit mois et quelques jours après la catastrophe, les causes réelles de l'accident du vol AH5017 sont maintenant connues, grâce au travail des enquêteurs du Bureau enquêtes et analyses (BEA) français.

EXPLICATIONS:

?'En givrant, à l'altitude de croisière dans une atmosphère très humide, des capteurs de pression (EPR), situés sur les moteurs, ont transmis des informations erronées à l'automanette, qui règle la poussée des moteurs, en fonction de la vitesse demandée par l'équipage. Sur la base de ces paramètres erronés, une poussée insuffisante a été indiquée aux moteurs par l'automanette. L'avion a alors ralenti. De son côté, le pilote automatique a corrigé l'assiette de l'avion à cabrer pour maintenir l'altitude. « C'est ainsi qu'à compter de l'apparition de l'erreur de mesure des valeurs d'EPR, la vitesse de l'avion a diminué de 290 à 200 noeuds en 5 minutes et 35 secondes, environ, et l'incidence a augmenté jusqu'au décrochage de l'avion », écrit, dans son rapport, le BEA.

L'avion est parti brusquement en virage à gauche jusqu'à atteindre 140 degrés d'inclinaison, et à piquer jusqu'à 80 degrés. « Les paramètres enregistrés indiquent qu'il n'y a pas eu de manoeuvre de récupération du décrochage réalisée par l'équipage », expliquent, encore, les enquêteurs du BEA.

Cette conclusion des causes réelles du crash de l'avion Mc Donnel Douglas a été extraite des paramètres de vol contenus dans l'une des deux boîtes noires, le ?Flight Data Recorder' (FDR, ou l'enregistreur de données). Quant à l'enregistreur de voix dans le cockpit des pilotes, le ?Cockpit Voice Recorder' (CVR), il n'a pu être exploité car trop abîmé, et était, probablement, hors service avant le vol AH 5017, selon, les enquêteurs, qui ne disposent pas d'une donnée fondamentale: le dialogue entre les deux pilotes, face à la panne technique des capteurs de pression, qui règlent la vitesse de l'avion, en fonction des ordres données via l'automanette, par les pilotes. Dès lors, le crash était inévitable, l'avion fonctionnant, selon de fausses données communiquées par le capteur de pression. Toutes les hypothèses émises, auparavant, dont les fortes turbulences lors du vol ou les mauvaises conditions « météo », ou même une erreur humaine, sont maintenues éliminées.

DES PRECEDENTS

Avant cet accident, il y a eu deux cas similaires, qui se sont produits, en juin 2002 et en juin 2014, sans conséquences graves, et pourtant un mois avant la catastrophe du vol 5017. Le deuxième avait déjà touché ?Swiftair', la compagnie espagnole affrétée par Air Algérie pour les liaisons Alger-Ouagadougou-Alger. Pourquoi n'a-t-on pas alerté la Communauté aéronautique internationale et les agences de sécurité, notamment européenne et américaine sur ces deux incidents ? La question reste posée sur le sérieux de cette compagnie espagnole.

D'autant que le BEA français, qui a lancé une alerte sur ce défaut propre au MDD, a, lui, bien transmis les informations relatives à ce dramatique accident du vol Ouagadougou-Alger à la Communauté aéronautique internationale via l'Agence européenne de la sécurité aérienne et à son homologue américaine afin qu'un accident de la même nature ne se reproduise pas. Plusieurs accidents d'avions ont été provoqués au cours de ces dix dernières années par des instruments de vol très sensibles. C'est ainsi que le crash d'un A330 d'Air France qui assurait le vol Rio de Janeiro-Paris au milieu de l'Atlantique, le 1er juin 2009, peu après son départ du Brésil, a été provoqué par le givrage des sondes ?Pilot', installées près du cockpit, près du nez de l'appareil.

Plusieurs jours ont été nécessaires, aux équipes de secouristes, aux militaires algériens, français, et maliens pour découvrir ce qui restait des débris du MD83 de Swiftair, dans le nord-est du Mali, près de la frontière burkinabé. Les débris de l'appareil avaient été rassemblés jusqu'à plusieurs kilomètres du lieu du crash, un énorme trou où s'était enfoncé l'appareil, avant d'exploser sous la force de l'impact. Les secouristes, ont travaillé des mois durant sur l'ADN de parents de victimes pour identifier ce qui restait des corps des victimes.