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La tête et ses maux

par El Yazid Dib

Le mal dans une tête n'est pas d'une indisposition qui résiste à la normalité d'un crâne régulièrement constitué. On est en face d'une horreur. Le mal de tête peut être aléatoirement confondu avec un pouvoir céphalique qui fait atrocement mal. Tenace et rebelle, il perfore la lucidité et empêche l'instant de se séparer de l'immédiat. Tout s'entremêle quand un cerveau farfouille ou trébuche par-devant une incapacité à résoudre le destin d'une nation ou assurer sa propre sainteté.

L'exercice d'une prestation politique est la principale cause des maux de tête. Si le ver est dans le fruit, c'est ce dernier qui va s'endommager. Le ver mourra d'usure. L'avarie devient physiquement un résultat et non un principe de fonctionnement pétrificateur. Et si la tête résiste à la longue à un mal, ce dernier disparaîtra par mépris et ira séjourner ailleurs?, dans les démembrements et les arcades sourcilières. A défaut, elle explosera.

L'on n'a jamais cessé de dire que la chaise fait tourner la tête et provoque des nausées. La gestion d'un monde et de sa paix le fait aussi. Les sièges au Conseil de sécurité pivotent par puissance sur le même axe tandis que ceux de nos assemblées tremblotent au gré des allégeances. Ce sont ces têtes-là, celles qui coiffent les pyramides des républiques et des royaumes qui sont le logement du malaise subit par le corps. C'est à partir de cet endroit pensif et concepteur que le signal d'une guerre, d'un marché juteux ou d'une haine prend naissance. L'incompréhension de ce qui se passe autour de lui; chez un migraineux est une faute d'autrui. Une irresponsabilité des autres. La sienne, celle de ses actes n'est qu'une réaction causée par les turbulences de sa proximité. On n'est pas censé déranger une tête qui pense. Mais l'on admet qu'elle veuille bien se déranger pour nous. Il y a aussi des pensées sournoises qui, croyant être réflexions, ne sont en fait que des cauchemars. Penser à dominer un peuple, emprisonner une voix ou vendre un pays est plus qu'un mal de tête. Une grave affection de toute la tête et de ses dépendances.

L'on s'agite parfois et à tête nue et pour un rien dans l'effervescence de ses méninges. Il suffit pourtant de travailler selon vos aspirations une route intelligente à destination de haltes voulues et non pas à subir. L'idée serait donc d'être plus éclairé, un peu plus que les autres et progresser lucidement vers le bon jugement. Le pétrole est non renouvelable, les générations le sont. Le prix du baril est fluctuant, le besoin d'un pain demeure impérissable. Avoir ça en tête, anticiper la solution, c'est un peu garantir un avenir qui ne sera pas le vôtre mais devra se faire sans vous et un peu aux dépens d'un présent. Le vôtre.

Le mal, en tous les cas, naît dans la tête et se répand telle une onde nuisible sur la tête des autres. Daech est un mal dans la tête du monde. Ce monde-là, impersonnel et indifférent, est un autre mal dans la tête de l'humanité. Il s'éveille sous un turban, comme il s'abrite sous une kippa. Le reste du temps de l'histoire fait que la contradiction est souvent le pléonasme du mal. L'hitlérisme et le sionisme sont différemment des points communs. Le terrorisme et l'intégrisme de tout bord n'ont rien à leur envier. Les religions et leurs pratiques dépendent le plus souvent de la multiplicité des têtes pensantes. Pour dire que le mal est dans le mal.