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Il ne faut pas se tromper de cible

par Kharroubi Habib



Quasi-unanimement, l'opposition partage le point de vue que c'est le système dans son ensemble qui est responsable de ce qui a été possible dans la reconduction à la tête du pays du président Bouteflika, pourtant dans l'impossibilité, pour raison de santé, d'exercer pleinement les lourdes charges de la magistrature suprême. En revendiquant le changement de ce système qui a failli à construire un Etat qui ne soit pas celui d'une République bananière dans laquelle devient possible le scénario à la fois ubuesque et dangereusement préjudiciable pour la stabilité du pays qu'est le maintien à sa tête d'un homme devenu inapte physiquement et aux capacités intellectuelles diminuées au point que le doute plane qu'il soit en mesure d'être la source des décisions qui lui sont endossées, l'opposition a trouvé écho dans l'opinion publique. Elle suscite toutefois méfiance et incompréhension en se braquant sur la situation dans laquelle s'est retrouvé le pays par la reconduction de Bouteflika dont certains de ses segments réclament la destitution d'une manière ou d'une autre, comme s'ils pensent que son départ ouvrirait la voie au changement de système prôné dans leurs programmes. Ils ne sont pas pourtant naïfs pour ne pas se douter que tant que le système restera en place la désignation et l'intronisation d'un chef de l'Etat se fera comme il en décidera et par ses pratiques dont il ne faut pas espérer qu'il en changera subitement. Certes, le départ de Bouteflika mettrait fin à la risible et humiliante image dont l'Algérie donne le spectacle, mais il laissera en l'état le problème qui est à l'origine de la crise qui paralyse le pays et hypothèque son avenir : celui d'un système qui s'accroche au pouvoir malgré sa totale obsolescence et le fait d'avoir conduit la Nation au mur.

En s'entêtant à vouloir accréditer que Bouteflika est le problème pour l'Algérie, ils encourent le risque d'apparaître peu fiables dans leur revendication d'un changement du système. L'opposition gagnerait à ne pas se disperser dans l'énoncé de ses revendications et à faire de celle du changement global du système la priorité de ses objectifs. Elle doit s'atteler à bâtir un front uni, seule perspective pour elle de créer un rapport de force avec le système et le pouvoir, qui obligerait ceux-ci à l'entendre. Elle a certes accompli d'encourageantes avancées sur cette voie, ce qui a indubitablement mis en alerte les tenants du système qui tentent de saper ses efforts en jouant sur les divergences qui subsistent entre ses composantes sur le processus et le mode opératoire sur lesquels s'entendre pour la mise en œuvre du changement à opérer. Elle doit surtout se convaincre sans ambiguïté que ce n'est pas en jouant les clans du système les uns contre les autres qu'elle fera avancer la revendication du changement de régime auquel, comme une majorité d'Algériens, elle aspire. A ce jeu, les clans du système ont prouvé qu'ils en sont toujours les bénéficiaires car il n'aboutit finalement qu'à créer l'illusion qu'il s'opère un changement sans pourtant que la pérennité du système s'en trouve remise en cause.