Dans son récent discours sur l'état de l'Union prononcé devant le congrès des Etats-Unis, le président Barack Obama a soutenu que l'Amérique et ses alliés de l'Otan sont en train de gagner la guerre qu'ils mènent en Afghanistan depuis dix ans.

Une vision optimiste qui est venu remettre en cause un rapport sur la situation en Afghanistan rédigé par des experts à la demande du Conseil de l'Otan siégeant à Bruxelles. De ce qui a filtré la semaine dernière des conclusions de ce rapport remis au secrétaire général de l'organisation atlantiste, il ressort en effet que la réalité sur le terrain en Afghanistan n'est pas du tout celle que prétendent le Président américain et les stratèges politico-militaires de l'Otan. Les auteurs de ce rapport affirment catégoriquement que malgré les coups sévères qui leur ont été infligés par la coalition occidentale, les talibans reviendront au pouvoir à Kaboul aussitôt que les forces de cette coalition seront retirées d'Afghanistan.

Etant en campagne électorale, le Président américain ne peut que défendre de façon positive la présence en Afghanistan de l'Amérique et de ses alliés et donner à croire à son opinion nationale que les choses évoluent dans le bon sens voulu par la coalition occidentale dans la guerre qui se déroule dans ce pays. Par d'autres signaux, Barack Obama corrobore néanmoins la conclusion du rapport remis au Conseil de l'Otan. Comment expliquer que Washington ait engagé des contacts indirects avec les talibans, sinon parce que l'administration américaine a fini par admettre qu'il lui est impossible de venir à bout de leur mouvement par la voie militaire.

Les Etats-Unis et leurs alliés ont échoué à réduire la résistance des talibans, à établir parallèlement un pouvoir afghan légitime jouissant de la confiance populaire et à entamer la reconstruction et le développement du pays. Dix ans d'occupation américaine et occidentale dont le résultat est que la situation en Afghanistan préfigure que ce pays reviendra à ce qu'il a vécu avant l'intervention des Etats-Unis et de l'Otan.

Tout ça pour ça ! Pour négocier avec les talibans et accepter sous conditions qu'ils reprennent le pouvoir. Quid de la démocratie et des libertés que l'invasion et l'occupation de leur pays étaient censées devoir apporter aux Afghans ?

Quels que soient les termes du deal que les Occidentaux sont en train de vouloir faire contracter aux talibans, il en résultera que la guerre menée au nom de ces principes est belle et bien perdue. Barack Obama aura beau justifier ce deal en préparation par la soi-disant défaite infligée à Al-Qaïda et l'élimination de ses principaux dirigeants, dont Oussama ben Laden, l'ex-présumé ennemi numéro un des Etats-Unis, il n'en résultera pas moins un triomphe pour les talibans.

L'Amérique est en quête d'un retrait ordonné de ses troupes en Afghanistan, à l'instar de celui opéré en Irak, et peu importe ce qu'il adviendra après dans le pays. Washington s'est fait à l'idée de pouvoirs islamistes dans le monde musulman. Tout ce que l'administration américaine attend de ces pouvoirs et de celui des talibans, c'est qu'ils abandonnent l'action terroriste contre l'Amérique. Qu'ils instaurent dans leurs pays respectifs des régimes totalitaires et leur imposent des projets de sociétés antinomiques des valeurs de modernité, de démocratie et de leur tolérance, n'est pas pour donner mauvaise conscience à cette Amérique qui a pourtant justifié les guerres qu'elle a engagées par la défense de ces valeurs.