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Un calendrier de rendez-vous hasardeux

par Kharroubi Habib

En prévision d'une rentrée qu'il craint à juste titre explosive, tant au plan social que politique, le pouvoir s'est aménagé un calendrier aux annonces et rendez-vous dont il espère un effet d'amortissement des tensions redoutées.

 Instruit de l'ampleur de la déferlante de contestations sociales à laquelle il va devoir faire face après la pause que le ramadhan a fait faire à celle-ci, le gouvernement croit avoir trouvé la parade qui en atténuera le choc, en convoquant une tripartite pour avant la fin du mois de septembre, c'est-à-dire aussitôt après la rentrée officielle. L'annonce de ce rendez-vous a été confiée au secrétaire général de l'UGTA, lequel a, dans la foulée, fait miroiter que d'importantes décisions sociales seront prises dans la rencontre.

 Sauf que le patron de la centrale UGTA et ceux qui lui ont soufflé ses propos sur les perspectives assignées à la tripartite se trompent s'ils pensent que la contestation sociale va s'éteindre du seul fait qu'une tripartite va se tenir. Au contraire, cette contestation va faire tache d'huile, au constat tiré par les acteurs sociaux que leurs revendications ne deviennent audibles des pouvoirs publics que quand elles sont portées par des démonstrations de force que sont les grèves, les manifestations de rue et les sit-in. Et de celui que les tripartites n'ont répondu que de façon dérisoire à ces revendications.

 Censées être le cadre du dialogue social dans le pays, ces tripartites ont en fait servi d'alibi et de caution à une politique sociale par ailleurs unanimement décriée et dénoncée par les salariés et la majorité des citoyens qui en subissent les rigueurs et les injustices.

 Au plan politique, la situation à la rentrée s'annonce comme devant être aussi tumultueuse que celle du front social. Rien n'a encore filtré de ce que le pouvoir fera pour tenter de casser en la circonstance la dynamique de sa remise en cause qui s'est enclenchée dans les segments de son opposition politique. On peut néanmoins présager, sans grand risque d'erreur, que sa stratégie consistera à accélérer le processus de réformes et mettre ainsi devant le fait accompli les détracteurs dans ce milieu, de son projet de réformes, avant qu'ils n'aient le temps de faire partager à l'opinion publique leurs critiques et réserves sur ce projet.

 Des « indiscrétions » suggèrent que le dossier des réformes est ficelé et prêt à l'emploi et que la lenteur apparente qui semble caractériser sa gestion n'est en fait qu'un leurre tactique. En fait, il fallait au pouvoir déterminer le timing le plus perturbant pour ses adversaires, celui qui lui permet de les prendre de vitesse et fera apparaître leurs récriminations et exigences comme inspirées par un combat d'arrière-garde sans impact sur le déroulement des évènements liés aux réformes politiques.

 Sauf que la situation dans le pays, tant sociale que politique, et le contexte régional et international font que la marge de manœuvre des autorités dans l'exercice unilatéral du pouvoir de décider ce que veulent ou non les citoyens, n'est plus ce qu'elle était. A mésestimer cette réalité, elles prendront le risque d'enflammer la contestation populaire en tous ses aspects. A partir de là, s'ouvrirait alors pour l'Algérie un chapitre de son existence dont nul ne peut dire avec certitude comment il s'écrira et sur quoi il débouchera.