Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Alger et Paris sur une bonne dynamique

par Yazid Alilat

L'arrivée des socialistes à l'Elysée semble avoir donné une nouvelle configuration aux relations algéro-françaises. Après le dernier quinquennat de la droite sous Sarkozy, qui n'a pas fait énormément bouger les choses entre les deux capitales, notamment sur le plan économique et celui, sensible, de la relation des deux pays à leur histoire commune dont celle de la guerre de libération nationale, les socialistes emmenés par François Hollande semblent avoir mieux compris les attentes d'Alger. Et leurs intérêts à garder en bonne santé cette relation «complice» avec l'Algérie, un pays devenu une place forte dans la lutte contre le terrorisme transnational, un pays qui veut, surtout, rattraper et vite son déficit en termes de développement industriel, de mise en place de nouvelles plates-formes de services et une agriculture orientée vers l'agro-industrie. Un pays qui finance un programme quinquennal de développement (2015-2019) qui pèse plus de 260 milliards de dollars.

Paris a compris ce désir impérieux de l'Algérie de forcer la cadence pour remettre à niveau son industrie, son agriculture et, surtout, son économie, déstructurée avec des usines complètes parties à la casse. Les deux pays, qui parlent aujourd'hui «un même langage» tant en matière de lutte contre le terrorisme, de maintien de la paix et de la sécurité au Sahel, et ailleurs en Afrique, notamment en Libye, que dans le domaine du développement économique et social, veulent aller encore plus loin. Dans tous les secteurs de coopération. Et particulièrement dans le volet industriel avec la nomination par les deux présidents Abdelaziz Bouteflika et François Hollande de deux envoyés personnels chargés de mettre en place une coopération industrielle permanente qui a abouti en 2012 à la signature de plusieurs accords, dont la mise en place d'une usine Renault à Oran, une décision arrachée au constructeur français pour qui le marché algérien est très solvable et attractif.

Paris comme Alger travaille en réalité à asseoir de nouveau un axe de coopération industrielle fort, solide et qui intervient en aval d'une coopération politique, sécuritaire et militaire de plus en plus renforcée entre la France et l'Algérie. Sinon comment interpréter les gestes amicaux de Paris envers Alger aux plus forts moments de l'annonce de l'assassinat d'Hervé Gourdel par un groupe de Daech en Algérie, outre le rebond de la coopération judiciaire notamment sur le dossier des moines de Tibhirine, et, plus sensible, de la coopération diplomatique et sécuritaire dans le dossier libyen. L'Algérie, on le sait, est soutenue (à 100%) par la France dans sa proposition de médiation entre les factions libyennes, comme Paris attend également beaucoup d'Alger dans la résolution, sinon le «containment» du conflit touareg au Nord-Mali.

Il reste que si l'Algérie est un partenaire commercial solide de la France dont les achats d'hydrocarbures (pétrole et gaz) représentent 97% de la facture des importations (4,2 mds d'euros) d'Algérie, avec des exportations de 5,9 mds d'euros en 2013, la France est également perçue par Alger comme un partenaire économique viable, qui est de nature à soutenir la (ré) industrialisation de l'Algérie. L'inauguration lundi de l'usine Renault de Oued Tlélat en grande pompe par le Premier ministre Abdelmalek Sellal et le chef de la diplomatie française Laurent Fabius est un geste fort en direction de cette quête, par les deux pays, d'un rapprochement si facile et si difficile en même temps qui viendrait à mettre définitivement en place une coopération multiforme exemplaire.